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Temps partiel : attention à la requalification si un salarié travaille 35 heures sur une semaine !

Si un salarié à temps partiel qui accomplit des heures complémentaires travaille plus de 35 heures au cours d’une semaine, son contrat doit être requalifié en contrat à temps plein, à compter de ce dépassement, même si la durée de travail prévue au contrat est fixée mensuellement.

Cass. soc. 15-9-2021 n° 19-19.563 FS-B


Par Valérie DUBOIS
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©iStock

La durée légale du travail effectif des salariés à temps complet est fixée à 35 heures par semaine et les heures complémentaires accomplies par un salarié à temps partiel ne peuvent pas avoir pour effet de porter sa durée de travail au niveau de la durée légale du travail ou de la durée fixée conventionnellement (C. trav. art. L 3121-27 et L 3123-9, dans leur rédaction issue de la loi 2016-1088 du 8-8-2016 dite loi « Travail »).

A noter :

Avant la loi Travail, les dispositions de l’article L 3121-27 du Code du travail, qui fixe la durée légale du travail, figuraient à l’article L 3121-10 du même Code et la règle posée par l’article L 3123-9 fixant la limite absolue des heures complémentaires pouvant être effectuées par un salarié à temps partiel figurait à l’article L 3123-17. La seule différence sur le fond réside dans le fait que, depuis la loi Travail, la semaine débute par principe le lundi à 0 heure et se termine le dimanche à 24 heures mais qu’un accord d’entreprise, d’établissement ou, à défaut, de branche, peut fixer une autre période de 7 jours consécutifs constituant la semaine (C. trav. art. L 3121-32 et L 3121-35). Avant cette loi, la semaine prise en compte était nécessairement la semaine civile.

Dans un arrêt du 15 septembre 2021, rendu dans le cadre juridique antérieur à la loi Travail, la Cour de cassation précise, pour la première fois à notre connaissance, ce que recouvre la notion de durée légale du travail pour un salarié à temps partiel dont la durée du travail est fixée mensuellement.

La durée du travail du salarié à temps partiel ne peut pas être portée au niveau de la durée légale

En l’espèce, un agent de sécurité est engagé à temps partiel pour une durée de travail de 140 heures par mois, ramenées à 50 heures par mois en novembre 2014. Ayant accompli 36,75 heures de travail au cours de la première semaine du mois de février 2015, il saisit la juridiction prud’homale afin d’obtenir, à compter de ce mois, la requalification de son contrat de travail à temps partiel en un contrat de travail à temps complet.

Pour rejeter sa demande, la cour d’appel retient que dès lors que la durée du travail du salarié était fixée mensuellement, la réalisation, durant une semaine, d’un horaire supérieur à la durée légale hebdomadaire, alors que l’horaire mensuel demeurait inchangé, ne pouvait pas entraîner la requalification de son contrat à temps partiel en contrat à temps plein.

La question posée à la Cour de cassation était donc celle de savoir si lorsque la durée du travail du salarié à temps partiel est fixée mensuellement, le cadre du dépassement prévu par l’article L 3123-9 du Code du travail (L 3123-17 à l’époque des faits soumis à la Cour) doit être apprécié sur le mois ou sur la semaine.

En effet, d’un côté, l’article L 3121-27 du Code du travail (ancien article L 3121-10) prévoit une appréciation de la durée légale du travail sur la semaine. De même, l’article L 3123-1 du même Code décline la définition du salarié à temps partiel sur la semaine, le mois ou l’année, en faisant référence, pour les périodes supérieures à la semaine, à l’application sur la période considérée de la durée légale du travail, ou, si elle est inférieure à celle-ci, à la durée du travail fixée conventionnellement. D’un autre côté, l’article L 3123-6 du Code du travail (article L 3123-14 avant l’intervention de la loi Travail), se rapportant aux mentions du contrat de travail à temps partiel, prévoit que ce dernier doit mentionner la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail prévue.

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La durée légale du travail doit être appréciée sur la semaine

Censurant la décision des juges du fond, la Cour de cassation juge que la durée légale du travail doit s’apprécier dans un cadre hebdomadaire, au visa des anciens articles L 3121-10 et L 3123-17 du Code du travail. Pour elle, ayant constaté que le salarié avait accompli 1,75 heure complémentaire au mois de février 2015 et qu’au cours de la première semaine de ce mois, il avait effectué 36,75 heures de travail, en sorte que l’accomplissement d’heures complémentaires avait eu pour effet de porter la durée du travail accomplie par le salarié à un niveau supérieur à la durée légale du travail, la cour d’appel aurait dû en déduire que le contrat de travail à temps partiel devait, à compter de cette date, être requalifié à temps complet.

Rendue en application des dispositions légales antérieures à la loi Travail, la solution retenue par la Cour de cassation conserve, selon nous, toute sa valeur dans le cadre juridique actuel issu de cette loi, compte tenu de la reprise, quasi à l’identique, des dispositions légales antérieures.

A noter :

Le fait que le salarié ait accompli 1,75 heure complémentaire au cours du mois de février 2015 importe peu puisqu’il aurait pu accomplir jusqu’à 5 heures complémentaires au cours de ce mois. En effet, conformément aux dispositions l’article L 3123-17 du Code du travail, reprises à l’article L 3123-28 du même Code en application de la loi du 8 août 2016, le nombre d’heures complémentaires effectuées par un salarié à temps partiel au cours d’une même semaine ou d’un même mois ne doit pas dépasser le dixième de la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail prévue dans son contrat, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.

On notera également que, selon nous, la solution adoptée par la Cour de cassation aurait été la même si, sans dépasser la durée légale du travail, le salarié avait seulement atteint cette durée au cours d’une semaine eu égard à la rédaction des dispositions du Code du travail fixant la limite absolue des heures complémentaires pouvant être effectuées par un salarié à temps partiel.

Pour finir, on relèvera que, la Haute Juridiction ayant jugé que la durée légale du travail doit s’apprécier sur la semaine, la sanction de la requalification s’imposait, tout comme la date de cette requalification. En effet, la Cour de cassation avait déjà posé, dans de précédentes décisions, la règle selon laquelle si les heures complémentaires effectuées par un salarié à temps partiel ont pour effet de porter, fût-ce pour une période limitée à un mois, la durée de travail de l'intéressé au-delà de la durée légale, la requalification de son contrat en un contrat à temps plein est justifiée (Cass. soc. 12-3-2014 n° 12-15.014 FS-PB : FRS 8/14 inf. 10 ; Cass. soc. 16-12-2015 n° 14-16.530 F-D) et doit intervenir à compter de la première irrégularité (Cass. soc. 17-12-2014 n° 13-20.627 FS-PB : RJS 3/15 n° 225 ; Cass. soc. 27-9-2017 n° 16-13.926 F-D).

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne