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Protection des données personnelles : le déréférencement d'un lien internet n'est pas de droit

Un juge ne peut pas ordonner à l’exploitant d’un moteur de recherche la suppression de liens vers des pages internet contenant des informations personnelles sans mettre en balance les intérêts du particulier à l’origine de la demande de suppression et ceux des internautes.

Cass. 1e civ. 14-2-2018 n° 17-10.499 FS-PBI


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Toute personne physique a le droit de s’opposer, pour des motifs légitimes, à ce que des données personnelles la concernant fassent l’objet d’un traitement (Loi Informatique et libertés art. 38). Elle peut exiger du responsable d’un traitement que soient, selon les cas, rectifiées, verrouillées ou effacées les données qui sont inexactes, incomplètes, équivoques, périmées, ou dont la collecte, l’utilisation, la communication ou la conservation est interdite (art. 40).

A la demande d’un particulier, un juge des référés ordonne à l’exploitant d’un moteur de recherche de supprimer les liens qui conduisent, lors de recherches opérées avec les nom et prénom de ce particulier, à toute adresse URL identifiée et signalée par celui-ci comme portant atteinte à sa vie privée et ce, dans un délai de sept jours à compter de la réception de ce signalement.

La Cour de cassation juge qu’une telle injonction est contraire aux textes précités et à l’article 5 du Code civil, qui interdit aux juges de se prononcer par voie de disposition générale sur les causes qui leur sont soumises. En effet, la juridiction saisie d’une demande de déréférencement est tenue de porter une appréciation sur son bien-fondé et de procéder, de façon concrète, à la mise en balance des intérêts en présence. Elle ne peut donc pas prononcer une mesure d’injonction d’ordre général conférant un caractère automatique à la suppression des liens vers des pages internet contenant des informations relatives à une personne au sujet de laquelle une recherche internet a été effectuée.

A noter : 1. La Cour de cassation appuie sa décision sur l’arrêt Google Spain du 13 avril 2014, rendu par la Cour de justice de l’Union européenne sur le fondement des articles 12 et 14 de la directive 95/46/CE du 24 octobre 1995, dont les articles 38 et 40 précités sont la transposition (CJUE 13-5-2014 aff. 131/12 : BRDA 10/14 inf. 16). La Cour de justice avait énoncé la démarche à suivre pour les demandes formulées au titre des droits d’opposition et de rectification : ces demandes peuvent être directement adressées au responsable du traitement, qui doit alors examiner le bien-fondé de celles-ci et, le cas échéant, mettre fin au traitement des données ; lorsque le responsable ne donne pas suite à ces demandes, la personne concernée peut saisir l’autorité judiciaire pour que celle-ci effectue les vérifications nécessaires et ordonne à ce responsable des mesures précises ; dès lors que la suppression de liens de la liste de résultats pourrait, en fonction de l’information en cause, avoir des répercussions sur l’intérêt légitime des internautes potentiellement intéressés à y accéder, l’autorité judiciaire doit rechercher un juste équilibre, notamment, entre cet intérêt et les droits au respect de la vie privée et à la protection des données à caractère personnel garantis par  les articles 7 et 8 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (points 77 et 81).

2. Cette solution conservera son intérêt sous l’empire du règlement européen sur la protection des données (RGPD) qui, à compter du 25 mai 2018, se substituera à la directive 95/46. Le RGPD ne contient pas de dispositions sur le droit au déréférencement, mais innove en introduisant un « droit à l’effacement » ou « droit à l’oubli » de certaines données personnelles (art. 17). Sa portée est plus large car il concerne le contenu de la donnée, et non seulement le lien qui conduit à celle-ci.

Dominique LOYER-BOUEZ

Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Concurrence consommation n° 17210

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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