Droit pénal international
Extradition : nécessité de vérifier l’objet de la demande
Il se déduit des articles 6 de la Convention d'extradition entre la France et l'Algérie (signée le 27-01-2019) et des articles 593 et 696-8 du code de procédure pénale que dans le cas d'une demande d'extradition formée par les autorités algériennes pour des poursuites pénales (mandat d’arrêt émis le 20-03-2017) suivie d'une condamnation par contumace en Algérie pour les mêmes faits, la demande devient sans objet si la condamnation est exécutoire. La chambre de l'instruction doit vérifier ce point avant d'examiner le bien-fondé de la demande. En l'espèce, la chambre de l'instruction a statué sur le fond de la demande d'extradition sans s'assurer que celle-ci avait toujours un objet, entraînant ainsi la cassation de l'arrêt. (Crim. 16-12-2025, n° 25-81.814, F-B)
Exécution d’un MAE en l’absence de risque de traitements inhumains et dégradants
A justifié sa décision de remise dans le cadre d’un mandat d’arrêt européen (MAE) la chambre de l’instruction qui, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, en réponse à l'argumentation du demandeur et à la lumière des éléments produits par les autorités de l'État d'émission (la Grèce) à la suite de la demande de complément d'information, a écarté l'existence d'un risque réel, pour l'intéressé, d'être exposé à des traitements inhumains et dégradants dans la prison de La Canée. Celui-ci y disposera en effet d'un espace personnel compris entre 3 et 4 m², lequel ne comprend pas les sanitaires mais inclut l'espace occupé par les meubles. De plus, les conditions de détention lui permettront de se mouvoir normalement dans la cellule et garantiront le respect des normes d'hygiène et d'accès aux soins et à des activités à l'extérieur. Elles correspondent ainsi aux exigences et standards européens. (Crim. 16-12-2025, n° 25-87.682, F-B)
Droit pénal spécial
Diffamation non publique d’un agent public : la faute personnelle conditionne l’action civile devant le juge pénal
En cas de diffamation non publique imputée à un agent territorial dans un rapport interne, le juge pénal ne peut statuer sur les demandes civiles qu’à la condition de caractériser une faute personnelle détachable du service.
Condamnée pour deux contraventions de diffamation non publique à raison d’un « rapport de fin de mission » dénonçant le « management par la terreur » de deux directeurs de service, une attachée territoriale avait été condamnée à indemniser personnellement les intéressés.
Si la chambre criminelle admet le cumul de deux amendes, chacune se rattachant à des propos distincts visant deux personnes différentes dans la même note, elle censure en revanche le jugement sur l’action civile, faute pour le tribunal d’avoir vérifié l’existence d’une faute personnelle détachable des fonctions, seule de nature à fonder la compétence du juge répressif pour réparer les conséquences dommageables de l’acte. (Crim. 16-12-2025, n° 24-86.192, F-B)
Procédure pénale
Contrôle judiciaire : portée de l’irrégularité de l’interrogatoire préalable
Saisie de l’appel d’une ordonnance de placement en détention provisoire après révocation du contrôle judiciaire, la chambre de l’instruction ne peut statuer sur la régularité de l’interrogatoire préalable du mis en examen par le juge d’instruction.
L’appel prévu par l’article 186 du code de procédure pénale, de nature exceptionnelle, ne peut en effet servir à faire juger des questions étrangères à l’ordonnance déférée. La Cour rappelle en outre qu’aucun texte n’impose un interrogatoire préalable pour saisir le juge des libertés et de la détention aux fins de révocation du contrôle judiciaire. Aussi, l’irrégularité d’un tel acte, qui n’est pas indissociable de l’ordonnance de placement en détention provisoire, n’est pas susceptible d'entraîner la nullité de celle-ci. (Crim. 16-12-2025, n° 25-86.707, F-B)
Formalisme de la désignation de l’avocat et (ir)recevabilité de l’appel
La chambre criminelle confirme que, au stade de l’instruction, l’avocat qui interjette appel d’une ordonnance de règlement doit être celui que la partie a désigné dans les formes de l’article 115 du code de procédure pénale, cette exigence constituant une règle de forme d’ordre public.
En l’espèce, les parties civiles avaient fait choix d’un avocat désigné conformément à l’article 115, à qui l’ordonnance de non-lieu avait été notifiée, mais l’appel avait été formé par un autre conseil se présentant comme « avocat des quatre parties civiles ». La chambre de l’instruction a déclaré l’appel irrecevable, décision approuvée par la Cour de cassation. (Crim. 16-12-2025, n° 25-80.100, F-B)
Compétence de la cour d'appel de renvoi sur l'action civile
Il résulte des articles 567 et 609 du code de procédure pénale que, si le pourvoi a pour effet de déférer à la Cour de cassation la décision attaquée dans son intégralité, cet effet est limité par la qualité du demandeur, par sa volonté ou par son intérêt à agir. Après cassation, l'affaire est dévolue à la cour d'appel de renvoi dans les limites fixées par l'acte de pourvoi et dans celles de la cassation intervenue.
Si par ailleurs, en application de l'article 567 précité, la partie civile ne peut se pourvoir qu'à l'encontre des dispositions relatives à ses intérêts civils, cette restriction aux effets de son pourvoi n'a pas lieu lorsqu'il n'a été statué que sur la validité de la poursuite. La juridiction de renvoi est alors tenue de statuer tant sur l'action publique que sur l'action civile.
Tel n’est pas le cas lorsque les juges constatent la prescription de l'action publique, dès lors que, dans une telle hypothèse, ils ne se prononcent pas sur la validité de la poursuite mais sur une cause d'extinction de l'action publique. Ainsi, en l’espèce, la cour d'appel ayant (à tort) conclu à un tel constat, la cour d'appel de renvoi n'était saisie que de l'action civile. (Crim. 16-12-2025, n° 22-84.888, F-B)
Rectification d’erreur matérielle en cassation : monopole des avocats aux conseils
La chambre criminelle rappelle que seules les parties représentées par un avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation peuvent valablement saisir la Cour d’une requête en rectification d’erreur matérielle.
À la suite d’un arrêt de 2023 n’ayant cassé, sur pourvoi du condamné, que les dispositions relatives à la culpabilité et à la peine, un avocat au barreau de Melun a demandé la rectification de cette décision au motif que la cassation aurait dû s’étendre aux intérêts civils. La Cour déclare la requête irrecevable, retenant qu’en application de l’article 4 de la loi du 31 décembre 1971, seul un avocat aux conseils peut représenter et assister les parties devant elle, y compris dans le cadre d’une telle procédure incidente. La Cour se borne dès lors à constater cette irrégularité de représentation, sans examiner le bien-fondé de la demande de rectification. (Crim. 16-12-2025, n° 22-87.506, F-B)
Pour aller plus loin : voir la revue AJ pénal




