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Une convention de garantie de passif interprétée en faveur du cédant

Une clause de garantie de passif impose à l'acquéreur des parts sociales d'informer le cédant de tout passif nouveau ; une autre impose cette information en l'assortissant d'un délai et d'une sanction. Cette dernière, spéciale par rapport à la première, doit s'appliquer.

CA Aix-en-Provence 6-7-2017 n° 14/14154


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L'article 3 d'une convention de garantie de passif conclue à l'occasion d'une cession de parts sociales est intitulé « conditions de mise en œuvre » et prévoit que l'acquéreur s'engage à informer « sans délai » les cédants par lettre recommandée AR de tout événement susceptible d'entraîner l'application de la garantie, de sorte que ceux-ci puissent faire valoir leur opinion. L'article 5, intitulé « information des cédants », précise que l'acquéreur s'engage à informer les cédants « dans un délai de 15 jours » par lettre recommandée AR de tout événement susceptible de révéler un passif « à peine de déchéance » de la garantie.

L'acquéreur informe les cédants de l'apparition d'un passif sans respecter le délai de 15 jours mais il demande l'application de la garantie en faisant valoir que les deux clauses sont contradictoires et que, dans le doute, la convention doit s'interpréter en faveur de celui qui a contracté l'obligation d'information, si bien que le non-respect du délai ne doit pas entraîner la déchéance de la garantie.

La cour d'appel d'Aix-en-Provence écarte cette argumentation. Les deux clauses se contredisent (la première ne stipulant ni délai ni sanction, tandis que la seconde prévoit un délai de 15 jours et la sanction de son non-respect), ce qui rend nécessaire leur interprétation :

- l'article 3 constitue un énoncé général dont l'article 5 précise les modalités, ce qui, en application de l'adage « speciala generalibus derogant » (la règle spéciale déroge aux règles générales), conduit à faire primer les dispositions particulières de l'article 5 sur celles, plus générales, de l'article 3 ; en outre, cette interprétation apparaît conforme à l'économie d'une garantie de passif, qui est de permettre le règlement des difficultés au fur et à mesure de leur révélation, la garantie n'ayant pas vocation à perdurer selon le bon vouloir de l'acquéreur ;

- il convient bien d'appliquer la méthode d'interprétation du Code civil selon laquelle, dans le doute, le contrat s'interprète contre le créancier et en faveur du débiteur (art. 1190 issu de ord. 10-2-2016, ex-art. 1162) mais, au cas particulier, cela conduit à interpréter la convention en faveur du débiteur de la garantie de passif (et non de l'obligation d'information), à savoir les cédants.

A noter : la primauté de la règle spéciale sur les règles générales est un principe d'application constante. Par exemple, dans un cas où une clause statutaire prévoyait dans un premier paragraphe que, « en cas de pluralité des associés, toutes les contestations qui pourraient surgir entre associés (...) relativement aux affaires sociales ou à l'exécution des présents statuts seront soumises aux tribunaux compétents » et, dans un second paragraphe, que les mêmes contestations étaient soumises à une procédure d'arbitrage sans que soit visé le cas d'une pluralité d'associés, ce second paragraphe a été jugé applicable à un litige entre associés, le premier ne faisant que rappeler le droit commun en matière de compétence judiciaire (CA Paris 25-2-2016 n° 15/17043 : RJDA 6/16 n° 494).

Dans l'affaire ci-dessus, l'application de l'article 5 était favorable aux cédants puisqu'il précisait la sanction du non-respect du délai d'information. Si l'article 3 avait été reconnu applicable, la déchéance n'aurait pas joué de plein droit. En effet, à défaut de précision sur la sanction de l'obligation d'information dans la clause, les juges apprécient souverainement si l'inexécution de cette obligation entraîne la déchéance de la garantie (pour un exemple, Cass. com. 25-1-2017 n° 15-17.137 F-D : BRDA 5/17 inf. 4).

Cette affaire souligne l'intérêt pour les parties de rédiger avec soin la convention de garantie pour éviter les clauses contradictoires et les incertitudes liées à leur interprétation.

Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Sociétés commerciales n° 17875

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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