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La semaine de l’actualité pénale (2e partie)

Le pôle pénal des Editions Lefebvre Dalloz a sélectionné pour vous l’actualité marquante de la semaine écoulée.


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©Gettyimages

Droit pénal international

Précisions sur l’exécution d’une condamnation à la suite d’un MAE  

Saisie par la cour d’appel de Bucarest, la Cour de justice précise l’articulation entre la décision-cadre 2002/584 relative au mandat d’arrêt européen (MAE) et la décision-cadre 2008/909 sur la reconnaissance et l’exécution des jugements en matière pénale. 

En l’espèce, l’Italie avait refusé la remise d’un condamné roumain sur le fondement de l’article 4, point 6 (motif facultatif de non-exécution), de la décision-cadre 2002/584, préférant exécuter la peine sur son sol au motif que cela favoriserait sa réinsertion sociale, et ce malgré le désaccord exprès de l’État d’émission. 

La Cour énonce que l’article 4, point 6, de la décision-cadre 2002/584 et les articles 4, 22 et 25 de la décision-cadre 2008/909 doivent être interprétés en ce sens que, d’une part, le refus de l’autorité judiciaire d’exécution, fondé sur le motif de non-exécution facultative prévu à l’article 4, point 6, de la décision-cadre 2002/584, de remettre une personne faisant l’objet d’un MAE émis aux fins d’exécution d’une peine privative de liberté, présuppose que cette autorité judiciaire respecte les conditions et la procédure prévues par la décision-cadre 2008/909 s’agissant de la reconnaissance du jugement de condamnation à cette peine et de la prise en charge de l’exécution de ladite peine et, d’autre part, que l’État d’émission conserve le droit d’exécuter la même peine, et donc de maintenir le MAE, dans des circonstances où, sans avoir respecté les conditions et la procédure prévues par la décision-cadre 2008/909 quant à la reconnaissance de ce jugement et à cette prise en charge, l’autorité judiciaire d’exécution a refusé, sur le fondement de ce motif, l’exécution de ce mandat. 

La Cour réaffirme ainsi que l’exécution du MAE demeure le principe, son refus constituant une exception d’interprétation stricte, afin d’éviter toute impunité. (CJUE 4-09-2025, aff. C-305/22) 

MAE : l’État d’exécution ne peut suspendre la peine reconnue 

Saisie d’un renvoi préjudiciel par le tribunal de Porto sur l’interprétation de la décision cadre 2008/909/JAI, la Cour de justice de l’Union européenne a jugé que l’autorité judiciaire d’un État membre (en l’esp. le Portugal), qui a refusé l’exécution d’un mandat d’arrêt européen aux fins de remise et s’est engagée à exécuter la peine sur son territoire, ne peut ensuite en suspendre l’exécution. Admettre une telle faculté pour l’État d’exécution reviendrait, selon la Cour, à altérer la condamnation reconnue et à porter atteinte à la confiance mutuelle et au principe de reconnaissance, piliers de la coopération judiciaire européenne. (CJUE, 11-09-2025, aff. C-215/24, Ministério Público contre YX.

Ne bis in idem : précisions sur la notion de « mêmes faits » 

Saisie par la Cour centrale espagnole d’une question préjudicielle, la Cour de justice de l’Union européenne a rappelé que le principe ne bis in idem, consacré à l’article 54 de la Convention d’application de l’accord de Schengen, s’oppose à ce qu’une personne soit poursuivie dans un État membre pour des actes de terrorisme ayant déjà donné lieu à condamnation définitive dans un autre État membre, quand bien même la qualification retenue y serait différente. 

En l’espèce, une ancienne dirigeante d’une organisation terroriste, qui a purgé en France une peine de vingt ans de réclusion pour sa participation à une association terroriste, a été remise aux autorités espagnoles en exécution d’un mandat d’arrêt européen pour des faits liés à l’attentat d’Oviedo (1997). Les autorités espagnoles envisagent de la poursuivre pour destructions terroristes, tentative d’assassinat terroriste et coups et blessures, infractions passibles d’une peine de trente ans de prison.  

