Adoptée selon la procédure d'urgence, dans un délai relativement bref nonobstant une pause estivale inattendue, la loi 2025-1129 du 26 novembre 2025, dite loi « Huwart », vise à « simplifier les procédures d'urbanisme pour baisser les coûts de construction » selon le Premier ministre, Sébastien Lecornu. Publiée au JO du 27 novembre, elle apporte souplesse et modernisation dans des procédures PLU et SCOT jugées complexes, chronophages et coûteuses. Pour Valérie Létard, ancienne ministre du logement, il s'agit « d'une simplification majeure des procédures liées aux documents d'urbanisme » qui limite la révision aux évolutions structurantes du PLU et du SCOT. Reprenant certaines mesures du Roquelaure de la simplification ouvert en avril 2025 par le ministre de l’aménagement du territoire, François Rebsamen, la loi réduit le nombre de procédures d'évolution de ces documents, redistribue les champs d'application de la révision et de la modification et permet de remplacer l'enquête publique par une participation du public par voie électronique (PPVE).
Ces modifications procédurales entreront en vigueur le 26 mai 2026, soit 6 mois après la promulgation de la loi. Elles profiteront donc aux nouvelles équipes municipales qui, dès 2026, pourront modifier plus facilement leur PLU. En revanche, ces mesures ne s’appliquent pas aux procédures d’évolution des PLU et des SCOT en cours, qui seront donc menées à terme selon les anciennes modalités (Loi 2025-1129 du 26-11-2025, art. 1er, VI).
D'autres mesures, comme le rétablissement du document d'urbanisme unique valant SCOT et PLUi, nécessitent un décret d'application.
Remarque : le Conseil Constitutionnel a censuré de nombreuses dispositions de ce texte, considérées comme des cavaliers législatifs, ainsi que la mesure qui subordonnait le droit de recours contre un document d'urbanisme à une participation préalable à la consultation du public. Il a, en revanche, validé le durcissement des conditions permettant d'invoquer, par voie d'exception, l’illégalité du document d'urbanisme pour vice de forme ou de procédure (abrogation de l'article L 600-1 du Code de l'urbanisme au bénéfice de l'application du droit commun en la matière).
1. Des procédures PLU moins nombreuses et plus souples
Réduction des procédures de modification et de révision
Les procédures PLU subissent un véritable lifting. La loi réduit la palette de procédures disponibles pour les faire évoluer, en supprimant du code de l'urbanisme les dispositions relatives à deux d’entre elles :
- la révision allégée, qui permet d’accélérer la procédure grâce à l’organisation d’un examen conjoint du projet de PLU ou PLUi ;
- la modification simplifiée, sans enquête publique. Initialement réservée à la rectification d'erreurs matérielles et aux modifications portant sur des éléments mineurs, son champ d’application a progressivement été élargi (insertion des objectifs de réduction de la consommation d’ENAF, développement de la production d’énergies renouvelables, majoration du volume constructible des logements, servitude de résidence principale, etc.) complexifiant la règlementation.
Pour autant, la modification simplifiée ne disparaît pas vraiment, elle est fusionnée avec la modification. En effet, les collectivités auront désormais un choix plus restreint de procédures, la révision générale ou la modification, mais cette dernière devient une procédure à géométrie variable qui ne comporte plus nécessairement une enquête publique et revêt dans certains cas les atours d'une modification simplifiée.
Remarque : les procédures de mise en compatibilité et les procédures intégrées sont maintenues.
Redistribution des champs de la révision et de la modification
Aux termes du nouvel article L 153-31 du Code de l’urbanisme, à compter du 26 mai 2026, il conviendra d’engager une procédure de révision lorsque l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) ou la commune décidera de changer les orientations définies par le projet d’aménagement et de développement durables (PADD), excepté dans les cas expressément prévus par la loi (qui relèvent actuellement de la modification simplifiée).
Le champ d'application de la modification s'en trouve de ce fait élargi (C. urb. art. L 153-36). Sous réserve des cas où une révision s’imposera en application de l’article L 153‑31, le PLU devra faire l’objet de la procédure de modification prévue aux articles L 153‑37 à L 153‑44. Les changements dans les orientations du PADD relèveront également de la modification et non de la révision, lorsqu'ils auront pour objet :
- de soutenir le développement de la production d’énergie renouvelable, d’hydrogène renouvelable ou bas‑carbone, ou du stockage d’électricité ou d’identifier des zones d’accélération pour l’implantation d’installations terrestres de production d’énergies renouvelables ;
- de délimiter les secteurs dans lesquels les constructions nouvelles de logements ou les logements issus de la transformation de bâtiments à destination autre que d’habitation sont à usage exclusif de résidence principale (servitude dite « de résidence principale ») ;
- l’intégration des objectifs de sobriété foncière, en application de la loi Climat et résilience. Elle peut être effectuée selon la procédure de modification simplifiée et relèvera logiquement de la modification prévue aux articles L 153-36 à L 153-44 ;
- la délimitation des secteurs dans lesquels l'implantation d'éoliennes est soumise à conditions en application de l’article L. 151-42-1 du code de l’urbanisme.
