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Le défaut de mention du motif de révocation du gérant de SARL ne peut fonder la nullité de l’assemblée

La nullité de l’assemblée des associés d’une SARL ayant révoqué le gérant ne peut pas être justifiée par l’absence de mention du motif de révocation dans le procès-verbal de l’assemblée, même si les statuts de la société exigent cette mention.

Cass. com. 7-5-2025 n° 23-21.508 F-B, Sté Tahiti art Maohi c/ X


Par Marie PONSOT
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@Getty images

À la demande de l’ancien gérant d’une SARL, une cour d’appel annule l’assemblée des associés ayant décidé la révocation de l’intéressé, ainsi que les assemblées postérieures. Elle retient qu’il découle des statuts de la société que la décision de révocation du gérant devait être décidée pour un juste motif, lequel devait nécessairement être rapporté au procès-verbal de l’assemblée, ce qui n’était pas le cas en l’espèce, le procès-verbal ne comportant aucune mention du motif retenu par les associés pour évincer le gérant.

Censure de la Cour de cassation. La nullité des actes ou délibérations autres que ceux modifiant les statuts ne peut résulter que de la violation d’une disposition impérative du Livre II du Code de commerce relatif aux sociétés commerciales ou des lois qui régissent les contrats (C. com. art. L 235-1). Il en résulte que, sous réserve des cas dans lesquels il a été fait usage de la faculté, ouverte par une disposition impérative, d’aménager conventionnellement la règle posée par celle-ci, le non-respect des stipulations statutaires n’est pas sanctionné par la nullité. Or, aucune disposition du Livre II du Code de commerce ne prévoit que le motif de révocation doit être rapporté au procès-verbal de l’assemblée révoquant le dirigeant social. Par ailleurs, la cour d’appel n’avait pas constaté que la disposition statutaire prétendument méconnue procédait d’une faculté offerte par une disposition impérative de la loi. Les assemblées litigieuses ne pouvaient donc pas être annulées.

A noter :

1° La Cour de cassation fait ici application d’un principe qu’elle avait précédemment dégagé (Cass. com. 18-5-2010 n° 09-14.855 FS-PBRI : RJDA 8-9/10 n° 850) : la violation des statuts n’est pas sanctionnée par la nullité, à moins que la disposition statutaire méconnue fasse usage de la faculté offerte par une loi impérative d'aménager le contenu de la règle qu'elle pose, cette réserve ne s'étendant pas aux hypothèses dans lesquelles la loi, ou bien est muette, ou bien confie exclusivement aux statuts le soin de régler la question. En effet, de tels textes ne posant aucune règle et donc ne comportant a fortiori aucune disposition impérative, la condition posée par l'article L 235-1, al. 2 du Code de commerce ne peut pas être tenue pour satisfaite. En tout état de cause, il appartient au juge d’indiquer le fondement juridique justifiant l'annulation de l'acte dont la régularité est contestée (en ce sens, Cass. com. 20-9-2017 n° 15-22.735 F-D : RJDA 1/18 n° 36).

La révocation du gérant de SARL décidée sans juste motif  peut donner lieu à dommages-intérêts (C. com. L 223-25, al. 1). Cette disposition n’est, à notre avis, pas impérative : un arrêt a en effet admis que les statuts puissent prévoir que la révocation du gérant sans juste motif ne donne pas lieu à indemnité (Cass. 3e civ. 6-1-1999 n° 22 : RJDA 8-9/99 n° 950, à propos d’une société civile mais transposable). En tout état de cause, l’article L 223-25 ne rend pas impérative l’existence d’un juste motif – la révocation injustifiée restant valable – et ne laisse pas aux statuts la possibilité de prévoir une autre sanction du défaut de juste motif que l’octroi de dommages-intérêts. Par ailleurs, aucune disposition du Code de commerce n’impose expressément que le motif de révocation soit consigné dans le procès-verbal d’assemblée des associés. En effet, l’article R 223-24 du Code de commerce (ou, en l’espèce, l’article 42 du décret 67-236 du 23-3-1967, applicable en Polynésie française) relatif au procès-verbal des assemblées de SARL ne comporte aucune obligation en ce sens. Il aurait été du reste paradoxal que l’absence de mention du motif de révocation soit plus sévèrement sanctionnée que l’absence de juste motif.

2° La réforme des nullités en droit des sociétés, opérée par l’ordonnance 2025-229 du 12 mars 2025 et entrant en vigueur le 1er octobre 2025, abroge l’article L 235-1 du Code de commerce, les causes de nullité générales étant définies par l’article 1844-10 du Code civil modifié, qui dispose désormais que « la nullité des décisions sociales ne peut résulter que de la violation d'une disposition impérative de droit des sociétés, à l'exception du dernier alinéa de l'article 1833, ou de l'une des causes de nullité des contrats en général ». L’absence de mention du motif de révocation dans le procès-verbal d’assemblée ne correspondant à aucun de ces cas de figure, elle ne pourra pas davantage motiver, sous l’empire de ce nouveau texte, la nullité d’une assemblée évinçant un gérant de SARL.

Documents et liens associés :

Cass. com. 7-5-2025 n° 23-21.508 F-B

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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