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Accident du travail - maladie professionnelle : 5 ans pour contester l’opposabilité d’une décision de prise en charge

Revenant sur sa jurisprudence, la Cour de cassation décide que l’action de l’employeur en inopposabilité d’une décision de prise en charge d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle se prescrit par 5 ans

Cass. 2e civ. 18-2-2021 n° 19-25.886 FS-P ; Cass. 2e civ. 18-2-2021 n° 19-25.887 FS-P


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Lorsque la sécurité sociale décide de prendre en charge l’accident ou la maladie d’un salarié au titre de la législation professionnelle, l’employeur peut saisir le juge afin que cette décision lui soit déclarée inopposable lorsqu’elle a été rendue selon une procédure irrégulière. Il en est ainsi en particulier de la décision prise sans respect du contradictoire (Cass. 2e civ. 10-3-2016 n° 15-16.669 F-PB : RJS 5/16 n° 372 ; Cass. 2e civ. 6-7-2017 n° 16-18.774 F-PB : RJS 11/17 n° 763). Mais de quel délai dispose l’employeur pour engager une telle action ? C’est sur cette question que se prononce une nouvelle fois la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans ses deux arrêts du 18 février 2021, l’occasion pour elle de revenir sur sa jurisprudence.

D’une absence de délai de prescription…

La deuxième chambre civile a jugé l’employeur recevable à contester l’opposabilité ou le bien-fondé de la décision de prise en charge sans que puissent lui être opposées les conditions de délai propres au contentieux de la sécurité sociale (en ce sens Cass. 2e civ. 12-3-2015 FS-PB : RJS 6/15 n° 445). Par ailleurs, depuis près de deux ans, elle jugeait que, si la décision de la caisse primaire qui reconnaît le caractère professionnel de l'accident, de la maladie ou de la rechute fait grief à l'employeur, qui est recevable à en contester l'opposabilité ou le bien-fondé, son recours ne revêt pas le caractère d'une action au sens de l'article 2224 du Code civil, de sorte que la prescription quinquennale prévue par ce texte n'est pas applicable (Cass. 2e civ. 9-5-2019 n° 18-10.909 FS-PBI : RJS 7/19 n° 459 ; Cass. 2e civ. 29-5-2019 n° 18-13.696 F-D ; Cass. 2e civ. 28-5-2020 n° 19-13.929 F-D). Il en résultait que, faute de toute prescription appropriée, la faculté d’engager un recours était sans limitation dans le temps.

En l’espèce, la cour d’appel de Paris s’était conformée à cette jurisprudence ; ses décisions sont néanmoins cassées.

… à l’application du délai de droit commun

Ainsi, les deux arrêts rendus le 18 février 2021 mettent fin à la solution initiée en 2019 qui, comme le relève la Haute Cour dans ses deux décisions, était très critiquée par la doctrine en ce qu’elle pouvait conduire à une imprescriptibilité de ce recours et a suscité des divergences de jurisprudence des juridictions du fond. La deuxième chambre civile soumet désormais, à défaut de texte spécifique, l’action de l’employeur à la prescription quinquennale prévue par l’article 2224 du Code civil.

Pour justifier le revirement ainsi opéré, elle retient en particulier que « ni l’indépendance des rapports entre, d’une part, la caisse primaire et la victime et, d’autre part, la caisse primaire et l’employeur, ni le particularisme du recours ouvert à l’employeur pour contester la décision d’une caisse primaire de reconnaître le caractère professionnel d’un accident, d’une maladie ou d’une rechute ne justifient que ce recours ne puisse constituer une action en justice et que, dès lors, il ne soit pas soumis à un délai de prescription».

A noter : Cette décision s’inscrit dans une jurisprudence d’ensemble qui tend, en l’absence de prescription spécifique, à faire application de la prescription quinquennale de l’article 2224 précité aux actions intéressant les rapports entre les organismes de sécurité sociale et leurs usagers (voir, par exemple, Cass. 2e civ. 18-2-2021 n° 19-14.475 FS-P à propos de cotisations dues au titre des régimes agricoles en cas de fraude ou de fausse déclaration).

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne