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Réforme du cautionnement : le devoir du créancier de mettre en garde la caution étendu

Dans sa version résultant de l’ordonnance réformant les sûretés, le Code civil prévoit que le créancier professionnel doit mettre en garde la caution personne physique lorsque l'engagement du débiteur principal est inadapté aux capacités financières de ce dernier, sous peine de déchéance de son droit contre la caution. Explications.


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©iStock

1. L’ordonnance 2021-1192 du 15 septembre 2021, dont les dispositions entreront en vigueur le 1er janvier prochain, consacre un important volet au cautionnement, la sûreté personnelle la plus fréquente.

Voici un commentaire des nouveautés sur l’obligation du créancier de mettre en garde la caution.

Le devoir de mise en garde aujourd’hui 

2. La jurisprudence fait aujourd’hui peser sur les établissements de crédit (et assimilés, telle une société de crédit-bail) qui réclament un cautionnement l’obligation de mettre en garde la caution si l’engagement de celle-ci est, lors de sa conclusion, inadapté à ses capacités financières et s’il existe un risque d’endettement né de l’opération garantie, risque qui résulte de l’inadaptation du contrat aux capacités financières de l’emprunteur ou du crédit-preneur (notamment, Cass. com. 9-10-2019 n° 18-12.813 F-D : RJDA 1/20 n° 47 ; Cass. com. 5-5-2021 n° 19-21.468 F-P : RJDA 8-9/21 n° 604). L’établissement est tenu d’une telle obligation envers la caution profane (arrêts précités) et, exceptionnellement, envers une caution avertie si l’établissement détient des informations que la caution ignorait sur les revenus de l'emprunteur garanti, son patrimoine et ses facultés de remboursement prévisibles en l'état du succès escompté de l'opération (Cass. com. 20-4-2017 n° 15-16.184 F-D : RJDA 10/17 n° 664).

La réforme codifie partiellement cette jurisprudence.

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Le devoir de mise en garde étendu à tout créancier professionnel

3. Le nouvel article 2299 du Code civil met à la charge de tout créancier professionnel l’obligation de mettre en garde la caution, sans définir la notion de créancier professionnel.

A notre avis, sera transposable la jurisprudence actuelle qualifiant de créancier professionnel celui dont la créance est née dans l'exercice de sa profession ou se trouve en rapport direct avec l'une de ses activités professionnelles, même si celle-ci n'est pas principale (Cass. 1e civ. 9-7-2009 n° 08-15.910 FS-PBI : RJDA 1/10 n° 76 ; Cass. com. 15-11-2017 n° 16-13.532 F-D : RJDA 2/18 n° 176) et si le créancier n'est pas commerçant (Cass. 3e civ. 9-3-2011 n° 10-11.011 FS-D : RJDA 11/11 n° 958 à propos d’une SCI ayant consenti un bail commercial garanti par un cautionnement).

Mise en garde sur l’inadaptation de l’engagement du débiteur principal à ses capacités financières

4. Aux termes du nouvel article 2299, al. 1 du Code civil, le créancier professionnel sera tenu de mettre en garde la caution personne physique lorsque l’engagement du débiteur principal est inadapté aux capacités financières de ce dernier.

Relevons d’abord que le nouveau texte ne reprend pas l’obligation de mettre en garde en garde la caution sur l’inadaptation du cautionnement à ses propres capacités financières. En effet, cette question relèvera de l’interdiction faite au créancier de se prévaloir d’un cautionnement disproportionné.

5. Le devoir de mise en garde sera réservé aux cautions personnes physiques. La jurisprudence citée n° 2 n’avait pas, à notre connaissance, imposé une telle limite ; elle avait même admis, s’agissant du devoir de mise en garde de l’emprunteur, que la banque n’en était pas nécessairement exonérée à l’égard d’une personne morale dès lors que celle-ci était une emprunteuse profane (Cass. com. 11-4-2018 n° 15-27.133 FS-PB : RJDA 6/18 n° 524 ; Cass. com. 31-1-2017 n° 14-20.548 F-D).

Il reste que le nouveau texte ne fait nullement référence à la qualité de caution avertie ou profane ; il faut en déduire que toutes les cautions personnes physiques bénéficieront du devoir de mise en garde, quelles que soient leurs compétences et expériences.

Sanction du défaut de mise en garde

6. Actuellement, le créancier qui manque à son devoir de mise en garde engage sa responsabilité contractuelle à l’égard de la caution pour lui avoir fait perdre la chance de ne pas s’engager (notamment, Cass. com. 20-10-2009 n° 08-20.274 FS-PB : RJDA 1/10 n° 68 ; Cass. com. 12-7-2017 n° 16-10.793 F-PBI : RJDA 11/17 n° 751) et, le cas échéant, pour lui avoir causé un préjudice moral (Cass. com. 7-2-2018 n° 16-12.808 F-D : RJDA 5/18 n° 549). La caution peut alors demander la compensation entre les sommes qu’elle doit au créancier et les dommages-intérêts auxquels il est condamné.

L’ordonnance substitue une déchéance à cette action en responsabilité : le créancier sera déchu de son droit contre la caution à hauteur du préjudice subi par celle-ci (C. civ. art. 2299, al. 2 nouveau). Pour la caution, ceci constituera une simplification procédurale, la déchéance d’un droit constituant une défense au fond qui échappe à la prescription (cf. Cass. com. 6-6-2018 n° 17-10.103 FS-PBI : RJDA 10/18 n° 770), mais le résultat sera en pratique le même : la caution sera libérée de son engagement à hauteur de son préjudice.

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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