La loi prévoit un autre cas dérogatoire, à la main des collectivités. Pourront ainsi faire l’objet d’une modification, si l’autorité compétente le décide, les changements des orientations du PADD ayant pour objet de délimiter les zones d’exposition au recul du trait de côte (C. urb. art. L 153-36, al. 5 modifié).
Enquête publique optionnelle, PPVE ou simple mise à disposition du public
La loi du 26 novembre 2025 ouvre la possibilité, dans le cadre des procédures d'élaboration et de révision des documents d'urbanisme, de substituer à l'enquête publique la participation du public par voie électronique (PPVE) prévue à l'article L 123-19 du Code de l'environnement. Le président de l’EPCI ou le maire doit prendre à cet effet une décision motivée. Le dossier soumis à la procédure de PPVE sera alors mis en consultation sur un support papier, aux horaires d’ouverture, dans les mairies concernées (C. urb. art. L 153-19, al. 2 modifié).
Cette mesure a pour but d'accélérer la procédure en supprimant des délais préparatoires d’une enquête publique (en particulier pour la désignation du commissaire enquêteur) et ceux liés à la restitution des résultats de l'enquête (dans les 30 jours).
Remarque : une PPVE pourra également être organisée, si l'autorité compétente le souhaite, pour les projets de logements, ce qui contribuera à accélérer leur réalisation (C. envir. art. L 123-2, I, 1° et C. envir. art. L 123-19-11 modifiés).
Comme pour l’élaboration et la révision, la procédure de modification bénéficiera d’une participation du public modernisée grâce au numérique. Toutefois, pour une modification, l’article L 153-41 du Code de l’urbanisme prévoit trois possibilités d’association du public :
- la mise à disposition du projet ;
- la participation du public par voie électronique (PPVE), en substitution à la mise à disposition ;
- l'enquête publique.
La rédaction de l'article L 153-41 ne laisse guère de doute sur le fait que la mise à disposition devient le principe, hors les cas où l'enquête publique ou la PPVE demeure obligatoire. Le projet de modification pourra donc faire l'objet d'une mise à disposition auprès du public lorsqu'aucune évaluation environnementale n'est requise, et seulement dans ce cas. C'est notamment le cas pour les procédures de modification de PLU ayant pour seul objet la rectification d’une erreur matérielle ainsi que pour la réduction de la surface d’une zone urbaine ou à urbaniser. Cette exclusion du champ de l'évaluation environnementale est désormais inscrite dans la loi (C.urb. art. L 104-3, al. 3 à 5 modifiés). Elle était jusqu'alors prévue par voie règlementaire, à l'article R 104-12 du Code de l'urbanisme.
Remarque : le projet ainsi mis à disposition est accompagné de l’exposé des motifs et, le cas échéant, des avis émis par les personnes publiques associées, pendant un mois, dans des conditions lui permettant de formuler ses observations (elles sont enregistrées et conservées). À l’issue de la mise à disposition, le président de l'EPCI ou le maire en présente le bilan devant l'organe délibérant qui en délibère.
Lorsque le projet de modification est soumis à une évaluation environnementale, la PPVE ou l’enquête publique est obligatoire.
Lorsqu’il est recouru à la procédure de PPVE, le dossier doit être mis en consultation sur un support papier dans les mairies concernées, aux horaires d’ouverture. Le législateur a considéré cette mesure essentielle pour se prémunir contre le risque d’exclusion de ces procédures d’une partie de la population pour cause d’illectronisme.
2. De la souplesse pour les SCOT aussi
Des assouplissements de procédures
Comme pour les PLU, le législateur simplifie et clarifie les procédures d’évolution des SCOT en supprimant la procédure de modification simplifiée (abrogation des articles L 143-37 à L 143-39). Sous réserve des cas où une révision s’impose en application de l’article L 143‑29, le SCOT fait l’objet de la procédure de modification mentionnée aux articles L 143‑33 à L 143‑36 du Code de l’urbanisme. Le champ de la procédure de révision est, là aussi, cantonné aux évolutions structurantes, touchant les orientations stratégiques définies par le projet d’aménagement stratégique (PAS), avec une exception pour les changements d’orientations ayant pour objet de soutenir le développement des énergies renouvelables qui relèveront, par dérogation, de la modification (C. urb. art. L 143-32).
De même, l’intégration des objectifs de sobriété foncière, en application de la loi Climat et résilience, qui relève actuellement de la procédure de modification simplifiée pourra être effectuée via une modification prévue aux articles L 143-32 à L 143-36.
