Votre métier
icone de recherche
icone de recherche
logo
Accueil/ Actualités - La Quotidienne/ Affaires/ Baux

Droit de préférence conventionnel du locataire commercial : à quel prix s'exerce la préférence ?

Dès lors que le droit de préférence prévu au bail commercial a pour effet de substituer le locataire dans les droits de l'acquéreur évincé, celui-ci est tenu de payer la totalité du prix convenu avec cet acquéreur, y compris la commission de l'agent immobilier.

Cass. 3e civ. 28-9-2022 n° 21-18.007 F-D, Sté 9 Neuf c/ P.


Par Maya VANDEVELDE
quoti-20221110-affaires.jpg

©Gettyimages

Le propriétaire d'un immeuble comprenant des locaux commerciaux donnés à bail consent une promesse de vente de l'immeuble à un tiers. Le contrat de bail prévoyant une clause de préférence au profit du locataire commercial, le propriétaire notifie au locataire l'offre de vente telle qu'acceptée par le candidat acquéreur, c'est-à-dire à un prix incluant des honoraires d'agent immobilier. Le locataire accepte cette offre au prix offert par le tiers hors commission d'agence puis il agit contre le propriétaire en vue de voir déclarer la vente parfaite. 

La Cour de cassation écarte sa demande. Il résultait en effet des éléments suivants que le locataire n'avait pas valablement exercé son droit de préférence conventionnel : la clause de préférence stipulée au bail commercial imposait au propriétaire, d'une part, de faire connaître au locataire, avant de réaliser la vente de l'immeuble, l'identité du candidat à l'achat, le prix offert par celui-ci et les conditions générales et particulières de la vente projetée, d'autre part, de donner la préférence au locataire sur tous autres amateurs à égalité de prix et aux mêmes modalités et conditions ; l'exercice du droit de préférence prévu au bail ayant pour effet de substituer le locataire dans les droits et obligations de l'acquéreur évincé, le locataire était tenu de payer la totalité du prix convenu avec cet acquéreur, y compris la commission de l'agent immobilier. 

A noter :

Depuis l’entrée en vigueur de la loi Pinel du 18 juin 2014 (Loi 2014-626), le locataire commercial bénéficie d’un droit de préférence légal (C. com. art. L 145-46-1). Il est cependant inapplicable lorsque la cession projetée par le propriétaire ne porte pas sur le seul local commercial mais sur la totalité de l'immeuble (art. L 145-46-1, dernier alinéa), ce qui était vraisemblablement le cas en l'espèce. Le locataire ne pouvait donc pas se prévaloir d'un droit de préférence légal, ce qui explique que les débats se soient concentrés sur la mise en œuvre du droit de préférence prévu au contrat.

On sait qu'en matière de droit de préférence légal du locataire commercial l'offre de vente ne peut pas inclure des honoraires de négociation, la vente étant parfaite dès lors que le locataire a accepté le prix de vente, même s'il a refusé d'acquitter ces honoraires (Cass. 3e civ. 28-6-2018 n° 17-14.605 FS-PBI : RJDA 10/18 n° 710). C'est de cette solution que se prévalait en l'espèce le locataire, qui avait accepté le prix déduction faite du montant de ces honoraires.

Mais la Haute Juridiction écarte son raisonnement en se fondant sur les termes du contrat, interprétés par les juges comme mettant en place un mécanisme de substitution du locataire dans les droits de l'acquéreur évincé, plutôt qu'un droit d'acquisition prioritaire comme le prévoit le Code de commerce. Ainsi, tandis que le droit légal de préférence place le locataire en position de destinataire prioritaire de l'offre de vente, puisque le bailleur doit procéder à sa notification dès qu'il « envisage » de vendre (art. L 145-46-1 précité), ce qui interdit donc de faire supporter au locataire les frais de recherche d'un acquéreur, le droit de préférence conventionnel qui était ici prévu imposait au bailleur d'indiquer au locataire, avant de réaliser la vente, l'identité de l'acquéreur potentiel, le prix offert par celui-ci et les conditions générales et particulières de la vente projetée. Le mécanisme prévu par le contrat en cause n'était donc pas le même que celui mis en place par le Code de commerce. 

La solution aurait pu être différente si la rédaction de la clause de préférence avait été calquée sur les dispositions légales. 

Documents et liens associés

Cass. 3e civ. 28-9-2022 n° 21-18.007 F-D, Sté 9 Neuf c/ P.

Retrouvez toute l'actualité en matière de droit des sociétés, droit commercial et de la concurrence dans Navis Droit des Affaires !

Pas encore abonné ? Nous vous offrons un accès au fonds documentaire Navis Droit des Affaires pendant 10 jours.

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

Aller plus loin


Navis Droit des affaires
affaires -

Navis Droit des affaires

Votre fonds documentaire en ligne
201,47 € HT
Mémento Sociétés civiles 2024
affaires -

Mémento Sociétés civiles 2024

Le mode d’emploi des SCI, SCPI, SCP, SCM, GAEC…
175,00 € TTC