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L’insanité d’esprit vaut annulation du testament pourvu qu’elle soit établie au jour de la rédaction

Sont impropres à caractériser l’insanité d’esprit du de cujus au moment de tester des modèles d’actes par des tiers, révélateurs de sa vulnérabilité supposée, un certificat médical attestant d’un AVC passé inaperçu plus d’un an après, plus des coquilles dans son testament.

Cass. 1e civ. 7-2-2024 n° 22-12.115 F-D


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©Getty Images

Un homme décède intestat, laissant, outre sa fille, son auxiliaire de vie et la compagne de son fils prédécédé, toutes deux instituées légataires aux termes de son testament olographe en date du 20 juin 2013. L’héritière réservataire en conteste la validité.

La cour d’appel fait droit à sa demande et prononce la nullité du testament pour insanité d’esprit du testateur, relevant que :

  • des « brouillons » manuscrits de vente en viager, de testament, de révocation de ces opérations, de mandat de vente ont été rédigés par une autre main que la sienne peu avant la rédaction du testament litigieux (21-5 et 6-6-2013) ;

  • son état de vulnérabilité était confirmé par des erreurs dans le mandat de vente qu’il a recopié (notamment prix du bouquet au profit de l’auxiliaire de vie) ;

  • un accident vasculaire cérébral passé inaperçu a été attesté par un certificat médical du 12 août 2014 ;

  • l’écrit testamentaire comporte deux fois le prénom d’une des légataires tandis qu’il n’indique ni le prénom ni le titre « Madame » s’agissant de la seconde.

Censure pour défaut de base légale de la Cour de cassation, qui reproche à la cour d’appel de s’être déterminée par des motifs impropres à caractériser l’état d’insanité d’esprit du testateur au moment de la rédaction du testament.

A noter :

Comme le rappelle la Haute Juridiction dans cette affaire, pour faire une libéralité, il faut être sain d’esprit et il incombe à ceux qui agissent en nullité pour insanité d’esprit de l’auteur d’une libéralité de prouver son état d’insanité d’esprit au moment de l’acte (C. civ. art. 414-1 et 901).Il est toutefois admis que les juges puissent prononcer la nullité d’un testament pour insanité d’esprit de son auteur en se fondant sur l’état habituel de démence du testateur à l’époque où le testament a été rédigé, c’est-à-dire avant et après le testament litigieux, à une époque rapprochée (F. Terré, Y. Lequette et S. Gaudemet : Les successions. Les libéralités, Précis Dalloz 5e éd. 2024, n° 300). Dans ce cas de figure, la charge de la preuve est inversée et c’est au bénéficiaire de la libéralité d’établir que le testateur était exceptionnellement dans un intervalle de lucidité au moment de la confection de l’acte (pour une illustration, Cass. 1e civ. 11-6-1980 n° 78-15.129 : Bull. civ. I n° 184).

L’insanité d’esprit peut être établie par tous moyens, intrinsèques (en l’espèce, les coquilles supposées dans l’écrit testamentaire) ou extrinsèques à l’acte litigieux (production d’un certificat médical ou encore de modèles d’actes manuscrits rédigés par des tiers comme en l’espèce).

Reste que, si l’insanité d’esprit est une notion de fait laissée à l’appréciation souveraine des juges du fond, la Haute Juridiction n’en est pas moins autorisée à les censurer chaque fois que la connaissance des faits est insuffisante – ici « impropre » – à lui permettre de vérifier que la règle de droit a été correctement appliquée.

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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