La Cour souligne que la notion de « mêmes faits » vise uniquement la matérialité des faits reprochés. Ni la divergence des qualifications juridiques, ni la poursuite d’intérêts juridiques distincts dans les différents ordres juridiques ne peuvent écarter l’application du principe ne bis in idem. Il appartient à la juridiction nationale de vérifier si les actes poursuivis en Espagne correspondent bien à ceux déjà jugés en France. (CJUE 11-09-2025, aff. C-802/23)  

Droit pénal spécial

Précisions sur le maintien frauduleux dans un systèmede traitement automatisé de données 

Même un administrateur réseau bénéficiant, du fait de ses fonctions, d’un droit d'accès généralisé à la messagerie de l’entreprise peut se rendre coupable de l’infraction de maintien frauduleux dans un système de traitement automatisé de données au sens de l’article 323-1 du code pénal, dès lors qu’il s’est maintenu dans ledit système et a pris connaissance du contenu des messages échangés au sein du réseau, à des fins étrangères à sa mission et à l’insu des titulaires des messages. (Crim 2-09-2025, n° 24-83.605, F-B) 

Condamnation de la France par la CEDH pour manquement à ses obligations positives en matière d’actes sexuels non consentis 

Dans cette affaire, la requérante, employée dans un centre hospitalier, entretenait une liaison avec son supérieur hiérarchique, qui s’est vite transformée en rapport de domination dégradant et humiliant, allant jusqu’à la pratique d’actes sexuels violents et non consentis. Le tribunal correctionnel – la demande de la partie civile de requalification des faits en crimes ayant été refusée – a déclaré le prévenu coupable de violences volontaires et de harcèlement sexuel aggravé, mais la cour d’appel puis la Cour de cassation l’en ont relaxé. La requérante a alors porté l’affaire devant la Cour européenne des droits de l’homme, critiquant à la fois le cadre juridique répressif français et son application en l’espèce. 

D’abord, la Cour appelle de nouveau la France à évoluer quant à l’intégration de la notion de consentement dans la définition du viol et des agressions sexuelles. Quant à la mise en œuvre de la législation, la Cour considère que les allégations de viol et d’agression sexuelle de la victime n’ont pas été suffisamment approfondies durant l’enquête, et que la procédure ayant duré 8 ans et 6 mois, elle n’a pas satisfait aux exigences de célérité. S’agissant enfin du consentement, la CEDH relève que les faits n’ont pas été resitués dans leur contexte professionnel et qu’en raison d’un comportement de contrôle coercitif, d’une situation de vulnérabilité professionnelle et de la dégradation progressive et majeure de la santé mentale de la victime, celle-ci n’a pas pu consentir librement aux actes litigieux. Par ailleurs, la signature d’un « contrat maître-chienne » relatant les actes qui pouvaient être commis entre les deux protagonistes - considérée par les juges français comme la preuve d’un consentement – n’est pas susceptible de caractériser un consentement actuel à une pratique sexuelle déterminée, le consentement étant par nature révocable. En outre, en opposant à la victime la signature de ce contrat, la cour d’appel l’a exposée à une forme de victimisation secondaire culpabilisante et stigmatisante.

La Cour conclut que les autorités nationales ont manqué à leur obligation de protéger la dignité de la requérante et caractérise la violation par la France des articles 3 et 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme. (CEDH 4-09-2025, req. n° 30556/22, E. A. et Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail c. France

Distinction entre enlèvement et séquestration

L'infraction d'arrestation illégale (C. pén., art. 224-1) consiste à s'emparer d'une personne, de sorte qu'elle est privée de sa liberté de mouvement. L'enlèvement (incriminé au même article) est un déplacement contraint d'une personne privée de sa liberté au cours de son transport. Justifie sa décision la cour d'appel qui, pour déclarer le demandeur coupable d'arrestation et enlèvement, retient, d'une part, que la partie civile est montée dans un véhicule dans lequel elle a été immobilisée et attachée, d'autre part qu'elle a été conduite, sous contrainte, jusque dans une grange. (Crim. 17-09-2025, n° 24-84.690, FS-B)

Justice

Condamnation de l’Etat pour dysfonctionnement du service public de la Justice dans l’affaire Estelle Mouzin 

