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Le notaire doit s’assurer que le vendeur ne fait pas l’objet d’une procédure collective

Le notaire est tenu de vérifier spécialement lorsqu'il existe une publicité légale, les déclarations faites par le vendeur qui, par leur nature ou leur portée juridique, conditionnent la validité ou l'efficacité de l'acte qu'il dresse.

Cass. 1e civ. 29-6-2016 n° 15-17.591


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Aux termes de l’acte notarié par lequel ils ont vendu leur maison, des époux ont déclaré, Monsieur exercer la profession de « chef de cuisine », Madame être « sans profession », et chacun exempt de toute procédure collective. Le prix de vente, payé par la comptabilité du notaire, a été remis le jour même de la signature aux vendeurs.

Par la suite, l’acquéreur est assigné en inopposabilité de la vente par le mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de l’épouse, prononcée quelques jours à peine avant la signature de l’acte, au titre de son activité d’exploitante d’un fonds de commerce.

L’acquéreur se retourne contre le notaire ayant reçu la vente et son assureur. Sa demande est rejetée tant en première instance qu’en appel aux motifs suivants. Certes, l’agent immobilier présent lors de la signature de la vente atteste que les vendeurs ont évoqué l’existence de leur restaurant en présence du notaire. Toutefois, cet élément n’est pas en contradiction avec les énonciations de l’acte selon lesquelles le mari a déclaré être chef de cuisine et son épouse sans profession, ce qui est fréquemment le cas du conjoint collaborateur officieux. Par ailleurs, la profession déclarée par l’époux n’était pas de nature à faire naître une suspicion suffisante quant à l’existence d’une procédure collective à son encontre ou à celui de son épouse. En l’absence de tout élément concret permettant de douter de la véracité des déclarations des vendeurs quant à leur capacité commerciale, la responsabilité du notaire ne pouvait donc être retenue.

Censure de la Cour de cassation. Le notaire, recevant un acte en l'état de déclarations erronées d'une partie quant aux faits rapportés, n'engage sa responsabilité que s'il est établi qu'il disposait d'éléments de nature à faire douter de leur véracité ou de leur exactitude. Mais il est tenu de vérifier, par toutes investigations utiles, spécialement lorsqu'il existe une publicité légale, les déclarations faites par le vendeur et qui, par leur nature ou leur portée juridique, conditionnent la validité ou l'efficacité de l'acte qu'il dresse.

Le notaire aurait donc dû vérifier les déclarations des vendeurs sur leur capacité à disposer librement de leurs biens, notamment en procédant à la consultation des publications légales afférentes aux procédures collectives.

à noter : Désormais, le notaire chargé de la vente d’un immeuble devra donc systématiquement vérifier l’existence d’une procédure collective contre le vendeur, même lorsque ce dernier déclare (dans l’avant-contrat, notamment) exercer une profession qui ne relève pas du droit des procédures collectives. Pareille vérification peut notamment s’effectuer en consultant le Bodacc, un avis de tout jugement d’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire devant y être publié dans les 15 jours du jugement. Compte tenu de la facilité de cette démarche depuis que cette publication est disponible en ligne (y figurent tous les avis publiés depuis le 1er janvier 2008), un auteur a utilement invité les notaires à « acquérir le réflexe bodacc.fr » (F. Vauvillé, Le notaire face à la procédure collective du professionnel : Defrénois 2011 n° 11 p. 1027, qui relève toutefois « l’angle mort » de 15 jours entre le jugement et l’insertion au Bodacc).
La sévérité des juges en la matière s’est d’abord manifestée lorsque la partie concernée est représentée par procuration, le notaire semblant tenu dans ce cas d’une obligation de vérification renforcée (Cass. 1e civ. 12-5-2011 n° 10-17.602). Puis elle s’est étendue au cas où le client est bien présent à la signature de l’acte (Cass. 1e civ. 16-10-2013 n° 12-24.267 ; Cass. 1e civ. 2-7-2014 n° 13-20.576). Ces arrêts n’ayant toutefois pas été publiés au Bulletin, un doute pouvait subsister quant à la portée de la solution. La décision rapportée se charge de le dissiper. Elle paraît même encore plus sévère car les précédents arrêts s’appuyaient, pour justifier l’obligation de vérification pesant sur le notaire, sur l’existence d’une publicité légale « aisément accessible ». Or, cette dernière restriction ne figure pas dans l’attendu de principe ici énoncé par la Cour de cassation.
Emmanuel DE LOTH
Pour en savoir plus sur la responsabilité du notaire, voir Mémento Vente immobilière n° 70000 s.

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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