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Le refus des congés de paternité et de naissance du salarié supposé polygame est discriminatoire

L’employeur se rend coupable de discrimination en refusant d’octroyer un second congé de paternité et un second congé de naissance à un salarié deux mois après le bénéfice de tels congés dans le cadre d’une première naissance, en raison de la supposée polygamie de l'intéressé.

CA Toulouse 16-12-2022 n° 21/01896, Sté Trans Occitan c/ K


Par Yves DUFOUR
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©Gettyimages

Le principe général d’interdiction des discriminations est régi par les articles L 1132-1 et suivants du Code du travail qui prévoient, notamment, qu’aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, en raison de divers motifs interdits parmi lesquels figure la situation de famille.

L’arrêt rendu par la cour d’appel de Toulouse le 16 décembre 2022 constitue une illustration originale de ce principe, tout en apportant des éléments utiles concernant les conditions d’octroi du droit au congé de paternité et au congé de naissance.

Deux demandes de congés de paternité et de naissance à 3 mois d’intervalle

L’affaire concerne un salarié embauché en qualité de chauffeur super poids lourd ayant été convoqué par son employeur à un entretien préalable à l'issue duquel il lui a été notifié sa mise à pied à titre conservatoire puis son licenciement pour faute grave. Le salarié a alors saisi le conseil de prud'hommes aux fins de contester les conditions d'exécution et de rupture de sa relation de travail, et voir condamner la société au paiement de diverses sommes.

Le litige entre les parties reposait, notamment, sur un désaccord né entre l’employeur et le salarié à l’occasion de la demande faite par ce dernier de bénéficier d’un second congé de paternité et d’un second congé de naissance au mois de décembre au titre de la naissance de son deuxième enfant intervenue en novembre, après avoir déjà bénéficié de tels congés en septembre pour la naissance d’un premier enfant en août de la même année.

A ce titre, le salarié soutenait avoir été victime d’une discrimination, l’employeur ayant refusé la seconde demande de congés en émettant un jugement de valeur sur sa vie familiale. Ainsi, parmi les pièces produites par le salarié, figurait le compte-rendu de l’entretien préalable au licenciement, au cours duquel l’employeur avait justifié son refus en estimant que la polygamie n'existait pas en France.

A noter :

Rappelons qu’en matière de discrimination, l’article L 1132-1 du Code du travail met en place un régime probatoire spécifique qui impose au salarié concerné de présenter au juge des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte. Il incombe ensuite à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Un refus de l’employeur en raison d’une situation familiale jugée contraire à la morale

En l’espèce, les juges du fond ont d’abord retenu comme établis le refus de congé paternité et de naissance en raison de la situation familiale du salarié, ainsi que le bref délai qui lui a été laissé pour se positionner sur une proposition de rupture conventionnelle, et la mise en congés imposés par l'employeur sans délai de prévenance à compter du 16 janvier 2018. Ils ont estimé, par ailleurs, que ces éléments, pris dans leur ensemble, laissaient supposer l'existence d'une discrimination.

Après avoir écarté, comme étant des arguments nouveaux développés en appel, les éléments liés à l’absence de justification par le salarié de la paternité du second enfant et ceux relatifs au respect du délai de prévenance d’un mois pour formuler sa demande de congés, ils ont constaté que la société justifiait dans ses écritures son refus d’octroyer lesdits congés en raison d'une situation familiale de l'intéressé qu'elle estimait non conforme à la morale.

En conséquence, la cour d’appel juge que le refus des congés de paternité de naissance par l'employeur, ainsi que la mise en congés payés imposés sans motif de prévenance, reposent non sur des considérations objectives mais sur un motif discriminatoire.

Au regard des règles d’octroi du congé de paternité, les juges du fond rappellent à l’occasion de ce litige que les textes relatifs aux congés de naissance et de paternité, dans leur rédaction en vigueur à la date du litige, n'exigent nullement une communauté de vie permanente du père avec la mère de l'enfant.

A noter :

Dans l’hypothèse où l’affaire serait portée devant elle et en considération des faits d’espèce peu communs il serait intéressant de connaître la position de la Cour de cassation sur la question des conditions d’octroi des congés paternité et naissance.

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© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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