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Assurance DO avant réception : mise en demeure de l’entreprise par le maître de l’ouvrage lui-même

Sauf exception, la mise en œuvre de l’assurance DO avant réception requiert la mise en demeure préalable de l’entreprise défaillante par le maître de l’ouvrage personnellement ou, à défaut par son mandataire spécialement habilité à cet effet.

Cass. 3e civ. 7-9-2022 n° 21-21.382 FS-B, Sté Primo Levi c/ Sté MAF


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©Gettyimages

Se plaignant de désordres avant la réception des travaux, le maître de l’ouvrage notifie la résiliation du marché à l’entreprise, mise en liquidation judiciaire quelques mois après. Il demande la garantie de l’assureur dommages-ouvrage (DO), qui lui est refusée. Il invoque un manquement du maître d’œuvre, qui n’a pas mis en demeure l’entreprise avant la résiliation. Il reproche à la cour d’appel d’avoir jugé que la garantie n’est pas due car les conditions de mise en demeure du constructeur n’ont pas été respectées. Il soutient qu’il n’est pas nécessaire que la mise en demeure émane de lui, qu’elle peut émaner du maître d’œuvre et qu’elle n’était pas nécessaire car le marché a été résilié par la mise en liquidation judiciaire de l’entreprise.

Le Cour de cassation rejette son pourvoi. Le contrat du maître d’œuvre ne contenait aucun mandat exprès à l’effet de notifier une mise en demeure à l’entreprise avant résiliation du marché. La mise en demeure requise pour mettre en œuvre l’assurance DO avant réception doit émaner du maître de l’ouvrage ou de son mandataire. Il est dispensé de cette formalité quand elle est impossible ou inutile, notamment en cas de cessation d’activité ou de liquidation judiciaire de l’entreprise emportant résiliation du contrat. Ce n’était pas le cas en l’espèce, puisque le maître de l’ouvrage avait notifié la résiliation du marché plusieurs mois avant la liquidation judiciaire de l’entreprise sans mise en demeure préalable. Les conditions de mise en œuvre de l’assurance DO ne sont donc pas réunies.

A noter :

1. Le maître d’œuvre est un locateur d’ouvrage dont la mission de direction le contraint à donner les ordres de services, à vérifier la coordination des actions des différents corps de métier et, le cas échéant, à une surveillance « normale » des exécutants (Cass. 3e civ. 30-10-1978 : RDI 1979 p. 211). Il peut recevoir un mandat accessoire au louage d’ouvrage mais il doit être spécial. En l’espèce, le contrat prévoyait qu’il pouvait seulement adresser des courriers utiles aux entreprises. Sur l’interprétation souveraine des termes du contrat par les juges du fond, l’arrêt retient que le maître d’œuvre ne pouvait pas se voir reprocher une négligence pour le manquement allégué.

2. La mise en œuvre de l’assurance DO avant réception requiert la mise en demeure de l’entreprise défaillante et la résiliation du marché pour inexécution de ses obligations (C. ass. art. L 242-1). Les deux conditions sont nécessaires et cumulatives (Cass. 1e civ. 1-4-2003 : L’Argus de l’Assurance 9-5-2003 p. 41). La Cour de cassation admet toutefois, ce que rappelle l’arrêt commenté, que la mise en demeure n’est pas requise lorsqu’elle est impossible ou inutile, notamment en cas de cessation d’activité ou de liquidation judiciaire de l’entreprise emportant résiliation du marché (Cass. 3e civ. 13-2-2020 n° 19-12.281 FS-PBR : BPIM 2/20 inf. 123, RDI 2020 p. 318 obs. D. Noguero).

L’arrêt énonce, avec raison, que la mise en demeure ne peut émaner que du maître de l’ouvrage ou de son mandataire. Le maître de l’ouvrage reprochait à la cour d’appel d’avoir estimé que la mise en demeure ne pouvait émaner que de lui, laissant entendre qu’elle aurait pu émaner de son mandataire. Or, précisément, la cour d’appel, approuvée par l’arrêt commenté, a jugé qu’un tel mandat, dont la défaillance du mandataire aurait pu engager sa responsabilité, n’existait pas.

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne