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Covid-19 et assurance pertes d'exploitation : une clause d'exclusion jugée ambiguë

Une entreprise ayant subi des pertes pendant le confinement peut faire jouer la garantie pertes d'exploitation de son contrat d'assurance sans se voir opposer par l'assureur une clause d'exclusion nécessitant une interprétation, de sorte qu'elle n'était pas formelle.

Cass. 2e civ. 25-1-2024 n° 22-14.739 F-B, Sté Helen traiteur c/ Axa France IARD


Par Maya VANDEVELDE
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©GettyImages

Une société ayant une activité de traiteur-organisateur de réception souscrit un contrat d’assurance « multirisque professionnelle » incluant une garantie pertes d’exploitation. Soutenant avoir subi des pertes de chiffre d'affaires à l'occasion du premier confinement, elle demande la mise en oeuvre de la garantie.

L’assureur s'y oppose en se prévalant notamment de la clause d'exclusion de garantie du contrat rédigée ainsi : « demeure toutefois exclue :

  • la fermeture consécutive à une fermeture collective d'établissements dans une même région ou sur le plan national,

  • lorsque la fermeture est la conséquence d'une violation volontaire à la réglementation, de la déontologie ou des usages de la profession ».

Une cour d'appel juge cette clause opposable à l'assurée aux motifs que l'absence de la conjonction de coordination « et » entre les deux cas d'exclusion démontre qu'ils ne sont pas cumulatifs, les deux situations visées étant de nature très différentes et que le seul usage du singulier pour conjuguer le verbe « demeure » ne permet pas de dire que la clause n'est pas formelle quand il peut logiquement procéder de l'examen distinct de chacune de ces deux situations. La cour relève également que la clause était mentionnée en caractères gras avec une police lisible et aérée.

La Cour de cassation censure l'arrêt : la clause d’exclusion rendue ambiguë par l'usage de la conjonction de subordination « lorsque » nécessitait interprétation, de sorte qu'elle n'était pas formelle.

A noter :

On sait que, pour être indemnisé d’un sinistre, l’assuré doit d’abord démontrer que les conditions de la garantie sont réunies ; ensuite, il appartient à l’assureur qui se prévaut d'une clause d'exclusion de garantie de prouver qu’il a porté celle-ci à la connaissance de l’assuré avant la survenance du sinistre (C. civ. art. 1353 ; Cass. 3e civ. 7-9-2011 n° 09-70.993 FS-PB ; Cass. 2e civ. 6-10-2011 n° 10-15.370 F-D).

Encore faut-il que ladite clause d’exclusion soit mentionnée en caractères très apparents (C. ass. art. L 112-4) et qu'elle soit formelle et limitée (C. ass. art. L 113-1). 

Une clause est formelle quand elle est expresse, claire et précise. Elle doit faire référence à des circonstances ou des faits déterminés, permettant à l’assuré de connaître exactement et sans ambiguïté l’étendue de sa garantie (Cass. 2e civ. 8-10-2009 n° 08-19.646 F-PB, jugeant qu’une clause ambiguë n’est pas formelle dès lors que le juge doit l’interpréter).

En jugeant ici la clause d'exclusion non formelle, la Cour de cassation fait une application classique de ces principes. 

La solution est néanmoins intéressante en ce qu'elle s'inscrit à contre-courant d'une série de décisions sévères pour les entreprises dont l'activité a cessé pendant l'épidémie de Covid-19 et qui ont tenté de faire jouer leurs garanties pertes d'exploitation (par exemple, Cass. 2e civ. 1-12-2022 n° 21-15.392 FS-BR, n° 21-19.341 FS-BR, n° 21-19.342 FS-BR et n° 21-19.343 FS-BR ; M.-J. Loyer-Lemercier, Assurance pertes d’exploitation et Covid : une clause d’exclusion de garantie jugée efficace : BRDA 2/23 inf. 24  ; Cass. 2e civ. 12-10-2023 n° 22-13.759 FS-B : BRDA 23/23 inf. 11).  

Les contrats en cause dans ces affaires n'étaient cependant pas les mêmes, de sorte qu'il n'est pas possible d'en déduire une quelconque orientation de la jurisprudence.

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© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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