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Lutte contre la fraude fiscale : la circulaire du 4 octobre 2021 fixe le cap

En publiant cette nouvelle circulaire, le ministre de la justice trace la route que les parquets devront prendre en matière de lutte contre la fraude fiscale. Une route répressive, en coopération assumée avec les services de contrôle fiscal.


Par Mathieu SELVA-ROUDON, Associé en droit fiscal au sein du cabinet LPA-CGR avocats
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©iStock

Dans le sillage de la circulaire interministérielle du 7 mars 2019, elle-même publiée à la suite de l’entrée en vigueur de la loi dite « fraude fiscale II » (loi 2018-898 du 23 octobre 2018), la circulaire du 4 octobre 2021 vient aider, par des instructions concrètes et pratiques, les parquets à mieux appréhender les dossiers fiscaux à connotation pénale.

La circulaire s’articule autour de trois piliers :

I. Une clarification des rôles entre juridictions traitant la fraude fiscale

Si les parquets près les tribunaux judiciaires non spécialisés restent destinataires de la majorité des dossiers pénaux adressés par l’administration fiscale, avec en fonction pivot les référents fraude fiscale, la circulaire rappelle la nécessité de répartir certains dossiers auprès des juridictions interrégionales spécialisées (Jirs) et la Juridiction nationale chargée de la lutte contre la criminalité organisée (Junalco), et précise les champs de compétence concurrente du PNF.  

Le PNF reste l’interlocuteur judiciaire naturel des directions nationales de contrôle fiscal de la DGFiP et des services d’enquête à compétence nationale, et les axes prioritaires de son action couvrent :

  • la fraude fiscale sophistiquée des personnes physiques (par exemple, contexte médiatique de « leaks » ou de « papers »…) ;

  • les problématiques de fiscalité internationale touchant les entreprises (prix de transfert, établissement stable) ;

  • les contextes de mise en cause de la responsabilité pénale des intermédiaires facilitateurs.

II. Les stratégies d’enquête à déployer

Afin d’apporter un traitement « efficace » de la fraude fiscale, les procureurs de la République sont invités à organiser des rencontres opérationnelles régulières avec l’administration fiscale. En pratique, il s’agit pour l’administration fiscale d’informer les parquets sur le statut de la procédure administrative en cours (le contribuable a-t-il saisi le juge fiscal ? l’administration a-t-elle accordé un dégrèvement ? une transaction fiscale est-elle envisagée ? des saisies conservatoires ont-elles été prises ?...), et d’informer le parquet sur des aspects spécifiques des dossiers (procédé de fraude inhabituel, exemplarité…) ainsi que son intention de se constituer partie civile.

Certains dossiers transmis automatiquement aux parquets par le jeu de l’article L 228 du LPF font l’objet d’une fiche d’accompagnement : elle décrit le procédé de fraude, contient des renseignements généraux sur l’entreprise et ses dirigeants, et d’autres sur l’état de la procédure fiscale, et a pour but affiché d’aider les parquets à « apprécier la matérialité et l’intentionnalité des infractions commises en matière de fraude fiscale ».

III. Les modes de poursuite à privilégier, au service d’une répression renforcée

Les saisies pénales conservatoires sont fortement encouragées puis, au stade du jugement, les confiscations.

Surtout, la circulaire propose de « faire un usage aussi large que possible » de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), élargie par la loi à l’infraction de fraude fiscale, quels que soient les montants en jeu.

Le recours à la convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) doit, quant à lui, rester réservé aux dossiers « à fort enjeu financier ».

La circulaire met en avant le principe de cumul des sanctions fiscales et pénales (encadré par le Conseil constitutionnel), et rappelle que l’existence d’une transaction fiscale ou de paiement spontané des droits par le contribuable n’oblige pas les parquets à classer sans suite les dossiers.

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne