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Le non-respect du repos journalier prévu conventionnellement ouvre droit à réparation

Pour la Cour de cassation, le seul constat de la méconnaissance du repos journalier de 12 heures entre deux services prévu par la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité ouvre droit à réparation.

Cass. soc. 7-2-2024 n° 21-22.809 FS-B, Sté Maîtres chiens, télé-surveillance parisiens c/ S.


Par Fabrice LABATUT
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©GettyImages

Pour rappel, depuis un arrêt du 13 avril 2016, la Cour de cassation a abandonné la jurisprudence dite « du préjudice nécessaire ». Elle considère depuis cette décision que l'existence d'un préjudice et l'évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond. Le salarié doit donc apporter des éléments justifiant du préjudice qu'il prétend avoir subi (Cass. soc. 13-4-2016 n° 14-28.293 FS-PBR). La chambre sociale a toutefois peu à peu admis certaines exceptions à cette solution, permettant au salarié d'obtenir une indemnisation sans rapporter la preuve de son préjudice.

Après le dépassement des durées légale maximale quotidienne et hebdomadaire de travail …

En matière de durée du travail, la chambre sociale a déjà jugé que le dépassement de la durée maximale hebdomadaire de travail cause nécessairement un préjudice au salarié (Cass. soc. 26-1-2022 n° 20-21.636 FS-B).

Par un arrêt du 11 mai 2023, elle a adopté la même solution en cas de dépassement de la durée maximale quotidienne de travail de 10 heures prévue par l’article L 3121-34 (devenu L 3121-18) du Code du travail (Cass. soc. 11-5-2023 n° 21-22.281 FS-B).

A noter :

L'arrêt du 26 janvier 2022 se réclamait de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne selon laquelle le dépassement de la durée moyenne maximale de travail hebdomadaire fixée à l'article 6, sous b), de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, constitue, en tant que tel, une violation de cette disposition, sans qu'il soit besoin de démontrer en outre l'existence d'un préjudice spécifique (CJUE 14-10-2010 aff. 243/09, point 53). Aux termes de cet arrêt, cette directive poursuivant l'objectif de garantir la sécurité et la santé des travailleurs par la prise d'un repos suffisant, le législateur de l'Union a considéré que le dépassement de la durée moyenne maximale de travail hebdomadaire, en ce qu'il prive le travailleur d'un tel repos, lui cause, de ce seul fait, un préjudice dès lors qu'il est ainsi porté atteinte à sa sécurité et à sa santé. À la différence du dépassement de la durée hebdomadaire maximale de 48 heures, la durée maximale quotidienne de travail est uniquement prévue par le Code du travail. Pour adopter une solution identique, la chambre sociale a énoncé que les dispositions de droit interne participent de l'objectif de garantir la sécurité et la santé des travailleurs par la prise d'un repos suffisant et le respect effectif des limitations de durées maximales de travail concrétisé par cette Directive 2003/88/CE.

Mais qu’en est-il en cas de manquement de l’employeur à des dispositions conventionnelles prévoyant un repos journalier plus favorable que les dispositions légales ? La règle du « préjudice nécessaire » doit-elle trouver application ?

Par un arrêt du 7 février 2024, la Cour de cassation répond par l’affirmative.

… le non-respect d’un repos conventionnel déroge à la règle selon laquelle seul le préjudice prouvé doit être indemnisé

En l’espèce, un salarié employé comme agent d’exploitation avait saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes, parmi lesquelles une demande de dommages-intérêts pour manquement de l’employeur à l’obligation de sécurité en raison du non-respect du temps de repos minimum de 12 heures, prévu par les dispositions conventionnelles applicables dans les entreprises de prévention et de sécurité.

La cour d'appel l'avait débouté de sa demande au motif qu'il ne justifiait d’aucun préjudice spécifique, bien que les juges du fond aient constaté à plusieurs reprises que le salarié n'avait pas bénéficié de ce repos.

La décision est censurée pour violation de la loi. La Cour de cassation juge, au visa de l’article L 4121-1 du Code du travail relatif à l’obligation de sécurité et des dispositions conventionnelles prévoyant le repos journalier, que le seul constat que le salarié n'a pas bénéficié du repos journalier de 12 heures entre deux services ouvre droit à réparation.

À l'instar des décisions précitées rendues les 26 janvier 2022 et 11 mai 2023, la chambre sociale fait une nouvelle fois référence à la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003. Elle précise que les textes au visa desquels l’arrêt est rendu participent de l'objectif de garantir la sécurité et la santé des travailleurs par la prise d'un repos suffisant et le respect effectif des limitations de durées maximales de travail.

A notre avis :

Cette solution, rendue à propos de dispositions conventionnelles, devrait être logiquement étendue au non-respect par l’employeur du repos minimal quotidien de 11 heures consécutives prévu par l’article L 3131-1 du Code du travail.

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© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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