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Une demande d’exécution d’une garantie de passif recevable malgré le défaut d'information du garant

Le non-respect du délai dans lequel le bénéficiaire d’une garantie de passif doit informer le garant des réclamations des tiers contre la société dont le passif est garanti n’entraîne pas la déchéance de cette garantie si la convention ne prévoit pas expressément cette sanction.

CA Paris 9-1-2020 n° 18/22848


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Dans le cadre de la cession de la majorité des actions d’une société, les cédants s’engagent envers l’acquéreur à prendre en charge les conséquences liées à l’apparition de tout passif social nouveau ayant une cause antérieure à la cession (garantie de passif).

La convention de garantie prévoit la clause suivante (art. 5.6), intitulée « procédure d’indemnisation » :

« Dans l'hypothèse où [l’acquéreur] viendrait à avoir connaissance qu'un tiers (…) a intenté une procédure judiciaire (…) ou une réclamation à l'encontre de la société (…), il devra notifier par lettre recommandée avec avis de réception aux [cédants] ladite [contestation du tiers] dans un délai de soixante (60) jours calendaires à compter de la date à laquelle [il] aura été informé de [cette contestation] (…). La notification, accompagnée des pièces justificatives disponibles, devra comporter le cas échéant, et dans la mesure du possible, à titre provisionnel, une estimation du montant du dommage (…). La société ne pourra transiger dans le cadre d'une [contestation] d'un tiers sans l'accord préalable des [cédants et de l’acquéreur]. »

L’acquéreur ayant présenté aux cédants plusieurs demandes d’indemnisation sans informer les cédants dans ce délai de 60 jours, ceux-ci lui opposent l’irrecevabilité des demandes et invoquent la déchéance de la garantie.

La cour d’appel de Paris juge au contraire ces demandes recevables après avoir rappelé que, en l'absence de clause expresse sanctionnant par la déchéance du droit à garantie le défaut de respect par l’acquéreur de la procédure d'indemnisation, la détermination de la sanction relève du pouvoir souverain d'appréciation par le juge du fond de la commune intention des parties et de la portée des clauses de la convention de garantie.

Si, en l'espèce, la convention de garantie précisait les modalités de mise en œuvre de la garantie, et notamment le délai de notification de la contestation du tiers par l’acquéreur, elle ne prévoyait pas de sanction au cas où ces modalités ne seraient pas respectées.

En outre, la clause relative à la durée de la garantie (« [les cédants] ne seront tenus de payer un dommage ouvrant droit à réduction de prix que si [l’acquéreur] leur a notifié ce dommage conformément à l'article 5.6 ci-dessous ») ne permettait pas de déduire que les dommages n’étaient indemnisés que s'ils avaient fait l’objet d’une notification dans le délai mentionné à l'article 5.6. Le renvoi à cet article signifiait seulement que la demande devait être présentée dans la forme prévue par celui-ci et avant l'expiration de la durée de la garantie.

Il ressort même de l'article 12 de la convention (« sauf stipulation contraire (…), ni le défaut d'exercice, ni le retard dans l'exercice d'un droit au titre de la garantie (…) ne pourra être interprété comme une renonciation par la partie concernée à l'exercice de ce droit ») que les droits des parties étaient préservés même si elles les exerçaient tardivement, pendant la durée de la garantie, dès lors qu'elles n'y avaient pas renoncé expressément, ce qui était le cas en l'espèce.

Le délai de 60 jours fixé par l'article 5.6 précité ne constituait donc pas, au regard des autres dispositions de la convention, une condition de mise en œuvre de la garantie. Assorti de l'obligation de joindre à la notification les pièces justificatives du dommage et de l'interdiction de transiger sans l'accord des cédants, il avait pour objet de permettre à ceux-ci de défendre leurs intérêts en temps utile et d'être, le cas échéant, associés à la défense des intérêts de la société.

Le fait de ne pas avoir respecté ce délai ne pouvait donc donner lieu qu’à des dommages-intérêts destinés à réparer le préjudice subi par les cédants pour ce non-respect. En l’espèce, la cour n’a retenu l’existence d’aucun préjudice de cette nature.

A noter : Rappel du principe selon lequel, à défaut de clause sanctionnant expressément le défaut d'information du cédant par la déchéance de la garantie, le juge du fond apprécie souverainement si celle-ci est encourue par l'acquéreur du seul fait de l'inexécution de son obligation (Cass. com. 9-6-2009 n° 08-17.843 : RJDA 8-9/09 n° 752 ; Cass. com. 25-1-2017 n° 15-17.137 F-D : RJDA 4/17 n° 255).

En l'absence de clause de déchéance, une majorité de juges du fond ne prononcent de sanctions (déchéance totale ou partielle de la garantie ou, comme en l'espèce, octroi de dommages-intérêts) que si le défaut ou le retard d'information a causé un préjudice au cédant en l'empêchant de participer effectivement à la défense de la société (par exemple, CA Paris 6-12-2002 n° 01-12401 : RJDA 6/03 n° 603).

Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Sociétés commerciales n° 17875 

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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