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Seul le CSE central peut déclencher le droit d'alerte économique

Dans les entreprises divisées en établissements distincts, l'exercice du droit d'alerte économique est réservé au CSE central, à l'exclusion des CSE d'établissement, et ce même si le CSE central n'a pas mis en œuvre la procédure.

Cass. soc. 15-6-2022 n° 21-13.312 F-B, Kholer France c/ CSE d'établisssement Kholer France


Par Séverine BAUDOUIN et Pascale PEREZ de ARCE
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©Gettyimages

Le droit d'alerte économique du comité d'entreprise a été conservé à l'identique lors de la création du comité social et économique. Ainsi, en application de l'article L 2312-63 du Code du travail, qui reprend les termes de l'article L 2323-50 relatif au CE, lorsque le CSE a connaissance de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l'entreprise, il peut déclencher la procédure d'alerte économique. Dans ce cadre, en application de l'article L 2312-64 du même Code, lui ou la commission économique peut se faire assister, une fois par exercice comptable, d'un expert-comptable.

Mais qu'en est-il dans les entreprises divisées en établissements distincts ? Un CSE d'établissement peut-il déclencher cette procédure ou celle-ci est-elle réservée au CSE central d'entreprise ?

La chambre sociale de la Cour de cassation avait répondu à la question pour le droit d'alerte économique du CE. Dans un arrêt du 15 juin dernier, elle reprend la même solution pour le droit d'alerte du CSE… et la précise.

Une réorganisation conduisant à l'arrêt de l'activité de plusieurs établissements

Dans cette affaire, à la suite de difficultés économiques, était envisagée une réorganisation de l'activité conduisant notamment à l'arrêt de celle-ci sur plusieurs sites.

La société avait engagé la consultation des CSE aux niveaux central et des établissements. Le CSE central avait désigné un expert en application des dispositions de l'article L 1233-34 du Code du travail, c'est-à-dire dans le cadre d'un licenciement collectif pour motif économique. Mais il n'avait pas déclenché la procédure d'alerte économique.

C'est ce qu'avait fait, en revanche, quelques semaines plus tard, le CSE de l'un des établissements menacés de fermeture, qui avait, dans la foulée, désigné un expert sur le fondement de l'article L 2315-92 du Code du travail.

La société avait immédiatement assigné le CSE d'établissement selon la procédure accélérée au fond aux fins d'annulation de cette délibération, mais avait été déboutée de sa demande par le président du tribunal judiciaire, au motif que le CSE central n'avait pas mis en œuvre la procédure d'alerte économique et que la restructuration de la société aurait des conséquences directes sur l'établissement concerné, ce dont se déduisait le caractère préoccupant de la situation économique de l'entreprise, condition nécessaire et suffisante de la mise en œuvre du droit d'alerte.

Un droit d'alerte économique réservé au CSE central

Le jugement est cassé.

Pour la Cour de cassation, en effet, dans les entreprises divisées en établissements distincts, l'exercice du droit d'alerte économique étant subordonné à l'existence de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l'entreprise, les CSE d'établissement ne sont pas investis de cette prérogative qui appartient au seul CSE central.

Dès lors, en retenant que, lorsque le CSE central n'a pas mis en œuvre la procédure d'alerte économique, le CSE d'établissement peut exercer cette procédure s'il justifie de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l'entreprise, le président du tribunal judiciaire a violé l'article L 2316-1 du Code du travail, aux termes duquel le CSE central d'entreprise exerce les attributions concernant la marche générale de l'entreprise et excédant les limites des pouvoirs des chefs d'établissement, ainsi que les articles L 2312-63, L 2312-64 et L 2315-92, I, 2° précités du même Code.

A noter :

La solution selon laquelle l'exercice du droit d'alerte économique est réservé au comité central et interdit aux comités d'établissement a déjà été énoncée à plusieurs reprises pour le comité d'entreprise (Cass. soc. 1-3-2005 n° 03-20.429 FS-PB ; Cass. soc. 6-4-2005 n° 02-31.130 F-P ; Cass. soc. 12-10-2005 n° 04-15.794 FS-PB).

La chambre sociale de la Cour de cassation reprend ici cette jurisprudence constante pour le CSE, comme on pouvait s'y attendre eu égard à la similitude des textes applicables aux deux instances représentatives. Elle apporte toutefois une précision, parce qu'elle était directement saisie de la question, par rapport aux arrêts antérieurs : c'est que la circonstance que le CSE central n'ait pas mis en œuvre la procédure d'alerte et que l'établissement représenté par le CSE d'établissement auteur de l'alerte subisse les conséquences de la restructuration objet de celle-ci est sans incidence sur la solution de principe, qui reste valable. On signalera que, dans un arrêt ancien, la cour d'appel de Versailles avait réservé le cas d'une « carence » du comité central d'entreprise qui aurait autorisé le comité d'établissement à mettre en œuvre la procédure (CA Rouen 10-2-1999), mais que la Cour de cassation n'a jamais repris, ni censuré, cette réserve.

Documents et liens associés

Cass. soc. 15-6-2022 n° 21-13.312 F-B, Kholer France c/ CSE d'établisssement Kholer France

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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