Un homme marié sous le régime de la communauté légale achète un bien immobilier en propre. Le financement est assuré par un prêt, dont les échéances sont remboursées par la communauté. Lors de la liquidation du régime matrimonial après divorce, la cour d’appel le déclare redevable envers la communauté de 136 136 € au titre du remboursement des mensualités de l’emprunt, sans expliquer sur quel fondement elle était parvenue à ce montant et sans distinguer entre le capital et les intérêts.
La Cour de cassation censure l’arrêt. La communauté, à laquelle sont affectés les fruits et revenus des biens propres, doit supporter les dettes qui sont la charge de la jouissance de ces biens ; leur paiement ne donne donc pas lieu à récompense au profit de la communauté, lorsqu’il a été fait avec des fonds communs (C. civ. art. 1401, 1403, 1437 et 1469). Il s’ensuit que, pour déterminer la récompense due par un époux en cas de règlement par la communauté des échéances de l’emprunt souscrit pour l’acquisition d’un bien qui lui est propre, il y a lieu d’avoir égard à la fraction ainsi remboursée du capital, à l’exclusion des intérêts qui sont une charge de jouissance. En l’espèce, il incombait aux juges du fond de vérifier si la somme fixée correspondait au capital remboursé par la communauté, avant d’en rechercher le profit subsistant.
A noter :
Solution classique. Il est acquis que la communauté bénéficie des revenus des biens propres et doit, en contrepartie, assumer à titre définitif les dettes qui sont la charge de la jouissance de ces mêmes biens ; ainsi jugé à propos d’un emprunt souscrit pour l’acquisition d’un bien propre, les intérêts incombant à titre définitif à la communauté tandis que le remboursement du capital doit peser sur l’époux propriétaire du bien (Cass. 1e civ. 31-3-1992 no 90-17.212 : RTD civ. 1993 p. 401 s. obs. F. Lucet et B. Vareille, Defrénois 1992 art. 35348, obs. G. Champenois ; Cass. 1e civ. 24-10-2000 no 98-19.767 inédit : D. 2001 p. 2936 obs. M. Nicod, RTD civ. 2001 p. 650 obs. B. Vareille). Il s’ensuit que le règlement par la communauté des intérêts d'un tel emprunt ne donne pas lieu à récompense, parce qu’il est le « prix » de la jouissance de ce bien.