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Nouveau statut de l’exploitant individuel : le CNOEC précise le traitement comptable

Un avis du CNOEC a récemment précisé le traitement comptable de certaines opérations réalisées par les exploitants individuels ayant opté pour leur assimilation à une EURL soumise à l’impôt sur les sociétés.

Avis CNOEC 2023-07 du 2-2-2023 


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©Gettyimages

Les conséquences fiscales de l’option pour l’IS nécessitent certaines écritures comptables

Pour rappel, l'article 1er de la loi 2022-172 du 14 février 2022 a introduit un statut unique, protecteur de l'entrepreneur individuel, aux articles L 526-22Code de commerce à L 526-26 du Code de commerce, qui s'applique aux personnes physiques exerçant une ou plusieurs activités professionnelles indépendantes en leur nom propre, quelle que soit la nature de ces activités (BOI-BIC-CHAMP-70-10 n° 165).

Entré en vigueur depuis le 15 mai 2022, ce nouveau statut prévoit notamment la possibilité pour l’exploitant individuel, qui est en principe imposable à l’IR, d'opter de manière irrévocable pour l'assimilation de son exploitation à une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL), dont il tient alors lieu d'associé unique. L’option entraîne de plein droit son assujettissement à l'IS (CGI art. 1655 sexies modifié par loi 2021-1900 du 30-12-2021).

A noter :

L’option doit être formulée avant la fin du troisième mois de l'exercice au titre duquel l'exploitant souhaite bénéficier de cette assimilation (CGI A III art. 350 bis modifié par décret 2022-933 du 27-6-2022 ; BOI-BIC-CHAMP-70-10 nos 350 à 380).

L’option exercée en cours d’activité est une cessation fiscale d’entreprise …

L’administration a précisé que l'exercice de cette option en cours d’activité emporte la création d'une personnalité fiscale distincte (BOI-BIC-CHAMP-70-10 n° 360), alors même que l’opération n’a aucune conséquence juridique et qu’il convient alors d’appliquer le régime des cessations d'entreprise (en matière d’impôts directs).

En conséquence, les plus-values latentes sur les éléments inscrits à l'actif de l'exploitation individuelle sont imposables.

Afin d’éviter que l’option n’entraîne l’imposition immédiate des plus-values latentes constatées par l’exploitant, l’administration admet toutefois l’application du régime spécial prévu à l’article 151 octies du CGI en cas d'apport d'une entreprise individuelle à une EURL, ce qui permet le report d’imposition au nom de l’apporteur des plus-values constatées sur les immobilisations non amortissables jusqu’à la cession ultérieure des éléments concernés, et l’imposition échelonnée au nom de la société bénéficiaire de l’apport des plus-values sur immobilisations amortissables (BOI-BIC-CHAMP-70-10 n° 440 ; voir Mémento Comptable n° 60261).

Si l’exploitant ne souhaite pas appliquer ce régime, il peut bénéficier de l’exonération ou de l’abattement en fonction du montant des recettes prévus à l’article 151 septies du CGI (Mémento Fiscal nos 18200 s.) ou de l’abattement sur les plus-values immobilières prévu à l’article 151 septies B du CGI (Mémento Fiscal nos 18095 s.).

Ce régime de taxation ne concerne pas le transfert de biens du patrimoine personnel vers le patrimoine professionnel de l’entreprise assimilée à une EURL (BOI-BIC-CHAMP-70-10 n° 450). Ceux-ci constituent un apport et sont comptabilisés à leur valeur réelle au jour de l'opération, sans que cela entraîne la taxation immédiate d’une plus-value (CE 18-11-1991 nos 92600 et 92712). Lors de leur cession ultérieure, il conviendra, le cas échéant, de constater deux plus-values distinctes (une plus-value privée et une plus-value professionnelle), suivant le régime des « biens migrants » prévu à l’article 151 sexies du CGI (voir Mémento Fiscal n° 18470).

… ce qui nécessite d’établir un bilan de clôture faisant ressortir les plus-values latentes sur les éléments d’actif

En l’absence de dissolution juridique de l’entreprise, aucun bilan de liquidation n’est à établir. En revanche, afin que les exploitants soient en mesure de satisfaire leurs obligations fiscales (voir ci-avant), le Conseil national de l’Ordre des experts-comptables (CNOEC) préconise d’établir (Avis CNOEC 2023-07 du 2-2-2023) :

  • un bilan de clôture permettant la constatation de l’apport à la nouvelle entité (créée sur le plan fiscal), à leur valeur réelle, des éléments inscrits à l’actif de l’exploitation individuelle et la constatation des plus ou moins-values imposables. L’écriture consiste à sortir les éléments d’actifs et de passifs (immobilisations, stocks, créances, fonds commercial, dettes…) et à constater les plus-values en résultat, par la contrepartie du compte 101 « Capital individuel » ;

  • un bilan d’ouverture reprenant les valeurs réelles des éléments apportés à cette date à la nouvelle entité (création « fiscale » de l’entreprise individuelle assimilée à une EURL), en contrepartie du compte 101 « Capital individuel – Apport EI IR » (les plus-values étant comptabilisées dans des sous-comptes dédiés du compte 101).

Ces valeurs constituent la nouvelle base amortissable des immobilisations, pour lesquelles un nouveau plan d’amortissement est établi.

Pour un exemple d’application, voir l’Avis CNOEC 2023-07 précité.

En pratique, le CNOEC recommande la création d’un nouveau dossier dans le logiciel comptable pour l’entreprise individuelle soumise à l’IS.

Les écritures comptables matérialisent la rémunération de l’entrepreneur individuel

Lorsque l’exploitant a opté pour son assimilation à une EURL soumise à l’IS :

  • la rémunération qu’il perçoit de l’entreprise soumise à l’IS est déductible de son résultat imposable, dès lors qu’elle correspond à un travail effectif (CGI art. 211) ;

  • elle est assujettie aux cotisations sociales (voir Mémento Social n° 80180) ;

  • et soumise à l’IR dans la catégorie des revenus de gérants majoritaires (CGI art. 62), et peut ainsi bénéficier de l’abattement forfaitaire pour frais professionnels de 10 %.

Les documents comptables devant permettre d’identifier la rémunération de l’exploitant individuel (C. com. art. R 526-26), le CNOEC précise que la rémunération est alors enregistrée :

  • dans le compte 644 « Rémunération du travail de l’exploitant » ;

  • avec pour contrepartie le compte 512 « Banque » ou le compte 108 « Compte de l’exploitant » (de manière périodique ou annuelle).

A noter :

Le compte 108 doit être soldé en fin d’exercice par virement au compte 101 « Capital individuel ». L’absence de versement de la rémunération revient donc à réaliser un apport. Le CNOEC préconise l'utilisation du sous-compte 101108 « Capital individuel – Opérations de l'exploitant », notamment pour le distinguer des bénéfices réalisés (voir ci-après le régime fiscal des sommes distribuées).

L’entreprise indique, en annexe des comptes annuels ou dans une note complémentaire au compte de résultat, le montant de la rémunération de l’exploitant, son mode de calcul et le montant du résultat comptable avant déduction de cette rémunération (Avis CNOEC précité).

Lorsque l’exploitant n’a pas opté pour son assimilation à une EURL soumise à l’IS, le bénéfice rémunère à la fois le travail de l’exploitant et les capitaux engagés dans l'affaire. La rémunération n’a donc pas à être comptabilisée parmi les charges et n’est pas déductible des bénéfices imposables (BOI-BIC-CHG-40-50-10 no 1 ; CE 26-1-1923 no 73330 ; voir Mémento Comptable n° 16690). Elle peut néanmoins être comptabilisée parmi les charges d’exploitation pour des raisons de gestion, mais, dans ce cas, elle doit être annulée par le crédit du compte 797 « Transfert de charges exceptionnelles » (Bull. CNC n° 73, 4e trimestre 1987, p. 3). La rémunération reste ainsi comprise dans le résultat et sera donc imposée au nom de l’exploitant dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, comme l’intégralité du bénéfice.

Les écritures comptables doivent assurer le suivi de l’affectation du résultat de l’exploitant soumis à l’IS

Affectation des bénéfices

À la réouverture des comptes, le PCG prescrit de virer le résultat de l'exercice précédent du compte 12 « Résultat de l'exercice » au compte 101 « Capital individuel » (PCG art. 941-10).

Toutefois, lorsque l’exploitant a opté pour son assimilation à une EURL soumise à l’IS, et afin de permettre un suivi des bénéfices non distribués, nécessaire pour l’application du régime fiscal des distributions et des autres retraits (voir ci-après), le CNOEC préconise d’utiliser un sous-compte 101110 intitulé « Capital individuel – Bénéfice reporté à nouveau ». Les bénéfices que l’exploitant entend conserver dans l’exploitation pourront être maintenus à ce compte.

En cas de perte réalisée au cours de l’exercice, celle-ci est virée au débit du sous-compte 101119 « Capital individuel – Perte reportée à nouveau ». Elle peut aussi être affectée au débit du sous-compte 101110 « Capital individuel – Bénéfice reporté à nouveau » jusqu’à apurement de celui-ci, puis au débit du sous-compte 101119 pour le solde (Avis CNOEC précité).

Distribution des bénéfices

Dès lors qu’aucune obligation juridique ou délibération n’est exigée pour justifier la distribution du résultat de l’exercice précédent ou des bénéfices des exercices antérieurs reportés à nouveau, ce sont les écritures comptables qui doivent attester l’existence d’une distribution.

Lorsque l’exploitant a opté pour son assimilation à une EURL soumise à l’IS, le CNOEC préconise le schéma d’écriture suivant afin de matérialiser les prélèvements effectués par l’exploitant qui sont soumis au régime fiscal des distributions (voir ci-après) :

  • débit du sous-compte 101110 « Capital individuel – Bénéfice reporté à nouveau » ;

  • par le crédit des comptes 4421 « Prélèvement à la source » (pour l’IR), 4423 « Retenues et prélèvements sur les distributions » (pour les prélèvements sociaux) et 512 « Banque » ou 108 « Compte de l’exploitant » (pour le solde).

En l’absence de personnalité juridique de l’entreprise individuelle, le compte 457 « Associés – Dividendes à payer », qui est un compte de tiers, ne doit pas être utilisé (Avis CNOEC précité).

Régime fiscal des sommes distribuées

Lorsque l’exploitant a opté pour son assimilation à une EURL soumise à l’IS, les prélèvements effectués sur les bénéfices sont soumis au régime fiscal des revenus distribués et supportent donc le prélèvement forfaitaire unique, consistant en une imposition forfaitaire à l’IR, à laquelle s’ajoutent des prélèvements sociaux (CGI art. 200 A ; voir Mémento Fiscal nos 24170 s.). Cette règle peut s’appliquer, y compris aux résultats réalisés par l’exploitant antérieurement à l’exercice de l’option pour l’IS. Dans certains cas, ces distributions seront également soumises aux cotisations sociales (voir Mémento Social n° 80180).

En revanche, aucune imposition n’est due si les sommes distribuées ont la nature de remboursement d’apport. En effet, l’administration accepte d’appliquer à la situation particulière des entreprises individuelles soumises à l’IS la règle prévue à l’article 112 du CGI, suivant laquelle les remboursements d’apport ne sont pas soumis au régime des revenus distribués, si tous les bénéfices et les réserves autres que la réserve légale ont été auparavant répartis (BOI-BIC-CHAMP-70-10 n° 500).

C’est pourquoi le CNOEC a préconisé :

  • la comptabiisation des bénéfices reportés dans un sous-compte dédié 101110 (voir ci-avant) ;

  • la comptabilisation des apports et retraits de l’exploitant dans un sous-compte dédié 101108 (voir ci-après).

Régime fiscal des retraits de l’exploitant

Les apports ou les retraits personnels de l’exploitant et, le cas échéant, de sa famille sont enregistrés en cours d’exercice au compte 108 « Compte de l’exploitant ». Puis le solde du compte 108 est viré, en fin d'exercice, au compte 101.

Fiscalement :

les retraits sont en principe considérés comme des revenus distribués soumis au prélèvement forfaitaire prévu à l’article 200 A du CGI (voir ci-avant). Toutefois, comme indiqué plus haut, l’administration admet de ne pas soumettre les remboursements d’apport au régime des revenus distribués à certaines conditions (si tous les bénéfices antérieurs ont été distribués).

Le CNOEC préconise l'utilisation du compte 101108 « Capital individuel – Opérations de l'exploitant », afin de faciliter l’application du correct régime fiscal aux retraits opérés par l’exploitant et sa famille.

A noter :

La situation débitrice du compte 101108 à la date de clôture de l’exercice peut être réputée constituer un revenu distribué sur le plan fiscal.

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