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CHSCT : l’obligation de prise en charge par l’employeur du coût de l’expertise est inconstitutionnelle

Saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité par la Cour de cassation, le Conseil constitutionnel censure la règle imposant à l’employeur de prendre en charge les frais d’une expertise demandée par le CHSCT, même lorsqu’elle a été annulée par le juge.

Cons. Const. 27-11-2015 n° 2015-500 QPC


Le 16 septembre 2015, la Cour de cassation a saisi, le Conseil constitutionnel d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC ; La Quotidienne du 23 septembre 2015) pour trancher la question suivante. La règle prévue par l’article L 4614-13 du Code du travail, telle qu’interprétée par la jurisprudence, selon laquelle l'employeur doit prendre en charge le coût d'une expertise sollicitée par le CHSCT même lorsqu'il en a obtenu l’annulation est-elle valable ? Les Sages répondent par la négative.

En vertu de l’article L 4614-13 précité, le coût de l’expertise sollicitée par un CHSCT est à la charge de l’employeur. Le recours exercé par ce dernier en annulation de la décision du CHSCT n’étant pas suspensif, il arrive très souvent que l'expertise ait été réalisée au jour où l'employeur en obtient en justice l'annulation. Or, la Cour de cassation a jugé que, même dans cette hypothèse, l’employeur demeure redevable des frais engagés à ce titre (Cass. soc. 15-5-2013 n° 11-24.218 : RJS 7/13 n° 546). Cette solution s'explique par l'absence de budget légal alloué au CHSCT.

Dans la présente affaire, l’employeur estimait que cette règle méconnaissait son droit à un recours juridictionnel effectif et constituait une atteinte à son droit de propriété et à sa liberté d’entreprendre.

Le Conseil constitutionnel lui donne raison. Il constate en effet que, s’il est expressément prévu que le président du tribunal de grande instance statue en urgence lorsqu’il est saisi par l’employeur d’un recours contre une délibération du CHSCT (C. trav. art. R 4614-19 et R 4614-20), aucune disposition légale ou réglementaire n’impose au juge de statuer dans un délai déterminé. Cette absence de délai d’examen du recours, combinée avec l’absence d’effet suspensif de ce dernier, conduit nécessairement, selon les juges, à priver l’employeur de toute protection de son droit de propriété protégé par l’article 16 de la Déclaration des droit de l’Homme et du citoyen de 1789.

Par conséquent, les Sages déclarent non conformes à la Constitution les dispositions de l’article L 4614-13 du Code du travail relatives au recours exercé par l’employeur contre la délibération du CHSCT sollicitant les services d’un expert, à savoir l’alinéa 1er et la première phrase de l’alinéa 2.

Toutefois, pour éviter de supprimer brutalement le droit du CHSCT de recourir à un expert, le Conseil constitutionnel laisse au législateur le temps de remédier à cette inconstitutionnalité en fixant au 1er janvier 2017 la date d’effetde l’abrogation des dispositions jugées inconstitutionnelles.

En pratique, la mise en conformité de ce dispositif devrait nécessiter une réforme d’ensemble du financement du CHSCT et/ou des voies de recours de l’employeur. Dans l'attente, jusqu’à l’intervention de cette loi, les dispositions actuelles, bien qu’inconstitutionnelles, demeurent en vigueur. L’employeur est donc toujours tenu de payer les frais d’une expertise sollicitée par le CHSCT, même s’il en obtient l’annulation en justice.

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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