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[Durabilité] Rapports de durabilité : les contours de la mission du CAC se précisent

Le Haut Conseil du commissariat aux comptes (H3C) a publié un avis technique qui permettra aux professionnels (commissaires aux comptes ou prestataires de services d’assurance indépendants) de vérifier les premiers rapports de durabilité. En attendant une norme d’application obligatoire, cet avis précise les travaux à mettre en œuvre, ainsi que la forme et le contenu du rapport d’assurance limitée.

Avis technique H3C « Mission d’assurance limitée sur l’information en matière de durabilité » du 4-7-2023 (www.h3c.org) 


Par PwC auteur du Mémento Comptable et du Feuillet Rapide comptable
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©PwC

La directive européenne (UE) 2022/2464 « Corporate Sustainability Reporting » du 14 décembre 2022 (dite « CSRD ») impose aux plus grandes entreprises de publier, à partir de 2025, au titre de l’exercice 2024, un rapport de durabilité portant sur les sujets environnementaux, sociaux et de gouvernance (voir nos articles FRC, rubrique Reporting de durabilité, notamment FRC 1/23 inf. 6, FRC 5/23 inf. 20 et FRC 8-9/23 inf. 7).

A noter :

La directive CSRD sera transposée en droit français par voie d’ordonnance, au plus tard le 8 décembre 2023 (voir FRC 5/23 inf. 6). Par ailleurs, douze normes ESRS (« European Sustainability Reporting Standards ») qui devront être appliquées par les entreprises ont été adoptées par la Commission européenne (CE) par acte délégué le 31 juillet 2023 (sur les normes transversales ESRS 1 et ESRS 2, voir notre dossier pratique dans le FRC 8-9/23 inf. 27).

Le rapport de durabilité, qui remplacera la déclaration de performance extra-financière (DPEF), sera vérifié dès 2024 par :

  • soit LE (ou LES) commissaire(s) aux comptes qui certifie(nt) les comptes de l’entreprise ;

  • soit UN (ou deux) autres commissaire aux comptes ;

  • soit un (ou deux) prestataire(s) de services d’assurance indépendant (PSAI) devant être agréé(s) par le Cofrac (Comité français d’accréditation). Les experts-comptables, par exemple, pourront être reconnus comme PSAI.

Le choix du (ou des) vérificateur(s) sera réalisé par l’entreprise.

A noter :

Le Haut Conseil du commissariat aux comptes (H3C) devrait assurer la supervision des commissaires aux comptes et des PSAI et, à cette occasion, changer de nom pour devenir la Haute Autorité de l’Audit (H2A).

Quel est le niveau d’assurance prévu par la loi ?

Cette vérification aboutira dans un premier temps à l’émission d’une assurance limitée.

A noter :

L’assurance limitée qui sera émise pour le rapport de durabilité n’est pas comparable à l’assurance modérée qui caractérise la DPEF à ce jour. Le périmètre de couverture et la profondeur des travaux sont significativement plus étendus par rapport aux travaux actuels de vérification de l’organisme tiers indépendant (OTI) sur la DPEF.

La mission d’assurance limitée prévue sur le rapport de durabilité est une mission de conformité et non une mission de certification.

Le niveau d’assurance pourrait d’ici à 2028 (date à confirmer) être renforcé pour atteindre un niveau d’assurance raisonnable (comme pour les comptes annuels). Pour rappel, la profondeur des vérifications d’une mission d’assurance limitée est inférieure à celle que requiert une mission d’assurance raisonnable.

Pourquoi un avis technique en amont des futures normes européennes ?

Pour effectuer la mission de vérification du rapport de durabilité, les professionnels devront respecter des normes qui seront adoptées par la Commission européenne (CE) au plus tard le 1er octobre 2026 sous forme d’actes délégués. Aussi longtemps que la CE n’a pas adopté ces normes, les États membres peuvent appliquer des textes nationaux.

L’avis technique « Mission d’assurance limitée sur l’information en matière de durabilité » a ainsi été élaboré par un groupe de travail constitué par le H3C, afin de permettre aux professionnels d’en appréhender le contenu avant de commencer leurs premières missions d’assurance limitée.

L’avis technique publié par le groupe de travail contribuera par ailleurs à l’élaboration d’une norme d’exercice professionnel (NEP), d’application obligatoire à tous les vérificateurs et à laquelle se substituera, à terme, la norme adoptée par la Commission européenne.

Le normalisateur d’audit international, l’IAASB (« International Auditing and Assurance Standards Board ») a publié un projet de norme ISSA 5000 le 3 août dernier relative à la mission d’assurance (raisonnable ou limitée) en matière d’information de durabilité, les commentaires étant attendus au plus tard pour le 1er décembre 2023, avec une approbation finale prévue pour septembre 2024.

A noter :

Limites de l’avis technique Il définit des lignes directrices qui décrivent les travaux et les conclusions du vérificateur. Ces lignes, qui ne sont pas exhaustives, seront amenées à évoluer et contribueront aux réflexions normatives européennes et internationales en cours. C’est pour cette raison que l’avis a également été traduit en anglais.

Quels sont les principes fondamentaux énoncés par l’avis technique ?

La mission d’assurance limitée consiste à émettre un avis portant sur trois aspects (Avis technique § 2) :

  • la conformité de l’information de durabilité (le cas échéant, consolidée) et du processus mis en œuvre pour déterminer les informations publiées, avec la directive comptable (2013/34/UE), y compris les normes ESRS ;

  • le respect de l’obligation de balisage de l’information (le cas échéant, consolidée) selon le format d’information électronique unique (« European Single Electronic Format » ou ESEF ; voir FRC Hors-série 12/22 inf. 127) ;

  • la conformité avec le règlement Taxonomie (Règl. UE 2020/852 art. 8 ; voir notamment FRC 7/23 inf. 7).

Conformité du processus d’identification et de collecte des informations avec la directive et les normes ESRS

L’établissement du rapport de durabilité implique, pour l’entreprise, d’identifier et de collecter les informations à publier dans une perspective de « double matérialité » qui lui permette (Avis technique § 7.3) :

  • d’identifier ses impacts, risques et opportunités liés aux questions de durabilité, mais également ceux des entités comprises dans le périmètre de l’information consolidée, le cas échéant, et ceux des entités de sa chaîne de valeur ;

  • puis d’identifier parmi ces impacts, risques et opportunités ceux qui sont importants (le terme « matériels » est, à notre avis, plus approprié, car il est davantage utilisé en pratique) et donc à publier.

Pour rappel, la double matérialité s’apprécie en fonction de deux critères (ESRS 1 § 37 s.) : 

  • la matérialité d’impact : une question de durabilité est importante du point de vue de l'impact lorsqu'elle concerne les incidences matérielles, réelles ou potentielles, positives ou négatives de l'entreprise sur les personnes ou l'environnement à court, moyen et long terme. Les impacts comprennent ceux qui sont liés aux opérations de l’entreprise mais également à sa chaîne de valeur ;

  • la matérialité financière : une question de durabilité est importante d’un point de vue financier si elle a (ou pourrait avoir) des effets financiers importants sur l’entreprise.

Le vérificateur apprécie la démarche suivie par l’entreprise, au regard des exigences de la norme ESRS 1, notamment sur :

  • l’identification et la consultation des parties prenantes, afin de déterminer les impacts, risques et opportunités qui leur sont attachés (voir Avis technique, § 7.3.1) ;

  • la définition de la double matérialité (voir ci-avant).

Conformité de l’information de durabilité avec la directive et les normes ESRS

Le commissaire aux comptes ou le PSAI vérifie notamment (Avis technique, § 7.4 s.) :

  • la présentation des informations dans le rapport de durabilité ; elles doivent être présentées au sein d’une section spécifique du rapport de gestion structurée en 4 parties (informations générales, environnementales, sociales et de gouvernance), conformément à ce que prévoit la CSRD et la norme ESRS 1 ;

  • la conformité des informations publiées avec les normes ESRS, et notamment les exigences générales de la norme ESRS 1.

A noter :

Principes ESRS 1 à respecter L’information de durabilité doit respecter les principes suivants (norme ESRS 1, annexe B) :

  • pertinence : l’information doit permettre aux utilisateurs de prendre leurs décisions au vu d’une approche de double matérialité ;

  • représentation fidèle : l'information doit être complète, neutre et exempte d'erreur ;

  • comparabilité : les informations de l’exercice doivent pouvoir être comparées à celles des exercices précédents et aux informations fournies par d'autres entreprises ;

  • vérifiabilité : il doit être possible de corroborer les informations elles-mêmes ou les données utilisées pour les obtenir ;

  • compréhensibilité : les informations doivent être claires, concises et cohérentes.

Le commissaire aux comptes ou le PSAI ne vérifie que certaines des informations. Pour ce faire, il doit notamment, sur la base de son jugement professionnel :

  • identifier et sélectionner les informations à vérifier spécifiquement dans le but d’identifier celles qui présentent un risque plus important d’erreur, d’omission ou d’incohérence (en raison notamment de fraudes ou de pratiques d’écoblanchiment, ou d’un risque de non-conformité aux normes ESRS, ou d’attentes particulièrement fortes des utilisateurs du rapport de durabilité),

  • selon des techniques appropriées (demandes d'informations auprès des personnes, internes ou externes à l’entreprise, procédures analytiques, observations physiques, etc.).

Conformité des informations à publier avec l’exigence de balisage selon le format ESEF

Comme il n’existe pas à ce jour de texte précisant le contenu et la présentation des informations à publier selon le format ESEF ni la méthodologie à suivre pour s’y conformer, l’avis technique ne présente pas les travaux à mettre en œuvre.

Respect du règlement Taxonomie (art. 8)

Selon l’article 8 du règlement (UE) 2020/852, toute entreprise tenue d’établir un rapport de durabilité publie :

  • des informations sur la manière et la mesure dans laquelle ses activités sont associées à des activités économiques durables sur le plan environnemental au regard des six objectifs environnementaux retenus par la CE ;

Pour rappel, les activités durables sont celles qui :

  • d’une part, sont identifiées comme éligibles à la réglementation Taxonomie dans une liste établie par la CE ;

  • d’autre part, peuvent être considérées comme alignées, c’est-à-dire qu’elles respectent plusieurs conditions, à savoir qu’elles contribuent de manière substantielle, au regard de critères techniques, à l’un des 6 objectifs environnementaux définis par les actes délégués de la CE, qu’elles ne portent pas préjudice à un autre objectif environnemental et qu’elles respectent les garanties minimales.

Les 6 objectifs environnementaux sont les suivants : atténuation du changement climatique, adaptation au changement climatique, protection de l’eau et des ressources marines, transition vers une économie circulaire, prévention de la pollution de l’environnement, protection de la biodiversité et des écosystèmes.

  • ainsi que, pour les entreprises non financières, certains indicateurs clés de performance (« Key Performance Indicators » – KPIs) : le chiffre d’affaires, la part des dépenses d’investissement (CapEx), les dépenses d’exploitation (OpEx).

Pour les entreprises financières, d’autres KPIs sont applicables.

Selon l’avis technique (§ 9 s.), le vérificateur mettra en œuvre des travaux d’assurance limitée afin de conclure qu’il n’a pas détecté d’inexactitudes (erreurs, omissions ou inexactitudes) dans les informations définies à l’article 8 du règlement Taxonomie, qui remettent en cause le respect des exigences de publication de ces informations :

  • vérification du processus de détermination des activités éligibles et alignées ;

  • vérification des informations publiées : notamment, éligibilité des activités économiques, alignement des activités économiques éligibles, KPIs.

A noter :

Le vérificateur appliquera des procédures extensives de vérification des informations sur :

  • les activités éligibles ;

  • les activités alignées ;

  • les indicateurs clés de performance.

