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Accueil/ Actualités - La Quotidienne/ Affaires/ Contrats (règles communes)

Quelle que soit la date de la promesse unilatérale, la rétractation par le promettant est inefficace

Comme les autres chambres de la Cour de cassation, la chambre commerciale revient sur sa jurisprudence antérieure et refuse à celui qui a consenti une promesse unilatérale de vente la faculté de se rétracter, sauf clause contraire de la promesse.

Cass. com. 15-3-2023 n° 21-20.399 FS-B, Sté Groupe télégramme médias c/ Sté Morgane groupe


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©Gettyimages

En 2012, une société cède une partie des actions qu’elle détient dans une filiale et promet, dans le même acte, de céder le reste des actions de celle-ci à l’acquéreur en deux étapes ultérieures. Mais alors que le délai pour lever l’option n’a pas commencé à courir, la société rétracte la promesse. Après avoir levé l’option, l’acquéreur demande l’exécution forcée de la promesse. 

La cour d’appel de Rennes rejette la demande : la promesse ayant été consentie avant la réforme du droit des contrats de 2016, la levée de l'option par le bénéficiaire de la promesse unilatérale après la rétractation du promettant a exclu toute rencontre des volontés réciproques de vendre et d'acquérir et la possibilité d’exécution forcée, conformément au droit positif antérieur à la réforme.

La Cour de cassation censure cette décision : le promettant signataire d'une promesse unilatérale de vente s'oblige définitivement à vendre dès cette promesse et ne peut pas se rétracter, même avant l'ouverture du délai d'option offert au bénéficiaire, sauf stipulation contraire.

A noter :

1° Après la chambre sociale et la troisième chambre civile de la Cour de cassation (Cass. soc. 21-9-2017 no 16-20.103 FS-PBR, 16-20.104 FS-PBRI : RJDA 12/17 no 784 ; Cass. 3e civ. 23-6-2021 no 20-17.554 FS-B : BRDA 14/21 inf. 11 ; Cass. 3e civ. 20-10-2021 n° 20-18.514 FS-B : BRDA 23/21 inf. 8), c’est au tour de la chambre commerciale d'opérer un revirement de jurisprudence, qui unifie le régime de la rétractation d’une promesse unilatérale de contrat, que la promesse ait été consentie avant ou après la réforme du droit des contrats issue de l'ordonnance 2016-131 du 10-2-2016.

Le principe appliqué par la cour d’appel de Rennes en l’espèce était conforme à la jurisprudence de la Cour de cassation jusqu’à cette réforme (notamment, Cass. 3e civ. 11-5-2011 n° 10-12.875 FS-PB : RJDA 8-9/11 n° 690 ; Cass. com. 13-9-2011 n° 10-19.526 F-D : RJDA 1/12 n° 25).

L’article 1124, al. 2 du Code civil, dans sa rédaction issue de la réforme de 2016 et applicable aux promesses consenties depuis le 1er octobre 2016 (Ord. 2016-131 du 10-2-2016), précise désormais que la révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n'empêche pas la formation du contrat promis. Dans ce nouvel arrêt, la chambre commerciale précise que, si ce texte n’était pas applicable en l’espèce, il était nécessaire, compte tenu de l'évolution du droit des obligations, de modifier sa jurisprudence. Elle le fait au visa de l’ancien article 1134, al. 1 (désormais art. 1103) du Code civil, en vertu duquel les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. 

A la différence de la simple offre de vente, rappelle la Cour de cassation, la promesse unilatérale de vente est un contrat, préalable au contrat définitif, qui contient, outre le consentement du vendeur, les éléments essentiels du contrat définitif qui serviront à l'exercice de la faculté d'option du bénéficiaire et à la date duquel s'apprécient les conditions de validité de la vente, notamment s'agissant de la capacité du promettant à contracter et du pouvoir de disposer de son bien. Il y a donc lieu d’appliquer en l’espèce un principe identique à celui posé par l’article 1124 précité. La Cour de cassation y apporte une précision : le promettant ne peut pas se rétracter même si le délai pour lever l’option n’a pas commencé à courir.

2° Au promettant qui soutenait que l’application immédiate de ce revirement portait atteinte au principe de sécurité juridique et au droit à un procès équitable, la Cour de cassation rappelle l’absence de droit acquis à une jurisprudence constante (CEDH 18-12-2008 n° 20153-04 : RJS 6/09 n° 596 ; CEDH 12-7-2018 n° 22008-12). Elle ajoute qu’à la date du pourvoi formé par le promettant (l’arrêt d’appel a été rendu le 6 juillet 2021) le revirement de la troisième chambre civile n’était pas imprévisible : une grande partie de la doctrine l’appelait de ses vœux dès avant la conclusion de la promesse litigieuse ; la réforme de février 2016, intervenue avant la rétractation de cette promesse (en mars 2016), confirmait les doutes sur le bien-fondé et le maintien de la jurisprudence antérieure. Enfin, relève la Cour de cassation, les conséquences du revirement pour le promettant ne sont pas disproportionnées dès lors qu’en vertu de l’ancienne jurisprudence il aurait dû, en tout état de cause, payer des dommages-intérêts au bénéficiaire pour réparer le préjudice causé par la rétractation illicite de la promesse.

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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