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Accueil/ Actualités - La Quotidienne/ Immobilier/ Copropriété et autres modes d'organisation de l'immeuble

Immatriculation du syndicat des copropriétaires : une réforme, des réformes à parfaire !

Depuis le 1er janvier 2017, les immeubles à destination au moins partielle d’habitation soumis au statut de la copropriété sont progressivement soumis à l'obligation d'immatriculation dans un registre spécial. Au premier rang des professionnels concernés par cette réforme, les notaires. Béatrice Balivet fait le point sur cette question.


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1. Créé par la loi 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (Alur), le registre d’immatriculation des syndicats de copropriétaires est ouvert depuis le 1er janvier 2017. Le délai entre la promulgation du texte et son entrée en vigueur s’explique par la volonté de mettre en place un registre complètement dématérialisé. Afin de mieux connaître le parc de plus de 8 millions de logements regroupés dans plus d’un million de copropriétés, le Code de la construction et de l’habitation a ainsi été enrichi d’un livre VII dont le premier titre porte sur l’identification des immeubles relevant du statut de la copropriété et d’un chapitre unique relatif à l’immatriculation des syndicats de copropriétaires (CCH art. L 711-1 s.).

2. Sans incidence sur l’acquisition ou la perte de la personnalité juridique du syndicat de copropriétaires, l’immatriculation permet de passer de l’individuel au collectif et d’une approche ciblée sur le logement à une approche globale du bâti dans lequel s’insère le logement. Jusqu’à ces derniers mois, même si la pratique avait pu mettre en place ses propres outils, la plupart des instruments d’information renseignait sur le seul logement, à l’instar de l’Enquête Nationale Logement qui est réalisée tous les 4 ou 5 ans par l’Insee par sondage et le fichier des logements par communes (Filocom), lequel est construit par recoupement des fichiers fiscaux. Si ce nouvel outil s’inscrit dans une logique d’identification des copropriétés et d’une meilleure connaissance de leurs caractéristiques, en particulier par les acteurs publics, pour anticiper, prévenir les difficultés des copropriétés, voire des copropriétés dégradées, il peut avoir d’autres intérêts, exprimés ou latents dès l’étude d’impact de la loi Alur :

- faciliter les liens entre les professionnels de l’immobilier, notamment entre les notaires et les syndics à l’occasion de la vente du lot de copropriété ;

- permettre d’établir des comparatifs entre les copropriétés sur les niveaux de dépenses de charges courantes et de travaux ;

- identifier l’état énergétique des copropriétés.

Comme le soulignait M. Braye, alors Président de l’Anah, dans son rapport de 2012 intitulé « Prévenir et guérir les difficultés des copropriétés », l’immatriculation permet enfin de « reconnaître la copropriété comme une entité à part entière » et de sécuriser le syndicat dans ses démarches commerciales, administratives et judiciaires.

Le notaire, acteur et garant de l'immatriculation

3. Depuis le 1er janvier 2017, le notaire est investi de deux nouvelles missions. D’abord, pour toutes les mises en copropriété, le notaire effectuant la publication de l’état descriptif de division et du règlement de copropriété doit désormais procéder à la déclaration d’immatriculation de la copropriété auprès de l’Anah, teneur du registre. Ensuite, pour toutes les copropriétés anciennes, et au fur et à mesure de l’entrée en vigueur de la loi de 2014, le notaire a une mission de contrôle s’exerçant au moment de la vente d’un lot de copropriété. Il doit mentionner le numéro d’immatriculation de la copropriété dans tout acte authentique de vente. Lorsque le syndic à qui incombe la déclaration d’immatriculation pour toutes les copropriétés existantes au 31 décembre 2016 a été défaillant, soit qu’il n’a pas immatriculé la copropriété, soit qu’il n’a pas transmis à l’Anah les informations prévues à l’article L 711-2 du Code de la construction et de l’habitation, toute personne intéressée ou copropriétaire peut mettre en demeure le syndic, s’il en existe un, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, d’y procéder ou de régulariser la situation. En cas de mise en demeure restée infructueuse pendant un mois, l’Anah peut appliquer une astreinte à l’encontre du syndic, ne pouvant excéder 20 euros par lot et par semaine, à compter de la fin de la mise en demeure et jusqu’à la complète transmission ou actualisation des données. Au moment de la vente d’un lot de copropriété, en l’absence de syndic désigné ou lorsque la mise en demeure est restée sans effet au terme d’un délai d’un mois, le notaire chargé de l’établissement de l’acte de vente ne peut instrumenter sans le numéro de registre. Il doit alors procéder d’office à l’immatriculation. Il reportera les frais engendrés par cette déclaration sur le syndic ou sur le syndicat, si le syndic n’est pas rémunéré pour l’exercice de son mandat. Par ailleurs, le notaire doit informer l’Anah de toute erreur qu’il constate dans le registre.

Des incertitudes persistantes sur l'entrée en vigueur du texte

4. Il est regrettable en termes de sécurité juridique de constater l’imprécision persistante du droit transitoire en la matière. Il résulte du texte de 2014 (Loi 2014-366 du 24-3-2014 art. 53) que l’obligation d’immatriculation s’applique avant :

- le 31 décembre 2016 pour les syndicats de plus de 200 lots dans les immeubles à destination au moins partielle d’habitation et les mises en copropriété, quel que soit le nombre de lots ;

- le 31 décembre 2017, pour les copropriétés de plus de 50 lots ;

- le 31 décembre 2018, pour toutes les autres copropriétés.

