Une société propriétaire d'un fonds de commerce de supermarché et locataire-gérante d'un fonds de commerce de station-service dépendant du même ensemble immobilier doit cesser l'exploitation de ce premier fonds à la suite d'un congé avec refus de renouvellement délivré par le bailleur des locaux. Se prévalant de la cessation de cette exploitation, un associé demande la dissolution de la société.
Demande acceptée car la cessation définitive de l'exploitation du fonds de commerce alimentaire a eu pour conséquence l'extinction de l'objet social impliquant de plein droit la dissolution de la société.
En effet, les statuts définissent l'objet social comme suit : « l'acquisition et l'exploitation d'un fonds de commerce de vente de type supermarché à [Ville, adresse et enseigne] à l'exclusion de tout autre. Et plus généralement, toutes opérations financières, civiles et commerciales se rattachant à l'objet sus-indiqué ». Il est donc exclusivement cantonné à l'exploitation d'un fonds de commerce alimentaire et l'exploitation d'une station-service ne pouvait pas s'y rattacher.
A noter : Il y a extinction de l'objet lorsque l'activité pour laquelle la société a été constituée est devenue impossible.
En l'espèce, le rédacteur des statuts, après avoir limité l'objet social à la seule exploitation d'un supermarché à une adresse déterminée, avait tenté de donner un cadre relativement large à l'activité de la société en ajoutant la mention que l'on retrouve dans bon nombre de statuts : « Et plus généralement, toutes opérations financières, civiles et commerciales se rattachant à l'objet sus-indiqué ». Cependant, cette précision a été considérée comme n'ayant aucune utilité en raison de l'exclusivité d'exploitation du supermarché à l'adresse indiquée prévue par la clause relative à l'objet.
Ce problème de rédaction de l'objet social n'est pas sans conséquence puisqu'en application de l'article 1844-7, 2° du Code civil, l'extinction de l'objet entraîne la dissolution de la société. Cette dissolution intervient de plein droit et les associés n'ont pas à se prononcer sur son bien-fondé ; il leur appartient seulement de tirer les conséquences de cette dissolution et de mettre en œuvre la liquidation de la société. Ils ne peuvent pas obtenir en justice un délai pour régulariser la situation en modifiant l'objet social (Cass. com. 3-5-1995 n° 92-18.000 : Bull. Joly 1995 p. 746 note Barbièri).
Rappelons que si l'extinction n'avait été que partielle (possibilité par exemple de continuer d'exercer l'activité de station-service ou celle de supermarché à une autre adresse), la société aurait pu subsister.
En pratique : cette décision donne l'occasion de rappeler aux fondateurs d'une société qu'ils doivent apporter une attention particulière à la formulation de l'objet social et veiller à modifier les statuts si la société envisage d'exercer de nouvelles activités non comprises dans cet objet.