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Appréciation du caractère distinctif d'une marque de position

Pour apprécier le caractère distinctif d'une marque se caractérisant par la façon spécifique dont elle est placée ou apposée sur le produit (marque de position), il n'y a pas lieu de vérifier si le signe diverge de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur économique concerné. 

CJUE 8-10-2020 aff. 456/19


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Ne peuvent pas être protégés comme marque les signes qui n’ont pas de caractère distinctif (Dir. 2015/2436 du 16-12-2015 ; auparavant Dir. 2008/95 du 22-10-2008 art. 2 ; CPI art. L 711-2, 2o).

Pour désigner les services fournis à l'aide de véhicule et les services de transport, une entreprise de transport suédoise demande l'enregistrement à titre de marque de signes qui se composent d'ellipses de dimensions différentes et de couleurs rouge, orange et blanche, avec une taille déterminée et placées dans une certaine position sur ses autobus. La demande d'enregistrement est accompagnée d'images, faisant apparaître le contour des véhicules en pointillé, afin de mettre en évidence le fait que la protection ne concerne pas la forme de ces véhicules.

Sa demande est rejetée par l'office de la propriété intellectuelle suédois pour absence de caractère distinctif des signes litigieux. L'entreprise de transport faisait valoir que le caractère distinctif de ces signes ne devrait pas être apprécié différemment d'un autre signe figuratif au seul motif qu'ils ont vocation à être placés d'une manière déterminée sur les véhicules de transport, les différentes sociétés de transport apposant leur propre graphisme ou coloration sur leurs véhicules de sorte que les utilisateurs des services qu'elles fournissent les considèrent comme étant des indicateurs de l'origine commerciale. Pour l'office, au contraire, les consommateurs devraient s'être familiarisés avec de tels éléments pour considérer qu'il s'agit d'une marque, faute de quoi ils les considéreraient comme des éléments décoratifs ; compte tenu de la diversité dans la coloration et la décoration des véhicules utilisés dans le secteur économique concerné, les signes en cause ne pourraient être perçus comme une indication de l'origine commerciale qu'en divergeant suffisamment de la norme ou des habitudes du secteur, ce qui ne serait pas le cas ici. 

Saisi du litige, le juge suédois pose à la Cour de justice de l'Union européenne la question suivante : le caractère distinctif d'un signe dont l'enregistrement est demandé en tant que marque pour un service, qui est composé de motifs destinés à être apposés exclusivement et systématiquement d'une manière déterminée sur une grande partie des biens utilisés pour la fourniture du service, doit-il être apprécié en relation avec ces biens, et en examinant si ce signe diverge de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur économique concerné ?

La CJUE y répond de la manière suivante. 

Lorsque la demande de marque concerne un signe destiné à être apposé exclusivement et systématiquement d'une manière déterminée sur une grande partie des biens utilisés pour exécuter la prestation de services, le caractère distinctif ne saurait s'apprécier indépendamment de la perception qu'a le public pertinent de l'apposition de ce signe sur ces biens. En effet, même si les biens qui servent à l'exécution de la prestation de services ne font pas l'objet de la demande de marque, le public pertinent perçoit les motifs composant le signe considéré comme étant apposés sur les biens qui leur servent de support exclusif. Il appartient ainsi à la juridiction de renvoi de vérifier si les combinaisons de couleurs comportant un agencement systématique, telles qu'indiquées dans les demandes d'enregistrement, sont susceptibles de conférer à ces signes un caractère distinctif intrinsèque, condition qui sera considérée comme remplie si les signes en question permettent au consommateur moyen de distinguer les services de transport fournis par cette entreprise des services fournis par d'autres entreprises. 

Dans le cadre de cette analyse, précise ensuite la Cour de justice, il n'y a pas lieu d'examiner si les signes dont l'enregistrement est demandé divergent de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur économique concerné, ce critère s'appliquant dans les cas suivants : lorsque le signe est constitué par l'apparence du produit pour lequel l'enregistrement en tant que marque est demandé, le consommateur moyen n'ayant pas pour habitude de présumer l'origine des produits en se fondant en l'absence de tout élément graphique ou textuel, sur leur forme ou celle de leur emballage (CJUE 29-4-2004 aff. 456/01) ; lorsque le signe est constitué de la représentation de l'aménagement de l'espace physique dans lequel sont fournis les services désignés par la marque demandée (en l'occurrence Apple : CJUE 10-7-2014 aff. 421/13 : RJDA 11/14 n° 872). 

En l'espèce, si les véhicules utilisés pour la fourniture des services de transport figurent en pointillé dans les demandes d'enregistrement, aux fins d'indiquer tant les endroits où les marques sont destinées à être apposées que les contours de celles-ci, ces marques ne se confondent pas pour autant avec la forme ou l'emballage de ces biens ni n'ont pour objet de représenter l'espace physique dans lequel sont fournis les services.  

A noter : La marque de position se caractérise par la façon spécifique dont elle est placée ou apposée sur le produit. Elle doit être représentée par une reproduction (format JPEG, d’après le formulaire de l’Inpi) identifiant dûment la position de la marque et sa taille ou proportion par rapport aux produits concernés, les éléments ne faisant pas l’objet de l’enregistrement étant visuellement ignorés (par exemple, et de préférence, par la présence de lignes discontinues ou pointillées). La représentation peut être accompagnée d’une description précisant la façon dont le signe est apposé sur les produits. 

La CJUE précise ici les critères à prendre en compte pour apprécier le caractère distinctif d'une telle marque. Notamment, elle exclut l'application du critère dégagé pour certains types de signes dont le caractère distinctif est apprécié de manière restrictive par les tribunaux (marque constituée par la forme du produit, par exemple), justifiant la mise en œuvre d'un critère supplémentaire

Maya VANDEVELDE

Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Droit commercial n° 32416

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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