Autres éléments à prendre en compte

À l’issue de ses travaux, le vérificateur :

  • procédera à une lecture finale des informations publiées dans les autres parties du rapport de gestion (en dehors de la partie dédiée au rapport de durabilité) et à celle des états financiers (Avis technique § 7.6 et 9.3), afin d’apprécier la cohérence de l’ensemble des informations entre elles ;

  • appréciera les événements postérieurs à la clôture (Avis technique § 10) ;

  • appréciera la suffisance et le caractère approprié des éléments probants collectés lors de ses vérifications (Avis technique § 11) ;

  • communiquera les éléments importants aux organes de gouvernance mentionnés à l’article L 823-16 du Code de commerce, c’est-à-dire au conseil d’administration ou au directoire et au conseil de surveillance et, le cas échéant, au comité d’audit (Avis technique § 12) ;

  • constituera une documentation appropriée (Avis technique § 15). 

Si l’entreprise décide de confier la mission à plusieurs vérificateurs, ces derniers exerceront leur mission de co-vérification selon les mêmes principes que le co-commissariat aux comptes : notamment, établissement d’une lettre de mission, répartition équilibrée des vérifications, examen critique des vérifications effectuées par l’autre co-vérificateur, émission d’un rapport conjoint (Avis technique § 13).

A noter :

Les exigences de l’avis technique sont relativement élevées concernant la nature et l’étendue des travaux du vérificateur, la mise en œuvre de son esprit critique, la collecte d’éléments probants et la documentation de son dossier.

Quel est le contenu du rapport d’assurance limitée ?

Un rapport en trois parties nettement individualisées

Le rapport d’assurance limitée comporte les parties distinctes suivantes (Avis technique § 14) :

  • une partie introductive : nom de l’entreprise, textes de référence (normes ESRS), comptes annuels ou consolidés, date de clôture ;

  • une partie qui décrit l’étendue de la mission d’assurance limitée (notamment, identification des risques de non-conformité aux textes, et définition, pour les données quantitatives, des marges d’erreurs acceptables) ;

  • une partie qui décrit, pour chaque pan de la mission présenté distinctement, la nature des vérifications et les conclusions du vérificateur (voir ci-après).

Formalisation des conclusions du vérificateur

a. Premier pan de la mission : conformité du processus aux normes ESRS, conformité des informations publiées aux normes ESRS et conformité aux autres dispositions de la directive comptable 2013/34/UE Pour chacun de ces trois points, le vérificateur formule :

  • soit un avis de conformité ;

  • soit un avis de conformité assorti de réserves motivées :

    • lorsque des erreurs, omissions ou incohérences identifiées n’ont pas été corrigées et remettent en cause la conformité, ou lorsque toutes les vérifications nécessaires n’ont pas pu être réalisées ;

    • mais que les incidences sont restreintes et que la réserve apparaît suffisante pour que le lecteur puisse fonder son jugement ;

  • soit un avis motivé de non-conformité :

    • lorsque des erreurs, omissions ou incohérences n’ont pas été corrigées et remettent en cause la conformité, ou lorsque toutes les vérifications nécessaires n’ont pas pu être réalisées ;

    • et que les incidences ne peuvent pas être clairement délimitées ou qu’une réserve n’apparaît pas suffisante pour que le lecteur puisse fonder son jugement ;

  • soit une impossibilité motivée d’émettre un avis :

    • lorsque le vérificateur n’a pas pu mettre en œuvre toutes les vérifications nécessaires pour fonder son avis ;

    • et que les incidences ne peuvent pas être clairement délimitées ou qu’une réserve n’apparaît pas suffisante pour que le lecteur puisse fonder son jugement.

A noter :

Lorsque le vérificateur émet un avis de conformité (avec ou sans réserve), il peut formuler des observations afin d’attirer l’attention sur une information spécifique fournie dans le rapport de durabilité.

b. Deuxième pan de la mission: conformité avec l’exigence de balisage ESEF Comme il n’existe pas, à ce jour, de projet de texte précisant les informations à publier selon ce balisage, l’avis technique ne traite pas la formulation des conclusions relatives à ce deuxième pan.

c. Troisième pan: respect du règlement Taxonomie (art. 8) Le vérificateur formule :

  • soit un avis de respect des exigences, assorti ou non de réserves motivées ;

  • soit un avis motivé de non-respect des exigences ;

  • soit une impossibilité motivée d’émettre un avis.

A noter :

Comme pour le premier pan de la mission, lorsqu’un avis de respect des exigences (avec ou sans réserve) est formulé, il peut être complété par des observations.

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© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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