Lors de la liquidation et du partage des successions de leurs parents, deux des trois enfants demandent chacun l’attribution préférentielle des mêmes terres agricoles. Le premier revendique l’attribution préférentielle de droit, qui est ouverte lorsque l’exploitation agricole ne dépasse pas les limites de superficie fixées par décret en Conseil d’État et que le maintien dans l’indivision n’a pas été ordonné (C. civ. art. 832). Le second réclame l’attribution préférentielle facultative (C. civ. art. 831).
Le premier enfant reproche à la cour d’appel d’avoir accueilli la demande de son frère, sans donner aucun motif au rejet de la sienne, qui était pourtant de droit.
La Cour de cassation confirme sur ce point la décision des juges du fond. Elle rappelle qu’en cas de demandes concurrentes, le tribunal tient compte de l'aptitude des différents postulants à gérer les biens en cause et à s'y maintenir. Pour l'entreprise, le tribunal tient compte en particulier de la durée de la participation personnelle à l'activité (C. civ. art. 832-3, al. 3). Les Hauts Magistrats précisent que la participation effective à la mise en valeur de l'exploitation agricole dont un héritier demande l'attribution préférentielle peut avoir existé à un moment quelconque, aussi bien à l'ouverture de la succession, qu'avant ou après celle-ci. En présence de demandes concurrentes formées par plusieurs héritiers remplissant les conditions prévues par la loi, celles-ci doivent faire l'objet d'une appréciation comparative selon les critères prévus à l’article 832-3, alinéa 3, peu important à cet égard que l'attribution préférentielle soit ou non de droit. Pour la Cour de cassation, c’est par une décision motivée que la cour d’appel a rejeté la demande d’attribution préférentielle du premier enfant après avoir examiné les demandes concurrentes de celui-ci et de son frère selon les critères de l’article 832-3 du Code civil.
Mais le premier enfant reproche également à la cour d’appel de s’être prononcée aux motifs que :
il est âgé de 67 ans, de sorte qu’il est manifestement plus proche de la retraite que son frère, âgé de 61 ans ;
il est en train de céder progressivement son exploitation à des tiers ;
il n’a aucun descendant susceptible de reprendre l’exploitation, contrairement à son frère qui a deux fils titulaires d’un diplôme d’agriculteur.
La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel sur ces points. Le critère de l’aptitude des différents postulants en cas de demandes concurrentes (C. civ. art. 832-3, al. 3) implique une appréciation à faire en considération des personnes qui postulent effectivement l’attribution et non de leurs descendants. En outre, la cour d’appel n’a pas recherché, comme il le lui était demandé, si l’intéressé n’avait pas cédé une partie de ses terres afin d’être en mesure de financer la soulte dont il serait redevable si les terres concernées lui étaient attribuées. L’affaire est renvoyée devant une autre cour d’appel.