Les professionnels de l’immobilier avaient immédiatement mis en avant la difficulté d’interprétation de la formule retenue. Si 200 lots semblent faire référence à des copropriétés de grande taille, tout dépend en réalité des lots concernés. En comptabilisant les garages, caves et autres lots annexes, un nombre plus important de copropriétés pouvait être concerné. Il aura fallu attendre la loi 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté pour qu’un élément de clarification soit apporté. Les 200 lots s’entendent de lots « à usage de logements, de bureaux ou de commerces ». Cette modification appelle une remarque et deux regrets. Contrairement aux propos du législateur de 2017 indiquant que la précision était sous-entendue, cette clarification est la bienvenue car l’interprète-praticien ne peut pas distinguer là où la loi ne distingue pas. On peut regretter cependant le choix de la formule énonciative plutôt qu’une formulation générique. La référence a un lot principal aurait été sans doute meilleure, en ce qu’elle aurait permis d’englober l’ensemble des lots, quelle que soit leur affectation. Par ailleurs, la précision a été apportée 2 ans et 10 mois après la loi Alur et près d’un mois après l’entrée en vigueur du texte ! L’occasion aurait pu être saisie d’étendre cette interprétation aux autres hypothèses, en particulier aux syndicats de 50 lots, pour éviter de nouvelles discussions fin 2017, voire début 2018. Tel n’a pas été le cas. Devront donc être comptabilisés l’ensemble des lots, principaux et annexes, pour déterminer la prochaine étape d’entrée en vigueur du texte. Beaucoup de copropriétés seront donc concernées. Il faut faire confiance aux praticiens, en l’occurrence les syndics, qui se sont emparés du sujet de l’immatriculation sans attentisme par rapport au délai octroyé pour que ces difficultés, qui posent à l’évidence la question de l’art de légiférer en France, soient sans conséquence en pratique. Les notaires seront attentifs à ce point dès le début 2018 dans le cadre des actes de vente.

Le notaire et son obligation d'information

5. Alors que le registre est un instrument potentiellement intéressant pour permettre aux notaires de renseigner au mieux les candidats à l’acquisition d’un lot de copropriété et pour faciliter les liens avec le syndic en cas de vente d’un lot, le décret 2016-1167 du 26 août 2016 relatif au registre national d’immatriculation des syndicats de copropriétaires n’a pas manqué de surprendre. En effet, il n’y était prévu, pour les notaires, qu’un accès restreint aux informations mentionnées au 1° du II de l’article L 711-2 du Code de la construction et de l’habitation, soit relativement peu d’éléments : « Le nom, l’adresse, la date de création du syndicat, le nombre et la nature des lots qui composent la copropriété, ainsi que, le cas échéant, le nom du syndic. » Depuis la loi 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté, le notaire a accès à tous les éléments d’information du registre : « Pour faciliter l’information des acquéreurs de lots de copropriété et accomplir la mission qui leur est confiée en application de l’article L 711-5, les notaires ont accès à l’ensemble des données du registre (…) » (CCH art. L 711-3, al. 2).

L’exercice du devoir d’information du notaire à l’égard des candidats à l’acquisition d’un lot de copropriété est ainsi facilité sur les caractéristiques financières des copropriétés : grandes masses du budget, situation des dettes, situation des impayés (à l’exception des petites copropriétés de moins de 10 lots à usage de logements et dont le budget prévisionnel annuel est inférieur à 15 000 €, qui font l’objet, dans la loi de 1965, d’un assouplissement de leurs règles comptables), caractéristiques techniques des copropriétés : structure et composition des bâtiments de la copropriété, caractéristiques du bâti, des équipements communs, etc. (le cas échéant, données essentielles du carnet d’entretien et du diagnostic techniques global), ainsi que sur les procédures administratives ou judiciaires dont le syndicat fait l’objet (administration provisoire, procédure de carence, plan de sauvegarde). Aucun décret n’est en revanche annoncé pour réformer la partie réglementaire du Code de la construction et de l’habitation en conséquence, en particulier l’article R 711-16 de ce Code.

On peut également regretter que le potentiel du numérique n’ait pas été utilisé à plein lors de la mise en place de cet outil. À quand une utilisation du numérique au service des professions et de la sécurité, pour que le candidat à l’acquisition prennent connaissance des éléments d’information sans transfert ? Les professionnels pourraient alors se concentrer sur le fond et non sur la forme sans risque d’une perte de données pour des documents mis sur clé usb ou autres.

Il convient enfin de rappeler les effets d’une absence d’immatriculation. Tant qu’ils ne sont pas immatriculés au registre et que les données y figurant ne sont pas actualisées, les syndicats de copropriétaires ne peuvent pas bénéficier de subventions de l’Etat, de ses établissements publics, des collectivités territoriales, de leurs groupements ou de leurs établissements publics.

Par Béatrice BALIVET, Directeur du Master 2 Droit immobilier, Faculté de droit - Université Jean Moulin Lyon 3

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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