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Accueil/ Actualités - La Quotidienne/ Patrimoine/ Régimes matrimoniaux

Pas de créance si la présomption de contribution aux charges du mariage est jugée irréfragable

Si la présomption de contribution aux charges du mariage à proportion des facultés respectives des époux est jugée irréfragable, l’époux ne peut prouver ni la sous-contribution de son conjoint aux charges du mariage ni sa sur-contribution pour obtenir une créance.

Cass. 1e civ. 21-6-2023 n° 21-25.326 F-D


Par Florence GALL-KIESMANN
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©Gettyimages

Des époux séparés de biens divorcent. L’ex-femme réclame une créance à son ex-mari au titre du financement par ses deniers personnels de la construction du logement familial sur un terrain propre à son ex. La cour d’appel accueille sa demande. Pour en décider ainsi, elle se réfère au contrat de mariage. Celui-ci prévoit classiquement que les époux contribueront aux charges du mariage à proportion de leurs facultés respectives et que chacun d’eux sera réputé avoir fourni au jour le jour sa part contributive, en sorte qu’ils ne seront assujettis à aucun compte entre eux. Selon la juridiction, le caractère irréfragable de cette présomption, qui « interdit de prouver que l’un ou l’autre des époux ne s’est pas acquitté de sa contribution » n’empêche pas le conjoint de prouver sa sur-contribution aux charges de mariage ; si celle-ci est démontrée, la créance réclamée est due.

Sans surprise, l’arrêt est censuré par la Cour de cassation au visé des articles 214 et 1537 du Code civil. Il résulte en effet de ces textes que lorsque les juges du fond ont souverainement estimé irréfragable la présomption de contribution aux charges du mariage à proportion des facultés respectives des époux, un époux ne peut être admis à prouver l’insuffisance de la participation de son conjoint aux charges du mariage pas plus que l’excès de sa propre contribution.

A noter :

C’est une confirmation de jurisprudence, sur laquelle le requérant s’est d’ailleurs appuyé (Cass. 1e civ. 18-11-2020 n° 19-15.353 FS-PB : SNH 1/21 inf. 4 : BPAT 1/21 inf. 3, AJ Famille 2021 p. 193 obs. J. Casey). L’arrêt démontre une nouvelle fois à quel point la clause usuelle de présomption de contribution aux charges du mariage prévue dans un contrat de séparation de biens peut réserver des surprises en cas de divorce. Si la présomption est jugée irréfragable, l’époux ayant sur-contribué au financement de l’achat ou de la construction logement familial ne peut pas revendiquer une créance à son conjoint. Et son montant peut être conséquent : 269 082,30 euros en l’espèce, sans compter les intérêts… Encore faut-il, toutefois, que ce financement entre dans les charges du mariage. Même si cela n’était pas le point de discussion de la présente affaire, il est important de rappeler qu’il est bien établi depuis quelques années que le financement du logement familial au moyen de fonds personnels (et non d’un emprunt), ne relève pas de la contribution aux charges du mariage (Cass. 1e civ. 3-10-2019 n° 18-20.828 FS-PBI : SNH 34/19 inf. 1, BPAT 6/19 inf. 229 ; Cass. 1e civ. 17-3-2021 n° 19-21.463 FS-P :  SNH 12/21 inf. 1, BPAT 3/21 inf. 105, Defrénois 2021 n° 40 p. 43 note B. Vareille et A. Chamoulaud-Trapiers ; Cass. 1e civ. 9-6-2022 n° 20-21.277 F-B : BPAT 4/22 inf. 176 ; Cass. 1e civ. 5-4-2023 n° 21-22.296 FS-B : SNH 15/23 inf. 3, BPAT 3/23 inf. 111). Sauf convention contraire, la présomption est alors écartée. Or, en l’espèce, l’épouse avait financé la construction avec ses deniers personnels. L’espoir d’une créance ne serait peut-être pas vain…

De telles situations peuvent bien sûr être évitées. Il est en effet possible pour les époux, sur les conseils éclairés de leur notaire, d’opter pour une clause mieux adaptée. Ils peuvent ainsi qualifier la présomption de simple, ou encore définir plus précisément le champ d’application de la contribution, comme exclure les investissement immobiliers (voir sur ce point Mémento Droit de la Famille 2022 n° 1979 s.).

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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