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La Pepa, transformée en prime de partage de la valeur, est pérennisée et renforcée

Depuis le 1er juillet 2022, les employeurs peuvent verser à leurs salariés une prime de partage de la valeur, exonérée de charges sociales et fiscales sous conditions, qui remplace l'ancienne prime exceptionnelle de pouvoir d'achat.

Loi  « pouvoir d’achat » 2022-1158 du 16-8-2022 art. 1er : JO 17 


Par Marion LE ROY
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©Gettyimages

Pour répondre à la contestation de la rue démarrée fin 2018 contre la baisse du pouvoir d’achat (mouvement dit des « gilets jaunes »), la loi 2018-1213 du 24 décembre 2018 portant mesures d’urgence économiques et sociales avait permis aux entreprises, sous certaines conditions, de verser exceptionnellement une prime à leurs salariés (ou à certains d’entre eux) non imposable et exclue de l’assiette des cotisations et contributions sociales dans certaines limites. Le dispositif avait été exceptionnellement reconduit en 2020 et 2021, mais pas complètement à l’identique. Aujourd’hui, ce dispositif est pérennisé, exception faite de sa défiscalisation qui reste, elle, temporaire.

Quelles sont les entreprises concernées ?

Les employeurs susceptibles de verser la prime de partage de la valeur à leurs salariés sont l’ensemble des employeurs de droit privé, y compris les travailleurs indépendants (artisans, commerçants, exploitants agricoles, professions libérales), les mutuelles, les associations, les fondations ou encore les syndicats.

Peuvent également octroyer une telle prime à leurs agents :

– les établissements publics administratifs (agences régionales de santé, Pôle emploi, Caisses nationales de sécurité sociale, etc.) ou à caractère industriel et commercial (RATP, Opéra de Paris, etc.) ;

– les établissements et services d’aide par le travail (Ésat).

Qui peut bénéficier de la prime ?

Peuvent bénéficier de la prime de partage de la valeur :

– les salariés titulaires d’un contrat de travail à la date de versement de la prime, du dépôt de l’accord ou de la signature de la décision unilatérale de l’employeur (DUE) actant le versement de cette prime ; il peut donc s’agir de salariés en CDI, en CDD, à temps plein ou à temps partiel, de titulaires d’un contrat d’apprentissage ou d’un contrat de professionnalisation ;

– les agents publics relevant de l’établissement (EPA ou Epic) à la date de versement de la prime ou à la date de dépôt de l’accord ou de la signature de la DUE ;

– les intérimaires mis à disposition d’une entreprise utilisatrice (à la date de versement de la prime, du dépôt de l’accord ou de la signature de la DUE) attribuant la prime à ses salariés : dans ce cas, l’entreprise utilisatrice doit en informer sans délai l’entreprise de travail temporaire (ETT) dont relèvent les intérimaires qui en informe à son tour sans délai son comité social et économique (CSE) lorsqu’il existe, et c’est l’ETT qui la leur verse dans les conditions et selon les modalités fixées par l’accord ou la DUE ;

– les travailleurs handicapés bénéficiaires d’un contrat de soutien et d’aide à l’emploi à la date de versement de la prime ou à la date de dépôt de l’accord ou de la signature de la DUE et relevant des Ésat.

L’employeur peut toujours :

verser la prime à une partie de son personnel seulement, par exclusion d’une partie des salariés dont la rémunération est supérieure à un plafond déterminé par l’accord ou la DUE instituant la prime ;

fixer librement son montant qui peut donc être inférieur aux montants maxima exonérés (à savoir 3 000 € ou 6 000 €) ou supérieur à ces montants ;

– appliquer des critères de modulation de la prime. Aux critères déjà applicables sous l’empire de la Pepa (rémunération, niveau de classification, durée de présence effective pendant l’année écoulée, durée de travail prévue au contrat de travail) s’ajoute un critère d’ancienneté dans l’entreprise.

L’interdiction de substituer la prime à un élément de rémunération du salarié, qu’il soit prévu par accord, par contrat ou par usage, demeure.

A noter :

Les congés parentaux (maternité, paternité, adoption, éducation) sont neutralisés lors de la définition des critères de modulation puisqu’ils sont assimilés à des périodes de présence effective.

Par ailleurs, le Gouvernement doit remettre, avant le 31 décembre 2024, un rapport d’évaluation de la prime de partage de la valeur au Parlement. Ce rapport comprend les données quantitatives sur le recours au dispositif et évalue notamment le respect du principe de la non-substitution au salaire.

A noter :

Le Conseil d’État avait estimé dans son rapport que la fixation des critères de modulation sans encadrement de leur mise en oeuvre n’apportait pas de garantie suffisante de la réalisation de l’objectif de protection du pouvoir d’achat et constituait donc une difficulté au regard du principe d’égalité devant les charges publiques. Il préconisait ainsi la rédaction d’un rapport d’évaluation afin de vérifier les conditions effectives de distribution de la prime et de s’assurer de sa contribution effective à la protection du pouvoir d’achat des salariés aux revenus modestes.

Comment mettre en place la prime ?

Pour mettre en place ce dispositif, l’employeur peut :

– conclure un accord, négocié au niveau de l’entreprise ou du groupe, selon les modalités prévues pour les accords d’intéressement (accord collectif de travail négocié avec le délégué syndical ou accord négocié avec le CSE notamment) ;

– opter pour la décision unilatérale : dans ce cas, il doit consulter préalablement le CSE, s’il en existe un.

Quelles sont les modalités de versement de la prime ?

La prime de partage de la valeur peut être versée depuis le 1er juillet 2022.

Il est possible de verser la prime en plusieurs fois au cours de l’année civile, dans la limite d’une fois par trimestre.

A noter :

La date de début de versement de la prime permettant de bénéficier de ce dispositif a été fixée rétroactivement au 1er juillet 2022 par le Sénat, au lieu du 1er août comme cela figurait dans le projet de loi initial, afin de ne pas pénaliser les entreprises qui auraient déjà versé la prime au cours du mois de juillet.

La fixation d’une limite de 4 versements par an a pour but de ne pas confondre cette prime avec la rémunération fixe, tout en accordant davantage de souplesse aux employeurs dont certains peuvent être contraints par des problèmes de trésorerie.

Dans une fiche pratique diffusée le 17 août 2022 sur son site internet, le ministère du travail précise que le versement de la prime de partage de la valeur doit obligatoirement apparaître sur une ligne (si possible spécifique en raison des exonérations associées) du bulletin de paie du (ou des) mois du versement.

Quels sont les plafonds d’exonération de la prime ?

Pour bénéficier intégralement des exonérations fiscales et sociales, le montant de la prime ne doit pas dépasser 3 000 € par bénéficiaire et par année civile.

Ce plafond d’exonération est porté à 6 000 € lorsque :

– pour les entreprises tenues de mettre en place de la participation, l’entreprise est dotée d’un accord d’intéressement à la date de versement de la prime ou conclut un accord d’intéressement au titre du même exercice que celui du versement de la prime ;

– pour les entreprises non tenues de mettre en place de la participation (généralement les entreprises de moins de 50 salariés), l’entreprise est dotée d’un accord de participation ou d’intéressement à la date de versement de la prime ou conclut un accord de participation ou d’intéressement au titre du même exercice que celui du versement de la prime ;

– l’employeur est une association ou une fondation reconnue d’utilité publique ou d’intérêt général et habilitée à ce titre à recevoir des dons ouvrant droit à réduction d’impôt ;

– l’employeur est un Ésat.

A noter :

Pouvaient également bénéficier du plafond majoré de la Pepa 2021, sans condition de conclusion d’un accord de participation ou d’intéressement, les entreprises de moins de 50 salariés et celles engagées dans une démarche de valorisation des « travailleurs de la 2e ligne ». Ce n’est pas le cas pour la nouvelle prime de partage de la valeur.

Quel est le régime social et fiscal de la prime ?

Les primes de partage de la valeur versées aux salariés, quelle que soit leur rémunération, ouvrent droit à exonération de cotisations sociales, dans la limite des plafonds de 3 000 € ou 6 000 € précités.

