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Accueil/ Actualités - La Quotidienne/ Affaires/ Crédit à un consommateur

Le taux d’intérêt d’un prêt peut être calculé sur 360 jours si le calcul favorise le consommateur

La nullité de la clause d’un prêt immobilier consenti à un consommateur prévoyant le calcul du taux d’intérêt sur 360 jours, et non sur la base de l’année civile, n’est pas encourue si ce calcul a pour effet de minorer les intérêts.

Cass. 1e civ. 4-7-2019 n°17-27.621 FS-PB


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Des époux ayant souscrit un prêt immobilier auprès d’une banque demandent l’annulation de la clause prévoyant l’intérêt conventionnel du prêt car le taux d’intérêt a été calculé par la banque sur la base d’une année de 360 jours et non de 365 (ou 366) jours.

Leur demande est rejetée : il résultait du rapport d’expertise amiable produit par les emprunteurs que le calcul des intérêts conventionnels, sur la base non pas de l’année civile mais de celle d’une année de 360 jours, avait eu pour effet de minorer le montant de ces intérêts, de sorte que l’application de la clause litigieuse ne venait pas à leur détriment.

A noter : 1. Précision inédite.

Jusqu’alors, la Cour de cassation avait posé pour principe que le taux de l'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l'acte de prêt consenti à un consommateur ou un non-professionnel doit, comme le taux effectif global (TEG), être calculé sur la base de l'année civile (365 jours ou 366 jours pour les années bissextiles) et non, en appliquant la « méthode lombarde », sur une année de 360 jours, sous peine de se voir substituer l'intérêt légal (Cass. 1e civ. 19-6-2013 n° 12-16.651 FS-PBI : RJDA 12/13 n° 1045 ; Cass. 1e civ. 17-6-2015 n° 14-14.326 F-PB : RJDA 12/15 n° 857).

On aurait pu déduire de ces arrêts que la substitution du taux légal s’imposait en cas de recours à la méthode lombarde. La décision commentée dément cette conclusion. Encore faut-il que l’erreur de calcul ait causé un préjudice à l’emprunteur, c’est-à-dire que le calcul sur une année de 360 jours ait abouti à produire un intérêt supérieur à celui qui aurait été obtenu par un calcul sur 365 ou 366 jours. La seule référence à une année de 360 jours n’entraîne donc pas automatiquement la nullité de la convention d’intérêts et l’application du taux légal.

La solution s’inscrit le droit-fil de la jurisprudence qui refuse l’annulation d’une convention d’intérêts si l’emprunteur ne subit pas de préjudice en cas de défaut de mention du TEG ou d’indication d’un TEG erroné (en dernier lieu, Cass. 1e civ. 12-10-2016 n° 15-25.034 F-PB : RJDA 2/17 n° 109) ou en cas d’écart entre le taux mentionné dans le prêt et le taux réel avancé par l’emprunteur inférieur à la décimale prescrite par l’article R 314-2 du Code de la consommation (Cass. com. 18-5-2017 n° 16-11.147 F-PBI : RJDA 12/17 n° 833 ; Cass. 1e civ. 5-7-2017 n° 16-21.075 F-D : RJDA 1/18 n° 56).

2. Ce litige confirme la complexité du calcul du taux d’intérêt. Au cas particulier, les emprunteurs – auxquels il incombe de prouver que le taux est irrégulièrement calculé (Cass. com. 4-7-2018 n° 17-10.349 F-PB : BRDA 19/18 inf. 13) – avaient eu recours à une expertise amiable et faisaient valoir qu’elle concluait à un différentiel de 9 centimes à leur détriment. Mais les juges du fond avaient estimé au contraire, leur appréciation étant souveraine, que le rapport de l’expert avait conclu à un écart qui était favorable aux emprunteurs.

Il apparaît par ailleurs que, malgré les apparences, l’application de la méthode lombarde n’est pas nécessairement préjudiciable à l’emprunteur (dans la mesure où les intérêts sont finalement généralement calculés échéance par échéance).

L’ordonnance 2019-740 du 17 juillet 2019 (JO 18 texte n° 23), prise sur habilitation donnée au Gouvernement par la loi 2018-727 du 10 août 2018 (BRDA 17/18 inf. 13) va dans le même sens : elle prévoit, qu’il s’agisse d'un contrat de crédit à la consommation ou d'un contrat de crédit immobilier une formulation unique des sanctions civiles applicables en cas d'erreur ou de défaut de TEG et accorde au juge la faculté de prendre en compte le préjudice subi par l'emprunteur pour déterminer le niveau de la sanction. Cette ordonnance sera commentée dans un prochain BRDA.

3. La solution est différente pour les prêts consentis à un professionnel : si le TEG doit, pour ces prêts aussi, être calculé sur l'année civile, rien n'interdit aux parties de retenir une autre base de calcul pour le taux d'intérêt conventionnel (Cass. com. 24-3-2009 n° 08-12.530 FS-PB : Bull. civ. IV n° 44 ; Cass. 1e civ. 6-9-2017 n° 16-19.063 F-D : BRDA 19/17 inf. 14), et d'appliquer la méthode lombarde.

Le contentieux du calcul du TEG sur l’année civile est appelé à disparaître partiellement pour les crédits aux entreprises : le Gouvernement a été autorisé à supprimer par ordonnance prise avant le 10 août 2019 la mention obligatoire du TEG pour les crédits aux entreprises (sauf ceux à taux fixe), lorsque cette mention est inappropriée à ces crédits (Loi 2018-727 du 10-8-2018 art. 55, I : BRDA 17/18 inf. 13). À ce jour,  l’ordonnance n’a pas encore été publiée.

Sophie CLAUDE-FENDT

Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Concurrence Consommation n° 89290 et Mémento Droit commercial nos 40581 et 41033

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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