Comme pour le PLU, l’enquête publique devient optionnelle dans les procédures SCOT. Par décision motivée, elle peut être remplacée par une participation du public par voie électronique (C. urb. art. L 143-22, al. 2). La PPVE ou l’enquête publique reste néanmoins obligatoire en cas de modification du SCOT soumise à une évaluation environnementale. Lorsqu'elle n'est pas requise, le projet peut être simplement mis à disposition du public (C. urb. art. L 143-34).
La caducité automatique supprimée
Le législateur a supprimé la caducité automatique du SCOT dès lors qu’une délibération n’a pas été prise par l’EPCI sur son maintien ou son évolution au plus tard 6 ans après son approbation, sa révision ou la décision de le maintenir. Il a maintenu l'analyse obligatoire des résultats, mais en portant le délai de 6 à 10 ans (C. urb. art. L 143-28). Retour donc au délai décennal initialement prévu par la loi SRU, lors de la création des SCOT. Ainsi, l'obligation de bilan périodique demeure, mais dans un temps plus long. Cette mesure est d'application immédiate.
3. Document d'urbanisme unique valant SCOT et PLUi
La loi ouvre la possibilité de fusionner dans un même document d’urbanisme le SCOT et le PLUi dès lors qu’ils recouvrent exactement le même périmètre. Le document d’urbanisme unique (DUU) valant SCOT et PLUi emprunte à ces deux documents. Il a, à la fois, les effets d’un SCOT et ceux d’un PLUi (C. urb. art. L 146-1 nouveau). Cette mesure a pour but de réduire les coûts tout en améliorant la cohérence entre ces documents. Selon les auteurs de l’amendement, la moitié environ des quelques 390 SCOT existants recouvre exactement le périmètre d’un EPCI. Ce n’est pas la première fois que le législateur instaure ce type de document. Cette possibilité était inscrite à l’ancien article L 144-2 du Code de l’urbanisme, elle a été abrogée par la loi relative à l’égalité et la citoyenneté du 27 janvier 2017.
Remarque : l'ancien article L 144-2 prévoyait alors que le PLU élaboré par un EPCI sans être situé dans le périmètre d'un SCOT pouvait, après accord du préfet, comprendre les dispositions d'urbanisme ressortissant à la seule compétence des SCOT. Les PLU tenant lieu de SCOT approuvés avant le 28 janvier 2017 ont été maintenus. Ils sont restés régis par les dispositions applicables aux PLU et ont continué à avoir les effets d'un SCOT.
Procédure et contenu du document unique
Le document unique est élaboré, révisé, modifié et évalué comme un PLUi. Il est soumis à une évaluation environnementale systématique, en application de l’article L 104-1 du Code de l’urbanisme. Il comprend des éléments d’un SCOT et ceux d’un PLUi, ce qui risque d’en faire un document lourd et complexe. Il comporte :
- un rapport de présentation qui justifie les choix retenus pour établir le projet d’aménagement stratégique intercommunal, les orientations d’aménagement et de programmation ainsi que le règlement, et qui comprend les éléments du rapport de présentation du PLUi (mentionnés à l’article L 151‑4) ;
- un projet d’aménagement stratégique intercommunal (PASi) qui définit les orientations et les objectifs de développement et d’aménagement du territoire à un horizon de 20 ans et qui comprend les éléments prévus, d’une part, aux articles L 141‑3 à L 141‑14, d’autre part, à l’article L 151‑5 (PADD du PLUi) ;
- des orientations d’aménagement et de programmation (OAP) du PLUi ;
- un règlement de PLUi ;
- des annexes.
La loi renvoie à un décret en Conseil d'État le soin de préciser les modalités d'application, notamment le contenu du document d'urbanisme unique, ses effets et les procédures d'élaboration, d'évolution et d'évaluation.
L'entrée en vigueur d'un DUU rendra caducs les documents d'urbanisme applicables sur le territoire.
Obligations de compatibilité
Le document unique cumule les obligations de prise en compte et de compatibilité avec les normes supérieures qui s’imposent, d'une part au SCOT, en application des articles L 131-1 et L 131-2 du Code de l’urbanisme (lois Littoral et Montagne, schémas régionaux, etc.), d'autre part au PLUi, en application des articles L 131-4 et L 131-5 du même code (compatibilité avec les schémas de mise en valeur de la mer, les plans de mobilité, les PLH, le plan climat-air-énergie territorial). Il est soumis au même régime que le PLUi en ce qui concerne l’analyse de sa compatibilité avec ces normes supérieures. La mise en compatibilité du DUU s’effectuera conformément aux articles L 153‑36 à L 153‑44 du Code de l’urbanisme (C. urb. art. L 131-7).