Les cotisations sociales visées sont toutes celles d’origine légale ou conventionnelle à la charge du salarié et de l’employeur (cotisations de sécurité sociale, de retraite complémentaire, d’assurance chômage, etc.), mais aussi la participation patronale à l’effort de construction et les contributions dues au titre de la formation professionnelle et de l’alternance. Le ministère du travail indique également, dans la fiche pratique du 17 août 2022, que la prime n’est pas soumise à la taxe sur les salaires.

Dans une actualité du 17 août 2022 publiée sur son site internet, le réseau des Urssaf a précisé les modalités déclaratives de la prime de partage de la valeur. Ainsi, les codes types de personnel (CTP) à utiliser sont le CTP 510 (CTP à 0 %, sans incidence sur le montant des cotisations dues par l’employeur), le CTP 260 (pour déclarer la CSG et la CRDS sur les montants de prime non exonérés) et le CTP 012 (pour déclarer le forfait social). En outre a été créée sur le site net-entreprises.fr la fiche no 2592 détaillant les modalités déclaratives de la prime en DSN, mise à jour en dernier lieu le 23 août 2022.

En matière fiscale et de CSG/CRDS, seules les primes versées entre le 1er juillet 2022 et le 31 décembre 2023 aux salariés ayant perçu, au cours des 12 derniers mois précédant leur versement, une rémunération inférieure à 3 fois la valeur annuelle du Smic sont exonérées. Notons toutefois que, même exonérée, la prime est incluse dans le montant du revenu fiscal de référence du bénéficiaire.

À compter du 1er janvier 2024, les primes de partage de la valeur seront intégralement soumises à l’impôt sur le revenu et à la CSG/CRDS. À terme, le régime social et fiscal sera donc aligné sur celui des sommes perçues au titre de la participation et des primes d’intéressement perçues immédiatement par le salarié.

A noter :

Selon l’exécutif, deux raisons militent pour le caractère temporaire de l’exonération fiscale : un dispositif plus généreux sur une durée plus courte serait plus incitatif ; le Conseil d’État s’inquiéterait d’un risque de substitution avec les salaires.

Enfin, une limite est posée en cas de versement au cours de l’année 2022 d’une prime de partage de la valeur et d’une Pepa 2021 (cette dernière ayant pu être versée jusqu’au 31 mars 2022) : l’exonération fiscale d’impôt sur le revenu au titre des revenus de l’année 2022 ne pourra s’appliquer que sur un montant cumulé de 6 000 €, l’excédent étant soumis à impôt. Cette limite ne concerne toutefois pas les exonérations sociales.

La prime est-elle assujettie au forfait social ?

La loi prévoit que la prime de partage de la valeur est assujettie au forfait social dans les conditions applicables à l’intéressement pour les entreprises qui en sont redevables. Sont donc concernées les entreprises de 250 salariés et plus conformément à l’article L 137-15 du CSS.

Le forfait au taux de 20 %est dû sur la fraction des sommes exonérée de cotisations de sécurité sociale. La fraction de ces sommes excédant les limites d’exonération est réintégrée dans l’assiette des cotisations sociales et, par conséquent, échappe au forfait social.

L’assujettissement ou non au forfait de la prime de partage de la valeur versée par ces entreprises varie selon la date de versement de la prime et la rémunération des salariés bénéficiaires.

Ainsi, la prime versée, entre le 1er juillet 2022 et le 31 décembre 2023, aux salariés dont la rémunération annuelle est inférieure à 3 fois le Smic annuel n’est pas soumise au forfait social.

Le forfait social est en revanche dû, pour les entreprises qui en sont redevables, pour les primes versées :

– entre le 1er juillet 2022 et le 31 décembre 2023, aux salariés dont la rémunération dépasse le montant ci-dessus ;

– à compter du 1er janvier 2024, à l’ensemble des salariés, quel que soit leur niveau de rémunération.

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Documents et liens associés

Loi 2022-1158 du 16-8-2022 art. 1 : JO 17

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