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Les chauffeurs VTC des plateformes numériques ont la qualité de salarié

Se prononçant pour la seconde fois sur la nature du contrat liant un travailleur à une plateforme numérique, la Cour de cassation réitère, concernant cette fois un chauffeur VTC et la plateforme Uber, qu’il s’agit d’un contrat de travail si l’existence d’un lien de subordination est établie.

Cass. soc. 4-3-2020 n° 19-13.316 FP-PBRI


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Aux termes de l’article L 8221-6 du Code du travail, les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des Urssaf pour le recouvrement des cotisations d'allocations familiales sont présumées ne pas être liées avec le donneur d'ordre par un contrat de travail dans l'exécution de l'activité donnant lieu à immatriculation.

L’existence d’un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque ces personnes fournissent directement ou par une personne interposée des prestations à un donneur d'ordre dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l'égard de celui-ci.

En l’espèce, un chauffeur ayant signé un contrat de partenariat avec la société Uber, utilisant une plateforme numérique et une application afin de mettre en relation avec des clients, en vue d’un transport urbain, des chauffeurs VTC exerçant leur activité sous un statut d’indépendant, saisit la juridiction prud’homale afin de solliciter la requalification de son contrat en contrat de travail.

Le contrat de travail suppose l’existence d’un lien de subordination

Après avoir rappelé que le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné et que le travail au sein d’un service organisé peut constituer un indice de subordination lorsque l’employeur en détermine unilatéralement les conditions d’exécution (Cass. soc. 13-11-1996 n° 94-13.187 PBR : RJS 12/96 n° 1320), la Cour de cassation approuve la cour d’appel d’avoir requalifié la relation de travail liant le chauffeur à la société en contrat de travail.

A noter : La note explicative relative à l’arrêt rappelle que selon une jurisprudence établie, l’existence d’une relation de travail salariée ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité professionnelle (Cass. soc. 17-4-1991 n° 88-40.121 P ; Cass. soc. 19-12-2000 n° 98-40.572 FS-PBRI : RJS 3/01 n° 275 ; Cass. soc. 9-5-2001 n° 98-46.158 FS-P : RJS 7/01 n° 825). Le présent arrêt est une nouvelle illustration de cette jurisprudence.

Les conditions d’exercice de l’activité permettent d’établir un lien de subordination

La décision de Cour de cassation s’appuie sur plusieurs éléments retenus par les juges du fond pour caractériser l’existence d’un lien de subordination. Ceux-ci ont en effet constaté que :

- le chauffeur avait intégré un service de prestation de transport créé et entièrement organisé par la société qui n’existe que grâce à la plateforme et à travers l’utilisation duquel il ne constitue aucune clientèle propre, ne fixe pas librement ses tarifs ni les conditions d’exercice de sa prestation de transport, entièrement régis par la société ;

- les tarifs étaient contractuellement fixés au moyen des algorithmes de la plateforme par un mécanisme prédictif imposant au chauffeur un itinéraire particulier dont il n’avait pas le choix et pour lequel des corrections tarifaires étaient appliquées s’il suivait un itinéraire inefficace ;

- le chauffeur ne connaissait parfois pas la destination de la course et il ne pouvait pas réellement choisir librement, comme l’aurait fait un chauffeur indépendant, la course lui convenant ou non ;

- il pouvait être déconnecté temporairement de l’application à partir de 3 refus de courses et perdre l’accès à son compte en cas de dépassement d’un taux d’annulation de commandes ou à l’application en cas de signalements de comportements problématiques par les utilisateurs, peu important que les faits reprochés soient constitués ou que leur sanction soit proportionnée à leur commission.

Il ressortait de l’ensemble de ces éléments que la société avait adressé des directives au chauffeur, en avait contrôlé l’exécution et avait exercé un pouvoir de sanction. Dès lors, la cour d’appel ne pouvait que constater l’existence d’un lien de subordination, et donc d’un contrat de travail, entre le chauffeur et la société et juger que son statut de travailleur indépendant était fictif.

La Cour de cassation reprend ici la solution qu’elle avait déjà adoptée dans l’arrêt Take Eat Easy. Dans cette affaire qui concernait un coursier ayant conclu un contrat de prestation de services avec une société utilisant une plateforme numérique et une application afin de mettre en relation des restaurateurs partenaires, des clients passant commande de repas et des livreurs à vélo exerçant sous le statut de travailleurs indépendants, la Cour se prononçait alors pour la première fois sur la nature du contrat des travailleurs des plateformes numériques en le qualifiant de contrat de travail (Cass. soc. 28-11-2018 n° 17-20.079 FP-PBRI : RJS 2/19 n° 72).

Valérie DUBOIS

Pour en savoir plus sur les éléments constitutifs du contrat de travail : Voir Mémento Social nos 16360 s.

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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