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Accueil/ Actualités - La Quotidienne/ Affaires/ Pratiques commerciales déloyales

La vente d’un ordinateur prééquipé de logiciels n’est pas en soi une pratique commerciale déloyale

A l’opposé de la jurisprudence française, la Cour de justice de l’Union européenne valide la pratique consistant à vendre des ordinateurs équipés de logiciels préinstallés dès lors que certaines conditions, notamment d’information du consommateur, sont remplies.

CJUE 8e ch. 7-9-2016 aff. 310/15


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1. La Cour de cassation a saisi la Cour de justice de l’Union européenne d'une question préjudicielle (Cass. 1e civ. 17-6-2015 n° 14-11.437 FS-PB) : la vente d’un ordinateur équipé de logiciels préinstallés sans possibilité pour le consommateur d’acheter l’ordinateur sans les logiciels constitue-t-elle une pratique commerciale déloyale ?

2. La réponse apportée dans la décision commentée ci-après (CJUE 7-9-2016 aff. 310/15) est transposable aux articles L 121-2 et suivants du Code de la consommation relatifs aux pratiques commerciales déloyales, notamment trompeuses, et à l’article L 121-11 du même Code interdisant les ventes jumelées constitutives de pratiques déloyales.

3. La CJUE pose pour principe qu’une pratique commerciale consistant en la vente d'un ordinateur équipé de logiciels préinstallés sans que le consommateur puisse se procurer le même modèle d’ordinateur nu ne constitue pas, en soi, une pratique commerciale déloyale au sens de la directive 2005/29/CE relative aux pratiques commerciales déloyales vis-à-vis des consommateurs.

Une telle pratique ne devient déloyale,  ajoute la Cour de justice, que si elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et altère ou est susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur moyen (Dir. art. 5), ce qu’il appartiendra à la juridiction nationale d’apprécier au regard des circonstances de la pratique.

Par cette décision, la CJUE adopte, soulignons-le, une position contraire à celle de la Cour de cassation pour laquelle une telle vente constitue une pratique commerciale déloyale si le consommateur ne peut pas se procurer un ordinateur «nu » identique auprès du vendeur (Cass. 1e civ. 12-7-2012 n° 11-18.807 : RJDA 10/12 n° 903 ; Cass. 1e civ. 5-2-2014 n° 12-25.748 : RJDA 8-9/14 n° 733).

4. La diligence professionnelle est définie comme le « niveau de compétence spécialisée et de soins dont le professionnel est raisonnablement censé faire preuve vis-à-vis du consommateur, conformément aux pratiques de marché honnêtes et/ou au principe général de bonne foi dans son domaine d’activité » (Dir. art. 2, h).

Les circonstances spécifiques de l’affaire ayant donné lieu à la question préjudicielle étaient, selon la Cour de justice, susceptibles de satisfaire à ces exigences : le consommateur avait eu le choix d’accepter tous les éléments de l’offre ou d’obtenir la résolution de la vente ; il avait été correctement informé de l’existence des logiciels et des caractéristiques de chacun d’entre eux ; ce type d’offre conjointe était conforme aux attentes d’une part importante des consommateurs. La juridiction nationale devra prendre en considération ces circonstances lorsqu’elle appréciera la validité de la pratique.

5. Une pratique commerciale est susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur moyen lorsqu’elle peut compromettre sensiblement son aptitude à prendre une décision en connaissance de cause et, par conséquent, l’amener à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement (Dir. art. 2, e).

Sur ce point, la CJUE a insisté sur l’importance de l’information précontractuelle du consommateur, car c’est sur cette base que ce dernier se décide à souscrire au contrat proposé par le professionnel (CJUE 30-4-2014 aff. 26/13, point 70, rendu en matière de clauses abusives).

Dans l’affaire à l’origine de sa décision de 2016, le consommateur avait été dûment informé, avant de procéder à l’achat, que le modèle d’ordinateur  proposé n’était pas commercialisé sans logiciels préinstallés, et qu’il était donc libre de choisir un autre modèle d’ordinateur non prééquipé ou équipé d’autres logiciels. Il reviendra à la juridiction nationale de déterminer si, dans ces circonstances, l’aptitude du consommateur à prendre une décision commerciale en connaissance de cause a été sensiblement compromise. 

Dominique LOYER-BOUEZ

Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Concurrence consommation n° 93045

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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