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PME : mieux prévenir les difficultés des délais de paiement

Si le futur plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (projet de loi PACTE) voulu par le gouvernement introduit pour les entrepreneurs le droit au rebond en cas de difficultés, il n'intègre pas la problématique du crédit inter-entreprises.


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Le projet de loi PACTE, qui prévoit d'offrir aux entrepreneurs un droit de rebond, ne traite pas de la problématique du crédit-inter-entreprises. Autrement appelé « délai de paiement », ce crédit financier que s'accordent les entreprises, dans le cadre de leurs relations commerciales d'achats et de ventes, pèse 635 milliards d'euros par an dans l'économie française (Banque de France – 2017). Outre qu'il est une composante essentielle du besoin en fonds de roulement, il est aussi l'une des raisons essentielles des liquidations des entreprises en France. Parmi les 15 000 défaillances constatées chaque année, 90 % concernent des PME dont la disparition est provoquée par un défaut de paiement de la part des grands groupes.

Cause majoritairede défaillance des PME

Contrairement aux banques, les PME disposent de faibles capacités pour mesurer la solvabilité de leurs clients et de leurs fournisseurs. Structurellement, elles ont aussi besoin d'une trésorerie plutôt importante (voir « Délais de paiement : soutenons nos PME », Les Echos, 13 nov. 2017). Celles qui interviennent (ou sont déjà présentes) dans les secteurs fournisseurs ont, généralement, une exposition assez élevée aux risques, donc une possibilité importante de défaillance. Conscients que notre tissu économique national est composé aux trois quarts de PME produisant 60 % de la valeur ajoutée et représentant 60 % des emplois, les pouvoirs publics ont introduit des délais de paiement entre professionnels. Le Code de commerce prévoit leur plafonnement et fixe des délais de paiement impératifs pour certains produits et services (C. com. art. L 441-6 et L 443-1). Ainsi concernant les contrats de vente ou de prestation de services conclus entre un producteur – prestataire de services, grossiste ou importateur – et un acheteur de produits ou demandeur de prestations de services, et sauf dispositions contraires, le délai de règlement des sommes dues est fixé au trentième jour suivant la date de réception des marchandises ou d'exécution de la prestation. Les parties peuvent convenir d'un délai supérieur qui ne peut dépasser soixante jours à compter de la date d'émission de la facture. Par dérogation, elles peuvent convenir d'un délai maximal de 45 jours fin de mois à compter de la date d'émission de la facture, à condition que ce délai soit expressément stipulé par contrat et qu'il ne constitue pas un abus manifeste à l'égard du créancier (C. com. art. L 441-6, I, al. 9). La Banque de France observe que, depuis 2012, deux-tiers des entreprises règlent désormais dans les délais figurant aux conditions de vente ou convenus entre les parties ; 43,4 % des grandes entreprises honorent leurs factures à temps. Si les retards constatés sont désormais de 11 jours, le législateur a estimé, l'été dernier, qu’ils coûtaient 16 milliards d'euros de trésorerie par an aux PME. En 2018, les défaillances semblent reculer pour l'ensemble des PME (- 6,1 % ; Banque de France – 2018).

Sanctions et « Name and Shame »

En principe, le non-respect des délais de paiement entraîne une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 2 millions d'euros pour une personne morale (C. com. art. L 441-6, VI et L 443-1, dernier al.), avec obligation de publier la décision de sanction aux frais de la personne sanctionnée (C. com. art. L 470-2, V). En cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive, le maximum de l'amende encourue est doublé. En 2017, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a lancé 228 procédures dont l'encours total représentait 10,9 millions d'euros et applique désormais la méthode du « Name and Shame », méthode consistant à nommer publiquement les entreprises aux pratiques critiquables dans ce domaine notamment. Améliorations à venir Pour que « la France soit réellement de retour », des solutions résident dans le développement de l'équipement numérique et informatique des PME. L'Etat doit, à ce titre, les inciter à devenir des « power users ». En effet, il faut encore 14 jours à une entreprise pour traiter une facture format papier et toutes sont loin d'avoir adopté la dématérialisation. Elle est pourtant essentielle dans l'optimisation du délai de traitement des factures. D'ici à 2 ans, toutes les entreprises, émettrices de factures à destination de l’Etat, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics respectifs devront s'y conformer, comme le prévoit l’ordonnance 2014-697 du 26 juin 2014. Les grandes entreprises l'ont adopté en 2017 et les ETI depuis cette année. A l'horizon 2020, les TPE-PME en auront l'obligation (voir La Quotidienne du 31 octobre 2017). Dans les rapports entre entreprises privées, la loi 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, dite Macron, enjoignait à ces dernières l’obligation d’accepter les factures émises sous forme dématérialisée (art. 222 ; le texte prévoyait une mise en place progressive selon un calendrier comme pour les marchés publics). Il faut souligner que même si cette obligation n’a pas été introduite, comme initialement prévu, par voie d’ordonnance dans les 9 mois de la promulgation de la loi, on peut penser que cette contrainte sera généralisée à tous les secteurs d’ici 2020.

En conclusion, la réduction des crédits inter-entreprises est fondamentale à l'économie française qui manque d'ETI en comparaison de certains pays européens voisins (Angleterre, Allemagne, notamment). Permettre aux PME de restaurer leur trésorerie favoriserait leur passage à la taille intermédiaire. Pour se faire, elles ont besoin d'investir (innovation, stratégie commerciale, marketing, etc.). Une opportunité pour notre pays : les ETI françaises sont compétitives, favorisent l'emploi et sont solidement présentes à l'international. Seul frein, la législation fiscale et sociale. A coup sûr, un futur chantier pour le gouvernement !



Grégoire LECLERCQ, PDG de Itool Systems

Pour aller plus loin sur cette question : Mémento Concurrence Consommation n°15000 s. et Livre blanc gratuit Principaux délais de paiement interentreprises

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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