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Accueil/ Actualités - La Quotidienne/ Fiscal/ Taxe sur la Valeur Ajoutée

TVA : une sélection de la jurisprudence rendue ces dernières semaines

Dans cette revue de jurisprudence, Mes Gwenael Gauthier et Philip Servajean proposent une sélection d’arrêts récents rendus en matière de TVA.


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Par Philip Servajean, avocat à la Cour, et Gwenael Gauthier, avocat chez VATIRIS Avocats

1. Une société d’investissement qui, pour couvrir les appels de marge de son compensateur,  a versé dans les comptes de celui-ci des sommes productrices d’intérêts, doit tenir compte, pour le calcul du coefficient de taxation, de ces intérêts, lesquels  indissociablement liés à l’activité de la société, ne constituent pas des produits financiers accessoires. 

2. La société, qui a refacturé à son réseau de succursales réparties sur le territoire de l’UE un ensemble de services doit, pour exercer la déduction de la taxe ayant grevé les dépenses qu’elle a engagées dans ce cadre, faire application des principes jurisprudentiels issus de l’arrêt de la CJUE du 24/01/2019 (Morgan Stanley).

04/07/2019 CAA Versailles n°16V02700 Kepler Chevreux.

1. La requérante, société d’investissement, a , pour le calcul du coefficient de taxation prévu au 3 du III de l’article 206 de l’Annexe II au CGI, exclu du dénominateur les intérêts produits par des sommes versées dans les comptes de son compensateur afin de couvrir les appels de marge liés au risque de contrepartie sur les opérations de courtage. Elle fait valoir que ces sommes, qui se sont élevées à un montant très significatif, résultent d’une situation tout à fait exceptionnelle, liée à la crise financière, laquelle a entraîné des appels de marge additionnels puis une forte contraction du volume des transactions ,les sommes n’étant que très peu affectées à la couverture d’appels de marge et produisant des intérêts très substantiels.

La Cour juge que, nonobstant ces circonstances particulières, les opérations financières en cause, indissociablement liées à l’activité de la requérante et normalement pratiquées par les organismes qui exercent celle-ci conformément à la réglementation en vigueur, en constituent le prolongement direct, permanent et nécessaire.

Ces opérations ne peuvent dès lors être regardées comme accessoires au sens du b) du 3° du 3 du III de l’article 206 précité et doivent figurer au dénominateur du rapport servant à calculer le coefficient de taxation.

2. La requérante, a refacturé à ses six succursales établies sur le territoire de l’UE, un ensemble de services d’assistance technique, humaine et matérielle.

L’administration fiscale, estimant que les refacturations étaient situées hors du champ d’application de la TVA, a remis en cause la déduction de la TVA ayant grevé la prise en charge des dépenses refacturées ; elle a cependant admis de limiter le rappel de TVA en faisant application du prorata de déduction dont disposent les succursales dans leur pays d’établissement.

La Cour, dans une situation de fait très similaire à celle du Crédit Lyonnais (voir CJUE, arrêt C-388/11 du 12/09/2013 et CE, arrêt n°301849 du 28/05/2014) fait application des principes issus de la jurisprudence récente de la CJUE (arrêt Morgan Stanley C-165/17 du 24/01/2019) et tient compte pour déterminer l’étendue du droit à déduction de la taxe ayant grevé les dépenses engagées en France par la requérante, du régime des opérations effectuées en aval par ses succursales dans leur pays d’établissement et ce en distinguant les dépenses directement affectées à ces opérations et les frais généraux qui concourent à la fois aux opérations réalisées par les succursales et par la requérante.

Le redevable qui a acquis un bâtiment en vue de sa démolition et de sa reconstruction est fondé, lors de la cession ultérieure du bien, à faire application du régime de la TVA sur la marge applicable aux livraisons de terrains à bâtir, et ce dès lors que ledit bâtiment n’était pas achevé au moment de la cession ; la circonstance que les caractéristiques physiques et la qualification juridique du bien acheté ont été modifiées avant la cession ne saurait faire obstacle à l’application de ce régime.

27/08/2019 CAA Lyon n°19LY01260 M. C.A.

Le requérant a acquis un chalet qui, après avoir été démoli et reconstruit, a été cédé sous le régime de la TVA sur la marge applicable aux livraisons de terrains à bâtir (article 268 du CGI).

L’administration fiscale a estimé que cette cession devait être soumise à la tva sur le prix de cession en soutenant, en premier lieu, qu’elle portait sur un immeuble neuf. La Cour a rejeté cette argumentation en constatant que le chalet, lors de sa cession, ne présentait pas un caractère d’habitabilité, dès lors qu’il n’était pas raccordé à l’eau, ni à l’électricité et que de nombreux éléments extérieurs et intérieurs n’étaient pas achevés, la déclaration d’achèvement n’ayant été réalisée que plus de dix mois après la cession.

L’administration fiscale, en second lieu, appliquant sa doctrine, soutenait que la cession ne pouvait en tout état de cause relever du régime de la marge prévu à l’article 268 du CGI et ce dès lors que les caractéristiques physiques et juridiques du bien acheté (chalet) avaient été modifiées avant sa cession sous la forme d’une construction inachevée (terrain à bâtir). La Cour, se référant aux dispositions de l’article 268 du CGI et de la directive 2006/112/CE, observe que l’application de la TVA sur marge aux livraisons de terrains à bâtir est subordonnée au seul fait que l’acquisition par le cédant n’a pas ouvert droit à déduction de la TVA lors de son acquisition et que la doctrine administrative ne saurait faire obstacle à l’application de ce régime.

