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Immobilier d’entreprise : à la faveur du Brexit, Paris pourrait reprendre sa place de capitale attractive

Certaines entreprises localisées à Londres rechercheraient des bureaux à Paris pour déplacer leur site d’activité. Tout en restant prudente sur ce point, Maryse Aulagnon, présidente d'Affine, explique comment, dans les prochaines années, Paris pourrait accueillir les déçus de la Grande Bretagne post Brexit.


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Après le Brexit, certaines entreprises pourraient envisager de quitter Londres, pourquoi ?

Maryse Aulagnon : Tout d’abord, vous avez raison d’utiliser le conditionnel ! A ce jour, je n’ai pas d’écho concernant des entreprises qui s’apprêteraient à quitter Londres et pourtant j’interroge systématiquement les courtiers parisiens : il semble qu’ils n’aient pas encore reçu de mandat de recherche de sociétés anglaises. Il y a donc, d’une part, ce que nous aimerions côté français, d’autre part, la réalité.

Ensuite, et pour répondre à votre question, les entreprises basées à Londres pourraient désirer quitter la ville pour rester dans l’espace européen, bien sûr, et ainsi permettre à leurs activités financières de continuer à bénéficier du passeport européen. Toutefois, l’attentisme est de rigueur en raison notamment des incertitudes que suscite actuellement le débat au parlement anglais autour de la mise en œuvre du Brexit. Ceci est normal, un déménagement est extrêmement lourd et onéreux, il expose à la perte de talents et, par conséquent, la décision ne se prend pas dans la précipitation. Reste que l’important, côté français, est d’être prêt à accueillir des entreprises… au cas où !

Paris n’est pas le seul axe de repli possible et d’autres capitales européennes peuvent prétendre accueillir les entreprises qui souhaiteraient partir.

En effet, nous sommes dans un environnement très concurrentiel et le vrai sujet c’est donc Paris comparé à Munich, Bruxelles, Francfort, Luxembourg… Nous avons à Paris un quartier d’affaires, La Défense, qui a de nombreux points communs avec La City et qui pourrait assez naturellement être un point d’atterrissage, au moins pour les grandes entreprises. Il est vrai aussi que les Français seraient heureux de leur « dérouler le tapis rouge » pour reprendre la formule de David Cameron et qu’un tel scénario donnerait un véritable élan au marché immobilier parisien. L’enjeu porte sur des dizaines de milliers de m2.

Quels sont les points noirs qui pourraient jouer contre Paris comparé aux autres capitales ?

Ce n’est pas par chauvinisme mais je n’en vois pas. La Défense offre tout ce qui peut être utile à une grande entreprise en matière de transport et de communication notamment. Même s'il est plus facile de venir de la Gare du Nord que de l’aéroport de Roissy. Un point d’attention toutefois : l’immobilier à La Défense se porte très bien aujourd’hui, le marché est équilibré et il n’y a pas beaucoup de vacance. Si demain on devait libérer 30 000 m2 pour accueillir une entreprise, ce serait difficile. C’est différent dans Paris intramuros. Le Quartier central des affaires (QCA) a lancé beaucoup de chantiers de création et de rénovation de bureaux dans la capitale. Il pourrait par conséquent être offreur mais pour des surfaces moindres, entre 5 000 et 10 000 m2. Pour des offres de 30 000 m2 il faudrait se tourner vers La Défense et là on aurait besoin de deux ou trois ans pour construire et ainsi répondre à la demande. Au regard des incertitudes sur les modalités effectives du Brexit et des délais pour organiser le déménagement d’une entreprise, il n’est pas irréaliste de penser cela possible. En outre, la volonté locale est forte et bien présente, des mesures fiscales attractives ont été prises pour inciter les expatriés à revenir en France, et beaucoup de jeunes financiers travaillant à La City se verraient bien vivre à Paris. Mais une fois encore, c’est une question de séquence, il faut se préparer, on ne construit pas un immeuble de cette taille en blanc et il faut donc être prêt à réagir très vite en cas de demande.

Les pouvoirs publics, aidés des professionnels de l’immobilier, ont-ils pris la mesure de ce possible enjeu ?

Bien sûr ! Fin 2015, un groupe de travail a été créé à l’EPADESA* pour développer l’attractivité internationale de La Défense ainsi qu’un baromètre des quartiers d’affaires internationaux. Tout cela a fonctionné en 2016 avec un petit temps mort durant l’été en raison du changement de gouvernance à l’EPADESA. Les travaux reprennent avec le nouveau président, Jean-Paul Gaillot, en étroite collaboration avec des représentants du secteur de l’immobilier.

Si Paris accueillait de nouvelles entreprises, le risque n’est-il pas de voir le prix des loyers exploser de manière quasi-mécanique ?

Pas nécessairement, parce qu’en ce moment le cœur de Paris est légèrement en suroffre et à des niveaux de loyers extrêmement importants - pour le neuf ou le rénové entre 650 et 800 € le m2 - rien de comparable avec les loyers londoniens mais quand même important ! Donc il y a là un élément régulateur assez naturel.

Si comme Donald Trump l’a annoncé, les Etats-Unis dénoncent prochainement certains accords internationaux, peut-on imaginer que certaines entreprises quittent le continent américain ? Pourquoi pas au bénéfice de Paris ?

De l’avis de la majorité des observateurs politiques, Donald Trump a énoncé quelques mesures éparses, dont effectivement la fin des négociations de l’accord transatlantique, mais pas de véritable programme. Cela viendra probablement début 2017. Les accords en cours seront probablement gelés sinon totalement abandonnés. Une chose est certaine c’est que dans le premier discours prononcé par le nouveau président hier matin, le changement de ton est évident. Le discours vise notamment à rassurer sur le positionnement des Etats-Unis sur la scène internationale. Sur le plan des affaires, je n’imagine donc pas d’entreprises américaines souhaitant se réfugier à Paris ou en Europe pour fuir la politique de Donald Trump, mais c’est une opinion toute personnelle.

Propos recueillis par Laurent MONTANT

*L’EPADESA est un établissement public d’aménagement de La Défense qui conduit l’opération d’intérêt national de La Défense Seine Arche (564 hectares). Sa mission consiste dans la mise en œuvre d’un projet urbain exemplaire en matière de développement durable, initiateur de projets innovants et concertés.



Maître des Requêtes honoraires au Conseil d’Etat et diplômée de l’ENA, Maryse Aulagnon est président directeur général d’Affine, foncière spécialiste dans l’immobilier d’entreprise.

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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