Le 3 septembre 2025, le tribunal judiciaire de Paris a retenu la responsabilité de l’Etat pour dysfonctionnement traduisant l’inaptitude du service public de la justice à remplir la mission qui lui était confiée dans le cadre de l’affaire Estelle Mouzin. Il s’agit d’une victoire pour le père de la victime, Eric Mouzin, qui reprochait à l’Agent judiciaire d’Etat les nombreuses erreurs commises dans le cadre de cette affaire. Le tribunal retient en particulier l’absence de cotation du dossier pénal, puis la cotation anarchique, ayant entravé l’avancement de l’enquête, ceci combiné aux défaillances liées à la succession de dix magistrats instructeurs durant l’affaire. Le tribunal prononce donc la condamnation de l’Etat sur le fondement de l’article L. 141-1 du code de l’organisation judiciaire selon lequel l’Etat est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice. (TJ Paris, 3-09-2025, n° 19/00612) 

Procédure pénale

Conditions de recevabilité d’une demande de mise en liberté: labsence dambiguïté 

La requête d’un avocat dénonçant l’indignité des conditions de détention provisoire de son client ne constitue pas une demande de mise en liberté. En effet, pour être recevable, une demande de mise en liberté doit être dépourvue d’ambiguïté. Ainsi, la requête - même avec le visa des articles 144 et 148-1 du code de procédure pénale en première et dernière page– qui comprend plus de quatre-vingts pages développant des motifs relatifs aux conditions indignes de détention, ne peut s’analyser comme une demande de mise en liberté au regard de l’article 148-6 dudit code. (Crim. 2-09-2025, n° 25-84.044, F-B) 

CHINSet obstacles à laudition dun expert 

La chambre criminelle rejette le pourvoi formé contre une décision de la chambre de l’instruction de Paris ayant renvoyé un accusé devant la cour d’assises pour tentative de meurtre, viols, violences aggravées, dégradations par incendie et proxénétisme. 

Le demandeur soutenait que la chambre de l’instruction, qui avait à apprécier la responsabilité pénale d’une personne mise en examen, avait statué sans avoir entendu l’un des experts psychiatres, en méconnaissance des articles 168 et 706-122 du code de procédure pénale. La Cour rappelle certes que l’audition des experts est obligatoire, mais admet que l’impossibilité de joindre le praticien — retraité, adresse électronique invalide, messages téléphoniques infructueux, absence de coordonnées auprès de l’établissement hospitalier — constitue un obstacle de fait rendant impossible cette audition. Dès lors, les juges du fond n’ont pas méconnu les exigences procédurales. (Crim. 3-09-2025, n° 25-84.138, F-B) 

Contestations des visites domiciliaires en matière fiscale : compétence exclusive du premier président de la cour d’appel

Le juge répressif n'est pas compétent pour se prononcer sur la régularité des visites domiciliaires effectuées en application de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales. Elles ne peuvent être contestées que devant le premier président de la cour d'appel saisi du recours prévu par cet article. (Crim. 10-09-2025, n° 24-86.618, F-B)

Vie privée et liberté d’expression : la CEDH valide la publication des propos de la fille de Claude Guéant par Le Monde

Saisie par Marie-Sophie Charki, fille de Claude Guéant, ancien ministre de l’Intérieur, la Cour européenne des droits de l’homme juge, par quatre voix contre trois, qu’il n’y a pas eu violation de l’article 8 de la Convention.  

L’intéressée dénonçait la publication, par le journal Le Monde, de retranscriptions de conversations téléphoniques privées avec son père, issues d’écoutes judiciaires menées dans le cadre de l’affaire du financement libyen de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy. Après avoir reconnu l’atteinte à sa vie privée, les juridictions françaises avaient estimé que la diffusion respectait le principe de proportionnalité et servait un débat d’intérêt général. 

La CEDH valide cette mise en balance : bien que la requérante ne soit pas une personnalité publique, elle n’était pas un « tiers anodin » dans un contexte hautement médiatique et ses propos, publiés pour éclairer les déclarations de son père, n’excédaient pas les nécessités de l’information du public et du principe de la liberté d’expression. 

