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La preuve de l’information annuelle de la caution doit être individuelle

La preuve de l'envoi de l’information annuelle à la caution ne saurait résulter d’un constat d’huissier global des envois groupés si la caution n’y apparaît pas nommément.

Cass. com. 18-6-2025 n° 23-14.713 F-B, X c/ Sté Banque populaire rives de Paris


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© Lefebvre Dalloz

Une banque, qui a octroyé à une société un prêt dont le remboursement était garanti par le cautionnement du dirigeant social, poursuit ce dernier après la défaillance de la société.

Reprochant à la banque d'avoir manqué à son obligation d'information annuelle, la caution soutient que celle-ci doit être déchue sur deux années de son droit aux intérêts contractuels du prêt en application de l’ancien article L 313-22 du Code monétaire et financier.

Une cour d’appel rejette la demande de déchéance : la banque produisait deux constats d’huissier ayant contrôlé la réalité des envois effectués, pour les années en cause, par le prestataire de la banque au titre de l’information annuelle des cautions ; ces éléments prouvaient de manière suffisante la réalité de l'envoi de l'information aux cautions et, partant, du respect par la banque de son obligation d'information annuelle.

La Cour de cassation censure cette décision : la cour d’appel aurait dû rechercher, comme il le lui incombait, si le nom de la caution figurait dans les listings d'envoi des lettres d'information aux cautions pour ces années.

A noter :

L’article L 313-22 du Code monétaire et financier, applicable à l’époque des faits, prévoyait que l’établissement de crédit ayant consenti un concours financier à une entreprise en contrepartie d’un cautionnement donné par une personne physique ou morale est tenu de communiquer à la caution avant le 31 mars de chaque année un certain nombre d’informations (notamment, le montant des sommes restant dues au 31 décembre de l’année précédente), et ce sous peine de déchéance de la garantie des intérêts et pénalités échus depuis la date de la précédente information et jusqu’à celle de la communication de la nouvelle information.

La réforme des sûretés de 2021 (Ord. 2021-1192 du 15-9-2021) a, on le rappelle, abrogé les différents textes qui organisaient l’information annuelle des cautions selon des modalités diverses (C. civ. art 2293 ; C. consom. art. L 333-2 et L 343-6 et C. mon. fin. art. L 313-22 appliqué dans l’arrêt commenté) et a unifié le régime de cette information au sein de l’article 2302 du Code civil. Celui-ci s’applique depuis le 1er janvier 2022, y compris aux cautionnements souscrits antérieurement (Ord. 2021-1192 art. 37, III), mais pas dans le cadre des contentieux en cours à cette date, ce qui était le cas dans l’affaire ci-dessus. 

La solution ici retenue par la Cour de cassation est transposable au régime actuel et au créancier professionnel garanti par une caution personne physique.

En cas de contestation de l’exécution de cette obligation, le créancier bénéficiaire du cautionnement doit prouver l'envoi de l'information (Cass. com. 4-11-2021 n° 20-12.839 F-D : RJDA 4/22 n° 221 ; Cass. 1e civ. 25-5-2022 n° 21-11.045 F-PB : BRDA 13/22 inf. 11) mais pas sa réception par la caution (Cass. com. 2-7-2013 n° 12-18.413 FS-PB : RJDA 10/13 n° 838 ; Cass. com. 24-11-2021 n° 20-11.722 F-D : BRDA 1/22 inf. 16). La preuve peut être apportée par tous moyens (notamment, Cass. com. 4-11-2021 précité). La production de la copie de la lettre simple adressée à la caution est insuffisante pour en prouver l’envoi (jurisprudence constante), mais ce dernier est établi en cas de lettre recommandée AR, même si la caution ne l’a pas retirée (Cass. com. 24-11-2021 précité). Il reste que ce procédé est onéreux.

Les banques recourent souvent à des commissaires de justice (ex-huissiers) pour faire constater qu’elles procèdent bien à l’envoi groupé de l’information annuelle. En 2017, il a été jugé qu’une banque prouvait avoir rempli son obligation en produisant les lettres annuelles adressées à la caution ainsi que les procès-verbaux d’huissier de justice attestant globalement des envois annuels (Cass. com. 4-5-2017 n° 15-20.352 F-D). Un arrêt plus récent a estimé que la banque apportait la preuve requise en produisant, outre la copie des lettres d’information, les listes des lettres adressées sur les années en cause aux personnes s'étant portées caution à son profit, sur lesquelles figurait le nom de la caution invoquant la déchéance du droit aux intérêts, ainsi que le procès-verbal de constat de l'huissier de justice ayant procédé au contrôle par sondage de l'édition, du contenu, de la mise sous pli et de l'expédition des lettres d'information annuelle des cautions correspondant à la liste précitée, attestant ainsi globalement des envois annuels aux cautions (Cass. com. 6-7-2022 n° 20-17.355 F-B). Encore plus récemment, la Cour de cassation a imposé au juge, devant lequel des procès-verbaux d’envoi groupé étaient produits, de rechercher si le nom de la caution figurait sur les listing d’envoi (Cass. com. 15-2-2023 n° 21-19.869 F-B). Par l’arrêt commenté, la chambre commerciale de la Cour de cassation réaffirme le principe, qui paraît exclure tout pouvoir d’appréciation des juges du fond. De son côté, la première chambre civile de la Haute Juridiction se réfère toujours à leur appréciation souveraine (Cass. 15-5-2024 n° 23-11.713 F-D, rejetant le pourvoi formé contre un arrêt d’appel ayant écarté le caractère probant de constats d’huissier établis par sondage et ne comportant pas le nom de la caution).

Même si l’envoi de l’information annuelle est établi, la caution peut en contester le contenu s'il n'est pas conforme aux exigences légales (Cass. com. 21-10-2020 n° 18-20.077 F-D : RJDA 3/21 n° 190).

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