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Publicité comparative : le goût n’est pas un critère de comparaison objectif

Le goût étant par nature personnel et variable, il ne peut pas être utilisé comme critère de comparaison dans une publicité comparative.

CA Paris 31-1-2020 n° 18/01091


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1. Un distributeur « hard discount » engage une campagne publicitaire comparant ses produits à ceux vendus sous une marque de fabricant; les spots – films ou messages radio – se terminent par l’avis suivant, après dégustation des produits mis en comparaison : « Deux J’aime, mais pas au même prix ». La publicité fait l’objet d’un avis positif de l’autorité de régulation professionnelle de publicité et la comparaison des prix des produits, mise en avant dans la publicité, est confiée à un organisme indépendant du distributeur.

2. Estimant que ces spots sont constitutifs de publicité comparative illicite, une association représentant les fabricants des produits comparés agit en réparation. La cour d’appel de Paris lui donne raison et accueille partiellement sa demande.

3. La publicité comparative est licite si les conditions suivantes sont réunies (C. consom. art. L 122-1 ) : 1° Elle n'est pas trompeuse ou de nature à induire en erreur ; 2° Elle porte sur des biens ou services répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif ; 3° Elle compare objectivement une ou plusieurs caractéristiques essentielles, pertinentes, vérifiables et représentatives de ces biens ou services, dont le prix peut faire partie.

En l’espèce, seules les deux dernières conditions étaient discutées par les parties.

Les produits comparés répondent à la condition d'interchangeabilité du point de vue des consommateurs…

4. Pour faire l’objet d’une publicité comparative licite, les produits comparés doivent d’abord répondre à des besoins ou à un objectif identique, c’est-à-dire qu’ils doivent présenter un caractère d’interchangeabilité, de substituabilité suffisant, du point de vue du consommateur (voir par exemple, CJCE 19-9-2006 aff. 356/04 : RJDA 12/06 n° 1277).

5. La cour d’appel juge cette condition remplie, dès lors que les produits en cause (par exemple, les céréales au chocolat, le sirop de grenadine ou les crêpes fourrées) sont de nature alimentaire, même s'ils diffèrent quant à leur comestibilité, leurs conditions de fabrication, leur composition et la fiche nutritionnelle (ces éléments étant affichés sur le site internet de la société auquel renvoyaient les publicités), et l'identité de leur fabricant.

… mais la condition d’objectivité de la comparaison fait défaut

6. La cour juge cependant la publicité illicite faute de comparer objectivement des caractéristiques essentielles, pertinentes, vérifiables et représentatives des produits comparés, c’est-à-dire, notamment, leur composition, l’identité du fournisseur ou les prix.

7. L’annonceur soutenait que la comparaison portait exclusivement sur le prix, et était donc objective, en faisant valoir que le fait de porter une appréciation identique entre les produits montrés, lesquels bénéficiaient tous de la même mention « J’aime », n’établirait pas de hiérarchie entre les produits, donc de comparaison.

La cour écarte cet argument : au contraire, en utilisant l'interjection « J'aime ! » après la dégustation de chacun des produits en comparaison, qui ne constitue pas un simple constat mais une appréciation du plaisir culinaire que procure la dégustation de ces produits à l'acteur figurant dans le spot publicitaire, la société introduit comme critère de comparaison des produits non seulement le prix mais également le goût. Le goût étant par nature personnel et variable selon les habitudes alimentaires et la sensibilité de chacun, la comparaison porte ainsi sur un élément subjectif invérifiable par le consommateur.

Sanctions

8. La publicité comparative illicite engage la responsabilité extracontractuelle de l’annonceur dans les conditions prévues par l’article 1240 du Code civil. Le demandeur n’a en principe pas à prouver l’existence de son préjudice, celui-ci résultant nécessairement de la faute commise (Cass. com. 14-6-2000 : RJDA 12/00 n° 1184).

En l’espèce, l’association représentant les fabricants ne sollicitait que le versement d’un euro symbolique. La cour d’appel fait droit à sa demande.

9. Elle rejette en revanche la demande de condamnation de la société non seulement à cesser toute diffusion des films et messages radio issus des spots litigieux mais également à développer tout nouveau film ou message radio ou support de publicité similaire reprenant le concept des spots litigieux. En effet, la demande n'était pas suffisamment détaillée, l’association n’ayant pas énuméré les spots litigieux, et elle était imprécise et trop large dans sa formulation.

La cour rejette également la demande de publication du dispositif de sa décision, la jugeant excessive pour sanctionner la seule illicéité des spots litigieux diffusés plusieurs années auparavant.

10. Rappelons que les infractions aux dispositions relatives à la publicité comparative peuvent être pénalement sanctionnées (C. consom. art. L 132-25) : si la publicité comparative est trompeuse, elle pourra être punie des peines prévues en cas de pratiques commerciales trompeuses (C. consom. art. L 132-2 à L 132-9) ; si elle constitue une infraction au droit des marques, elle pourra être punie des peines prévues par les articles L 716-9 et L 716-12 du Code de la propriété intellectuelle.

Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Concurrence consommation n° 59080

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© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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