Trois juges expriment toutefois une opinion dissidente, dénonçant une instrumentalisation de la vie privée de la requérante et une curiosité « malsaine » du public. (CEDH, 11-09-2025, req. n° 28473/22, Charki c. France

Inconstitutionnalité du maintien en rétention pendant 24h d’un étranger malgré une décision de remise en liberté

Par une décision du 12 septembre 2025, le Conseil constitutionnel a censuré les mots « vingt-quatre heures » figurant à l’article L. 743-19 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), dans sa rédaction résultant de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 relative à l’immigration. Ce texte permet au ministère public de maintenir un étranger à la disposition de la justice pendant 24 heures après qu’un magistrat du siège a ordonné sa remise en liberté.

Les Sages estiment qu’une telle faculté porte une atteinte excessive à la liberté individuelle, en méconnaissance de l’article 66 de la Constitution, dès lors qu’aucun magistrat du siège n’est appelé à se prononcer sur le bien-fondé d’une telle mesure. 

Soucieux toutefois de préserver l’efficacité du recours suspensif du ministère public en cas de menace pour l’ordre public ou d’absence de garanties de représentation, le Conseil reporte l’abrogation de ces dispositions au 1er octobre 2026. D’ici là, le maintien de l’étranger ne pourra excéder six heures à compter de la notification de l’ordonnance au procureur de la République, durée prévue par la loi du 16 juin 2011 dont le Conseil constitutionnel a jugé, par sa décision du 9 juin 2011, qu’elle ne méconnaît pas la Constitution. (Cons. const. 12-09-2025, n° 2025-1158 QPC)

Validité de la notification différée des droits en garde à vue en cas d'ébriété avancée

La seule référence à des taux d'alcoolémie est suffisante à caractériser l'incapacité de la personne en garde à vue à comprendre la portée de la notification de ses droits, constitutive d'une circonstance insurmontable ayant pu retarder leur notification, lorsque ces taux caractérisent l'imprégnation alcoolique de l'intéressé au sens de l'article R. 234-1 du code de la route. (Crim. 17-09-2025, n° 25-80.555, F-B)

Peine et exécution des peines

Précisions sur les récidives douanière et pénale 

La récidive de l’article 370 du code des douanes ne s'applique qu'aux amendes douanières prévues pour les infractions instituées par ce code. Lorsque des peines d'emprisonnement répriment les infractions douanières, elles sont soumises aux règles applicables à la récidive de droit commun et peuvent donc être aggravées dans les conditions prévues par les articles 132-9 et 132-10 du code pénal. (Crim. 10-09-2025, n° 24-82.155, F-B) 

Application de la confiscation en cas d’infraction douanière 

Lorsque seule une infraction douanière est en cause, l’article 131-21 du code pénal permettant la confiscation de l’instrument de l’infraction n’est pas applicable. Le juge doit justifier sa décision de confiscation au regard de l’article 414 du code des douanes, qui permet notamment la confiscation des biens ayant servi de moyen de transport pour commettre l’infraction (véhicules) ou d’objet servant à masquer la fraude (clé de sécurité). (Crim. 10-09-2025, n° 24-82.155, F-B, préc.) 

Exécution du TIG : l’emprisonnement peut être ordonné avant l’expiration du délai imparti

La chambre criminelle confirme qu’en cas d’inexécution de la peine de travail d’intérêt général (TIG), le juge de l’application des peines peut mettre à exécution la peine d’emprisonnement encourue, même si le délai de dix-huit mois accordé n’est pas encore écoulé.

En effet, la conversion de peine substitue le TIG à la peine d’emprisonnement dans toutes ses modalités, incluant le respect des obligations de contrôle prévues par l’article 132-44 du code pénal. Dès lors, l’inexécution ou le manquement à ces modalités et à ces obligations justifie la mise à exécution de la durée de l’emprisonnement initialement prononcée.

En l’espèce, un condamné avait vu sa peine de cinq mois d’emprisonnement convertie en un TIG de 175 heures à exécuter dans un délai de dix-huit mois. Toutefois, constatant son attitude inadaptée sur son poste de travail, puis son départ à l’étranger pendant plus de trois mois, et en conséquence le non-respect des obligations qui lui incombaient, le juge avait ordonné la mise à exécution de quatre mois d’emprisonnement, décision confirmée en appel. La Cour de cassation valide cette solution et rejette le pourvoi. (Crim. 17-09-2025, n° 24-86.127, F-B)

Pour aller plus loin : voir la revue AJ pénal

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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