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Le décès comme point de départ de la prescription de la demande judiciaire en délivrance de legs

Le délai de prescription de l’action en délivrance de legs court à compter de la date d’ouverture de la succession, et non du prononcé de l’arrêt de la Cour de cassation qui met fin au litige sur la contestation du titre de légataire universel par l’héritier réservataire.

Cass. 1e civ. 30-9-2020 n° 19-11.543 FS-PB


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Au décès d’un homme, deux femmes voient leurs interêts entrer en conflit. La première, sa fille, conteste les droits successoraux de la seconde, instituée légataire universelle par son défunt père. Un premier litige naît de la demande en annulation des testaments par l’héritière réservataire, prenant fin à la suite d’un arrêt rendu par la Haute Juridiction en faveur de la légataire universelle (Cass. 1e civ. 15-12-2010 n° 09-66.870 F-D). Une fois la validité de son titre reconnue, cette dernière assigne l’héritière en ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l’indivision existant entre elles et sollicite la délivrance de son legs. La cour d’appel déclare recevable l’action en délivrance de legs universel, ce que conteste la réservataire, considérant que la prescription lui est acquise. Le juge d’appel relève en effet que la légataire universelle ne pouvait agir judiciairement en délivrance de son legs tant que son titre n’était pas définitivement établi, soit lors du prononcé de l’arrêt sur ce litige, le 15 décembre 2010.

La Cour de cassation infirme cette analyse au visa des articles 1004 et 2234 du Code civil. Le délai de l’action en délivrance de legs, qui avait commencé à courir à compter du décès, n’a pas été suspendu par l’action en nullité des testaments engagée par l’héritière réservataire.

A noter : Précision attendue et utile sur le point de départ de la prescription de l’action en délivrance de legs constitué par le décès. Si, sur le plan civil, la contestation du titre de légataire universel ne suspend pas le délai de prescription de l’action en délivrance de legs, l’on peut noter que le droit fiscal s’avère plus clément s’agissant des obligations déclaratives du successible. Jurisprudence et doctrine administrative s’accordent en effet sur un report du délai de six mois pour déposer une déclaration de succession (CGI art. 641) à la date de la décision tranchant la contestation de manière définitive. L’action en contestation doit avoir été introduite dans les six mois du décès (Cass. com. 5-3-1991 n° 89-18.298 : Bull. civ. IV n° 97 ; BOI-ENR-DMTG-10-60-50 n° 50). Cette tolérance fiscale est écartée chaque fois que le légataire universel cumule cette qualité avec celle d’héritier ou de conjoint survivant (BOI-ENR-DMTG-10-60-50 n° 60).

Précision incomplète, la question du délai de prescription applicable à cette action à la suite des réformes des successions et libéralités (Loi 2006-728 du 23-6-2006) et de la prescription (Loi 2008-561 du 17-6-2008) restant sans réponse jurisprudentielle. S’agit-il du délai de 5 ans, devenu celui de droit commun des actions personnelles ou mobilières (C. civ. art. 2224) (en ce sens, M. Grimaldi : Droit des successions LexisNexis 7e éd. 2017 n° 436 ; P. Malaurie et C. Brenner : Droit des successions et des libéralités Lextenso 9e éd. 2020 n° 419), du délai de 10 ans, dans lequel est désormais enfermé l’exercice de l’option successorale (C. civ. art. 780) (en ce sens, Dalloz action Droit patrimonial de la famille 2018/2019, dir. M. Grimaldi, n° 246.16 par C. Vernières) ou encore de celui de 30 ans, chaque fois que le legs porterait sur un immeuble (C. civ. art. 2227) (voir Rép. proc. civ. Dalloz, v. Recueil de la succession par V. Egéa, n° 134 citant C. Jubault) ? La question reste ouverte…

Mais dans cette affaire, le décès étant intervenu avant l’entrée en vigueur de la réforme de 2006 alors que l’action était exercée après celle de 2008, il s’agissait de déterminer l’incidence de la réforme de 2008 sur le délai de prescription de l’action en délivrance de legs, alors trentenaire selon la Cour de cassation, à défaut de texte particulier (Cass. 1e civ. 22-10-1975 n° 74-11.694 : Bull. civ. I n° 293, à propos d’un legs particulier ; Cass. 1e civ. 28-1-1997 n° 95-13.835 : Bull. civ. I n° 37, à propos d’un legs à titre universel). Ce délai trentenaire appliqué par la jurisprudence était-il celui de l’option successorale ? Dans l’affirmative, la solution serait désormais connue : pour les successions ouvertes avant le 1er janvier 2007, la réforme de la prescription est sans incidence sur l’ancien délai pour opter, de 30 ans à compter du décès (Cass. 1e civ. 12-2-2020 n° 19-11-668 F-D : SNH 10/20 inf. 4, RTD civ. 2020 p. 436 obs. M. Grimaldi). Mais rien n’est moins sûr !

Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Successions Libéralités n° 16990

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