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Accueil/ Actualités - La Quotidienne/ Social/ Epargne salariale et actionnariat

Crédit d’impôt et bénéfice retenu pour le calcul de la participation : la Cour de cassation rejoint le Conseil d’Etat

Les crédits d’impôt ne viennent pas en déduction de l’impôt sur les sociétés pour déterminer le montant du bénéfice pris en compte pour le calcul de la réserve spéciale de participation. Telle est la position de la chambre sociale de la Cour de cassation, qui est déjà celle du Conseil d’Etat et de l’administration fiscale.

Cass. soc. 10-1-2017 n° 14-23.888 FS-PB


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En application de l’article L 3324-1 du Code du travail, la formule légale de la réserve spéciale de participation dépend notamment du bénéfice net de l’entreprise. La détermination de ce bénéfice est donc une opération essentielle.

Or, la possibilité de remettre en cause ce bénéfice est limitée par la loi qui prévoit que son montant, établi par une attestation de l’inspecteur des impôts ou du commissaire aux comptes, ne peut pas l’être à l'occasion des litiges nés de l'application des dispositions relatives à la participation (C. trav. art. L 3326-1).

La contestation par des syndicats et le comité d’entreprise du bénéfice établi par attestation est irrecevable

En l’espèce, deux syndicats et un comité d’entreprise contestaient le montant du bénéfice pris en compte par l’entreprise pour le calcul de la réserve de participation. Ils estimaient notamment que la limitation de la contestation, posée à l’article L 3326-1 du Code du travail, ne s’appliquait qu’aux données comptables et fiscales certifiées par le fisc ou le commissaire aux comptes. Selon eux, la détermination du bénéfice, nécessitant une interprétation de la norme fiscale, devait être contrôlée par le juge.

La cour d’appel rejette cette argumentation et juge irrecevable leur action pour les années où le bénéfice avait fait l'objet d'une attestation d'un commissaire aux comptes.

Sa décision est confirmée par la chambre sociale de la Cour de cassation, qui s’inscrit ainsi dans la ligne de la jurisprudence antérieure. Elle a en effet déjà jugé que le montant du bénéfice net, établi par une attestation du commissaire aux comptes, ne peut être contesté ni par le comité d’entreprise (Cass. soc. 7-11-2001 n° 00-12.216 F-D : RJS 1/02 n° 64), ni par une organisation syndicale, qu’elle ait ou non été partie à l’accord (Cass. soc. 9-2-2010 n° 08-11.338 F-D : RJS 4/10 n° 363).

En revanche, la limitation de la remise en question du montant du bénéfice net établi par une attestation ne concerne pas les tiers, comme l’AGS (Cass. soc. 10-2-1999 n° 96-22.157 P : RJS 3/99 n° 402).

A noter : le juge administratif admet quant à lui que l’attestation établie par l’inspecteur des impôts peut faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir (CE 26-1-1990 n° 60197-60249-66675 : RJS 3/90 n° 235). La contestation de celle délivrée par le commissaire aux comptes ne relève en revanche pas des juridictions administratives (CAA Versailles 11-10-2012 n° 11VE01039 : RJF 7/13 n° 722).

Le CIR ne vient pas en déduction de l’impôt sur les sociétés pour déterminer le bénéfice imposable

Pour les années où une aucune attestation n'avait été établie, la question était celle de l'incidence éventuelle du crédit d'impôt recherche (CIR) sur la détermination du bénéfice net de l'entreprise. Selon l'article L 3324-1 du Code du travail, et pour faire simple, le bénéfice net est le bénéfice imposable « diminué de l'impôt correspondant ».

En l’espèce, les syndicats et le comité d'entreprise soutenaient que le montant de l’impôt à déduire du bénéfice imposable était celui effectivement versé, et donc, compte tenu du crédit d'impôt, moindre que celui au taux de droit commun. Cela aurait conduit, dans les faits, à augmenter la réserve de participation d'une partie du montant du crédit d'impôt.

Or, cette position, un temps retenue par l'administration fiscale, a été invalidée par le Conseil d’Etat. Pour la Haute Juridiction administrative, l'impôt correspondant au bénéfice réalisé par l'entreprise au cours d'un exercice déterminé ne peut s'entendre que de l'impôt sur les sociétés au taux de droit commun résultant des règles d'assiette et de liquidation qui régissent ordinairement l'imposition des bénéfices (CE 20-3-2013 n° 347633 : RJF 6/13 n° 609).
Dans un avis ultérieur, la Cour de cassation s'est également prononcée dans le même sens et dans les mêmes termes (Cass. avis 14-9-2015 n° 15-70.003 P).
Se prononçant pour la première fois, à notre connaissance, sur cette question, la chambre sociale de la Cour de cassation retient également cette solution.

Sur le fond, on ne peut qu'approuver cette jurisprudence convergente du juge administratif et du juge judiciaire voyant dans le CIR une forme de paiement de l'impôt dû par les entreprises sur leurs bénéfices. C'est bien en effet lors du paiement de l'impôt correspondant au bénéfice que ce crédit est imputable en raison d'une créance détenue par l'entreprise sur le fisc. En outre, la fraction non imputée constitue une créance sur l'Etat d'égal montant utilisée pour le paiement de l'impôt dû au titre des trois années suivantes.

Au-delà de cette analyse technique, il convient aussi de bien voir que le crédit d'impôt est une aide accordée à l'entreprise. Il y aurait donc quelque paradoxe à dire que lorsque l'entreprise est soumise aux obligations légales en matière de participation des salariés, elle ne bénéficie plus de l’intégralité de cette aide puisqu'une partie de son montant viendrait accroître ce qu'elle doit aux salariés au titre de la réserve de participation. En clair, le dispositif est évidement fait pour soutenir les entreprises dans leur politique de recherche et non pas pour récompenser leurs salariés. Il doit profiter aux débiteurs de l'impôt sur les bénéfices et non à des tiers.

A noter : il ressort des termes des décisions ou jugements cités ci-dessus, rendus à propos du CIR, que la solution retenue vaut pour les autres crédits imputés sur l’impôt sur les sociétés. C’est également la position adoptée par l’administration fiscale (BOI-BIC-PTP-10-10-20-10 n° 200).

Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Social nos 55180 s.

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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