Activité de loueur en meublé : a la qualité d’assujetti à la TVA et est en droit de récupérer la TVA grevant le coût de construction, le bailleur qui donne en location un logement à un exploitant qui lui-même offre à la clientèle un hébergement assorti de prestations para-hôtelières. Il en est ainsi même si ces prestations ne sont pas effectivement rendues. Il suffit en effet que l’exploitant dispose des moyens nécessaires pour répondre aux éventuelles demandes.

25/07/2019 CAA Bordeaux SdF B de Clercq

La société de fait B de Clercq a acquis, dans le cadre d’une VEFA, une maison située dans un centre de loisirs et de vacances. Elle a sollicité le remboursement de la TVA ayant grevé le coût de construction de cette maison en faisant valoir qu’elle était assujettie à la TVA en tant que loueur en meublé exerçant une activité professionnelle dans la para-hôtellerie. L’Administration a fait droit à sa demande. Mais dans le cadre d’une vérification de comptabilité ultérieure, elle a remis en cause la qualité d’assujetti de la société au motif que celle-ci effectuait en réalité une location nue sans fournir de services de para-hôtellerie aux occupants du logement.

La Cour énonce tout d’abord que dès lors que l’Administration avait reconnu la qualité d’assujetti de la société et lui avait accordé un remboursement de crédit de TVA elle ne pouvait remettre en cause rétroactivement ce droit à déduction qu’en cas de situation frauduleuse ou abusive.

Elle constate ensuite que même si la société louait les locaux, non pas directement à l’occupant de la maison mais à la société d’exploitation du centre de vacances afin que celle-ci fournisse, aux locataires finaux, un hébergement assorti de prestations para-hôtelières, cette location suffisait à lui conférer la qualité d’assujetti dans le cadre des dispositions de l’article 260 D du CGI.

S’agissant de la fourniture des prestations para-hôtelières, la Cour rappelle que les critères définis par la loi et la jurisprudence n’exigent pas que les prestations soient effectivement rendues mais seulement que le loueur en meublé dispose des moyens nécessaires pour répondre aux éventuelles demandes des occupants. Au cas particulier, elle énonce qu’il ne résulte pas de l’instruction que la société qui gérait le centre de vacances ne disposait pas de tels moyens.

En conséquence, elle conclut que la Société propriétaire de la maison avait bien elle-même, en qualité de bailleur, la qualité d’assujetti et était donc fondée à récupérer la TVA qui avait grevé le coût de construction de la maison.

La convention qui doit être signée entre le propriétaire ou le gestionnaire des locaux et le représentant de l’Etat dans le département pour justifier du bénéfice du taux réduit prévu au I, 8 et II de l’article 278 sexies du CGI peut être signée après le démarrage des travaux. 

18/06/2019 Tribunal administratif de Lyon, Association Mornantaise pour l’accueil de personnes handicapées.

Une association qui exploite un institut médico-éducatif (centre d’hébergement pour des mineurs ou jeunes adultes handicapés) a initié un projet de reconstruction de son établissement. Un permis de construire a été obtenu le 13 avril 2016 et l’ouverture du chantier est intervenue le 20 octobre 2016. Le 20 septembre 2017, le préfet du Rhône a été sollicité pour signer une convention pour la mise en œuvre du taux réduit prévu à l’article 278 sexies du CGI. Un projet de convention a été soumis au préfet le 26 janvier 2018. Le préfet a refusé de signer cette convention par décision du 5 avril 2018 au motif qu’en application du BOI TVA IMM 20-10-30 la convention doit être signée au plus tard avant le démarrage des travaux.

L’association a demandé l’annulation de cette décision.

Le Tribunal fait droit à la demande de l’association et prononce l’annulation de la décision du préfet. Le Tribunal constate que les dispositions de l’article 278 sexies qui conditionne le bénéfice du taux réduit de la TVA, y compris dans le cas des livraisons à soi-même, à la signature d’une convention entre le propriétaire ou le gestionnaire des locaux et le représentant de l’Etat dans le département ne prévoient pas que cette convention doit être signée avant le début des travaux pour ouvrir droit à cet avantage fiscal. Après avoir rappelé que le fait générateur de l’imposition d’une livraison à soi-même d’un immeuble neuf est constitué par la livraison de cet immeuble, laquelle intervient au plus tard à la date de délivrance du récépissé de la déclaration d’achèvement des travaux, le Tribunal juge que les conditions pour bénéficier du taux réduit doivent être remplies au plus tard à la date du fait générateur. Il en conclut que la convention doit seulement être signée avant l’achèvement des travaux.

Philip SERVAJEAN, avocat à la Cour, et Gwenael GAUTHIER, avocat chez VATIRIS Avocats

Après 19 ans passés chez CMS Bureau Francis Lefebvre, Gwenael Gauthier a participé à la création de VATIRIS Avocats. Associée en charge de la fiscalité indirecte et plus particulièrement des questions de TVA et de taxe sur les salaires, elle conseille des grands groupes industriels ou de services, mais aussi des PME et des associations (sport et évènementiel), des établissements et organismes en charge de mission de service public... Elle est membre de la Commission TVA de l’Institut des avocats conseils fiscaux et co-présidente de la Commission fiscale de l’ACE.

D’abord inspecteur des impôts, PhilipServajean a passé près de trente ans au sein de CMS Bureau Francis Lefebvre, années au cours desquelles il a fait de la TVA et de la taxe sur les salaires ses spécialités. En 2013, il reprend sa liberté et exerce désormais sa profession en indépendant.

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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