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Compensation entre créances connexes. Illustration

La créance liée aux livraisons faites à une entreprise avant sa mise en procédure collective et la créance postérieure que celle-ci détient sur son fournisseur au titre d’un dépôt de garantie sont connexes et compensables si elles résultent d’un même ensemble contractuel.

CA Paris 18-9-2018 n° 17/01028, ch. 5-8 ; CA Paris 18-9-2018 n° 17/01011, ch. 5-8


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Le jugement qui ouvre une procédure collective emporte de plein droit interdiction de payer toute créance née avant le jugement d’ouverture mais le paiement par compensation entre créances connexes demeure possible (C. com. art. L 622-7).

Après la mise en redressement puis en liquidation judiciaires d’une société qui commercialise des livres dans le cadre de partenariats avec plusieurs distributeurs, le liquidateur judiciaire réclame à deux de ces derniers la restitution du dépôt de garantie que la société leur a versé pendant la période d’observation du redressement judiciaire. Les distributeurs invoquent alors la compensation entre ce dépôt et les créances qu’ils détiennent sur la société au titre d’opérations antérieures à la procédure collective. Le liquidateur judiciaire conteste l’existence d’une connexité entre les créances invoquées : la mise en place du dépôt de garantie avait pour seul objet de garantir les commandes passées pendant la période d’observation ; les créances ne résultent pas d’un ensemble contractuel unique dès lors que les contrats successifs d’achat de marchandises qui ont fait naître la créance antérieure de chacun des distributeurs ont été conclus et exécutés à une date où le dépôt de garantie n’existait pas.

Par deux décisions, la cour d’appel de Paris écarte le raisonnement du liquidateur. Les créances réciproques sont considérées comme connexes lorsqu’elles sont issues ou dérivent de l’exécution ou de l’inexécution du même contrat mais également lorsqu’elles se rattachent à un contrat-cadre ou à plusieurs conventions, même informelles, constituant les éléments d’un ensemble contractuel unique servant de cadre général aux relations entre les parties. Dans les deux affaires, les parties avaient entretenu pendant de nombreuses années des relations commerciales suivies : dans un cas (n° 17/01011), les parties avaient conclu, après l’ouverture de la procédure collective, un contrat-cadre régissant leurs relations commerciales ; dans l’autre (n° 17/01028), un tel contrat préexistait à la procédure collective et l’administrateur avait entendu le poursuivre ; c’était dans ce contexte qu’un dépôt de garantie avait été mis en place par la société au profit de chacun des distributeurs pendant la période d’observation ; les relations entre les parties étaient donc toujours en cours au jour du jugement d’ouverture et les conventions initiales s’étaient poursuivies, de sorte que les créances réciproques des parties s’inscrivaient dans un ensemble contractuel unique caractérisant la connexité de ces créances.

Par suite, la cour d’appel a prononcé la compensation demandée et, la créance de chaque distributeur (environ un million d’euros pour l’un et plus de deux millions pour l’autre) étant supérieure à celle de la société au titre du dépôt de garantie (60 000 ou 70 000 € selon le distributeur), elle a refusé de condamner les distributeurs à restituer le dépôt.

A noter : la cour d’appel de Paris fait ici application d’une jurisprudence constante relative à la caractérisation de la connexité exigée par l’article L 622-7 du Code de commerce. Pour être connexes, les créances doivent soit dériver d’un même contrat soit d'un ensemble contractuel unique servant de cadre général aux relations entre les parties (Cass. com. 5-4-1994 n° 92-13.989 P : RJDA 10/94 n° 1070 ; Cass. com. 14-10-2014 n° 13-24.482 FS-D : RJDA 12/14 n° 936).

La compensation pour connexité peut intervenir entre une créance née avant le jugement d’ouverture et une créance née après à l’occasion de la poursuite de l’activité autorisée par le tribunal (Cass. com. 19-3-1991 n° 89-17.083 P : RJDA 7/91 n° 638 ; Cass. com. 7-3-2006 n° 04-18.128 F-D : RJDA 7/06 n° 805). Cette compensation n’est toutefois possible que si le créancier a régulièrement déclaré sa créance antérieure entre les mains du mandataire ou du liquidateur judiciaire (notamment, Cass. com. 3-5-2011 n° 10-16.758 FS-PBRI : RJDA 8-9/11 n° 719). Dans les affaires commentées, les distributeurs avaient déclaré leurs créances qui avaient été admises au passif de la société débitrice.

Pour en savoir plus : voir Mémento Droit commercial nos 61656 et 52936

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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