Votre métier
icone de recherche
icone de recherche
logo
Accueil/ Actualités - La Quotidienne/ Affaires/ Baux

Le lissage du déplafonnement du loyer commercial issu de la loi Pinel est constitutionnel

Le Conseil constitutionnel valide le mécanisme de lissage du déplafonnement du loyer commercial, créé par la loi Pinel du 18 juin 2014, et il rappelle que les parties peuvent l'écarter.

Cons. const. 7-5-2020 n° 2020-837 QPC


QUOTI20200520UNEAffairtes_fl45b1b9ef663c90d8393d8927e3d4c3cc.jpg

Le montant du loyer d’un bail commercial renouvelé est plafonné en fonction de la variation d’un indice de référence, sauf si les éléments pris en compte pour la fixation de la valeur locative (dont les caractéristiques du local et les facteurs locaux de commercialité) ont subi une modification notable. Dans ce cas, le nouveau loyer est porté au montant de la valeur locative qui en résulte alors même que ce montant dépasse le plafond de hausse autorisé  (C. com. art. L 145-33 et L 145-34).

Dans sa rédaction issue de la loi 2014-626 du 18 juin 2014 (loi Pinel), l’article L 145-34, dernier alinéa prévoit cependant un mécanisme de lissage de ce déplafonnement aux termes duquel la hausse de loyer qui en résulte ne peut pas conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10 % du loyer acquitté au cours de l’année précédente.

Saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur cette disposition (Cass. 3e civ. QPC 6-2-2020 n° 19-19.503 FS-PB : BRDA 6/20 inf. 14), le Conseil constitutionnel juge qu'elle ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de propriété protégé par l'article 2 de la Déclaration des droits de l'Homme de 1789, dès lors que : 

- en adoptant ces dispositions, le législateur a entendu éviter que le loyer de renouvellement d'un bail commercial connaisse une hausse importante et brutale de nature à compromettre la viabilité des entreprises commerciales et artisanales, poursuivant ainsi un objectif d'intérêt général ;

- le texte critiqué permet au bailleur de bénéficier chaque année d'une augmentation de 10 % du loyer de l'année précédente jusqu'à ce qu'il atteigne, le cas échéant, la nouvelle valeur locative ; 

- les dispositions contestées n'étant pas d'ordre public, les parties peuvent convenir de ne pas les appliquer, soit au moment de la conclusion du bail initial, soit au moment de son renouvellement. 

A noter : 1. La limitation de l’augmentation de loyer issue d’un déplafonnement à 10 % du loyer acquitté l’année précédente est susceptible d’engendrer un décrochage entre la valeur locative et le montant du loyer. Or, le droit au bail étant d’autant plus élevé que le loyer est bas, ce plafonnement risque de conduire à une augmentation significative du droit au bail, entraînant un transfert de la valeur économique au profit du locataire, puisque le bailleur ne pourra refuser le renouvellement du bail qu’en lui versant une indemnité d’éviction, elle-même calculée en tenant compte de la valeur du droit au bail. 

Tels étaient les arguments qui avaient été soulevés au soutien de la demande de QPC devant la Cour de cassation. Pour le Conseil constitutionnel, l'atteinte ainsi portée au droit de propriété du bailleur par ces dispositions n'est cependant pas disproportionnée au regard du but poursuivi par le législateur. 

2. La possibilité d'écarter conventionnellement le mécanisme de lissage du déplafonnement avait déjà été retenue par la Cour de cassation (Cass. 3e civ. avis 9-3-2018 no 17-70.040 PB  : BRDA 8/18 inf. 15). Il est vrai que l'article L 145-34 du Code de commerce n'est pas visé au rang des dispositions d'ordre public mentionnées à l'article L 145-15 du même Code.

Maya VANDEVELDE

Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Baux commerciaux n° 55200

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne