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Point de départ de la prescription de l’action en responsabilité pour dol dans un marché public

Jugé, dans le cadre d’un marché public de travaux, que la prescription trentenaire applicable jusqu’en 2008 à l’action en responsabilité contre un constructeur pour faute assimilable à une fraude ou un dol court à compter de la manifestation du dommage.

CE 10-10-2022 n° 454446, Sté Eiffage Construction


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©Gettyimages

Dans sa rédaction applicable jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, l’article 2262 du Code civil prévoyait que : « Toutes les actions, tant réelles que personnelles, sont prescrites par 30 ans, sans que celui qui allègue cette prescription soit obligé d’en rapporter un titre ou qu’on puisse lui opposer l’exception déduite de la mauvaise foi ». Dans sa rédaction issue de cette même loi, l’article 2224 du même Code prévoit désormais que : « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par 5 ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ».

Il résulte de ces dispositions que, depuis l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, les actions fondées sur la responsabilité pour faute assimilable à une fraude ou à un dol sont prescrites par 5 ans à compter de la date à laquelle le maître d’ouvrage connaissait ou aurait dû connaître l’existence de cette faute, par application des dispositions de l’article 2224 du Code civil. Avant cette loi, elles étaient en revanche régies par la prescription trentenaire, qui courait à compter de la manifestation du dommage.

A noter :

L’arrêt commenté concerne un litige relatif à l’effondrement, survenu en 2007, des balcons d’un immeuble à usage de logements sociaux construit au début des années 1980. L’office public d’habitat maître d’ouvrage a recherché en 2015 la responsabilité des constructeurs pour faute assimilable à une fraude ou un dol. Pour écarter une exception de prescription opposée par les défendeurs, la cour administrative d’appel de Versailles a fait courir le délai de prescription à compter du dépôt, au début de l’année 2015, d’un rapport d’expertise qui avait éclairé le maître de l’ouvrage sur les causes de l’accident.

L’arrêt commenté censure une erreur de droit en retenant qu’eu égard à la date des faits, les dispositions antérieures à la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile demeurent applicables en ce qui concerne le point de départ du délai de prescription et que ces dispositions font courir le délai à compter de la manifestation du dommage.

Selon la jurisprudence antérieure à la réforme, l’action en responsabilité fondée sur une fraude ou un dol, ou sur une faute assimilable à une fraude ou à un dol, consistant en une violation grave des obligations contractuelles des constructeurs, commise volontairement et sans qu'ils puissent en ignorer les conséquences, n’était soumise qu’à la prescription trentenaire prévue par l’article 2262 du Code civil. Elle pouvait donc être exercée malgré l’expiration de la garantie décennale (CE sect. 24-5-1974 n° 85939, Sté Paul Millet et Cie : Lebon p. 310 ; CE 26-11-2007 n° 266423, Sté Les Travaux du Midi : Lebon p. 450 ; CE 28-6-2019 n° 416735, Sté Icade Promotion : BPIM 4/19 inf. 266). La question du point de départ du délai de 30 ans n’était pas nettement tranchée : l’arrêt commenté prend parti en affirmant que la prescription trentenaire courait de la manifestation du dommage.

On relèvera qu’en ce qui concerne la durée du délai, il faut tenir compte des dispositions transitoires de la loi de 2008 qui prévoient que celles de ses dispositions qui réduisent le délai de prescription s’appliquent aux prescriptions à compter du jour de son entrée en vigueur, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure (Loi 2008-561 du 17-6-2008 art. 26, II). Il semble donc que, si la manifestation du dommage en 2007 a fait courir un délai de prescription de 30 ans en application de l’article 2262 du Code civil alors applicable, la loi de 2008 a substitué à ce délai un délai de 5 ans à compter de son entrée en vigueur le 19 juin 2008. Dans ce cas, la prescription a été acquise le 19 juin 2013. Mais l’arrêt commenté s’en tient à la censure de l’erreur de droit sur le point de départ du délai de prescription et renvoie l’affaire devant la cour administrative d’appel de Versailles, qui devra se prononcer sur la date d’expiration de ce délai.

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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