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A propos de la recevabilité des demandes nouvelles présentées en appel

Dans deux arrêts du 25 juin 2025, la Cour de cassation se penche sur la recevabilité des prétentions nouvelles formées par le salarié au stade de l’appel. L’occasion pour la Haute Juridiction de préciser sa jurisprudence en la matière.


Par Valérie BALLAND
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©Gettyimages

Cass. soc. 25-6-2025 n° 23-18.889 FS-B, V. c/ Sté Atalian propreté

Cass. soc. 25-6-2025 n° 23-20.007 FS-B, K. c/ Sté Paris contentieux

Depuis la réforme de la procédure prud’homale en 2016 et la suppression du principe de l'unicité de l'instance, les parties ne peuvent plus soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions dérivant d’un même contrat de travail, à peine d'irrecevabilité relevée d'office (CPC art. 564). Ne sont pas nouvelles les prétentions qui tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent (CPC art. 565) ou qui sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire des prétentions soumises au premier juge (CPC art. 566).

La chambre sociale de la Cour de cassation a déjà eu l’occasion de se prononcer sur l’interprétation de ces dispositions applicables aux instances introduites depuis le 1er août 2016 (voir pour des illustrations de demandes recevables en appel, car tendant aux mêmes fins : Cass. soc. 1-12-2021 n° 20-13.339 FP-B : RJS 2/22 n° 98 et Cass. soc. 10-7-2024 n° 22-16.805 FS-B : RJS 10/24 n° 546 ; et pour des demandes nouvelles : Cass. soc. 25-5-2022 n° 21-11.478 F-B : RJS 8-9/22 n° 476 ou Cass. soc. 2-4-2025 n° 23-21.796 F-D : RJS 6/25).

Pour rappel, dans le contentieux prud'homal, le principe de l’unicité de l’appel obligeait les parties, sauf exception, à présenter toutes les prétentions concernant un même contrat de travail dans une même instance, sous peine d'irrecevabilité, et leur permettait de former toutes demandes nouvelles en appel.

Dans le droit fil de sa jurisprudence, la Haute Juridiction fournit de nouvelles illustrations de ces principes dans deux arrêts du 25 juin 2025.

Des demandes initiales de rappels de salaire, complétées en appel

Rappels de salaire suivis d’une demande de requalification de CDD en CDI

Dans la première espèce (n° 23-18.889 FS-B), une salariée a été engagée suivant plusieurs contrats de travail à durée déterminée (CDD) et à temps partiel pour remplacer une salariée malade. Moins de deux ans après le terme de son dernier contrat, elle saisit le conseil de prud’hommes en rappel des salaires qu'elle aurait dû percevoir jusqu'au retour de la salariée remplacée ou jusqu'à la rupture du contrat de travail de cette salariée. Elle obtient gain de cause. L’employeur fait appel de ce jugement.

Devant la cour d’appel la salariée sollicite, pour la première fois, à titre subsidiaire, la requalification des CDD en CDI et le paiement d’indemnités de rupture. Elle expose qu’en première instance elle avait demandé un rappel de salaire en raison de la conclusion irrégulière de brefs CDD pour remplacer une salariée malade continûment. Selon elle, la demande subsidiaire formée en appel tirait elle aussi les conséquences de la succession irrégulière de ces contrats. Ses demandes sont déclarées irrecevables par la cour d’appel.

Rappels d’heures supplémentaires suivis de demandes de rémunération variable et de remboursement de frais professionnels

Dans la seconde espèce (n° 23-20.007 FS-B), un salarié avait saisi le conseil de prud’hommes d’une demande en paiement de rappels d’heures supplémentaires, à laquelle il avait ajouté, en appel, d’une part une demande en paiement d’un rappel de rémunération variable et, d’autre part, une demande de remboursement de frais professionnels. Ces demandes subsidiaires tendaient, à son sens, à l’exécution d’un même rapport contractuel et n’étaient donc pas nouvelles. La cour d’appel n’est pas de cet avis et les déclare irrecevables.

Pour être recevable, la demande subsidiaire doit tendre aux mêmes fins que la demande initiale

Dans les deux espèces, la chambre sociale de la Cour de cassation se prononce au visa de l’article 565 du Code de procédure civile dont elle rappelle d’emblée la teneur et en applique le principe aux cas d’espèce.

Ce n’est pas le cas de la demande en requalification en CDI suivant celle en rappel de salaires au titre de CDD…

Pour la Haute Juridiction, les demandes subsidiaires de la salariée en requalification de CDD en un CDI, en paiement d'une indemnité de requalification et d'indemnités relatives à la rupture du contrat de travail requalifié ne tendent pas aux mêmes fins que la demande en paiement de rappels de salaire au titre d'un CDD, seule présentée par la salariée en première instance. Dès lors, ces demandes étaient nouvelles et donc irrecevables en appel (1re espèce).

…ni de la demande en remboursement de frais professionnels suivant celle en paiement de rappel d’heures supplémentaires

Confirmant l’arrêt d’appel, la chambre sociale juge également, dans la deuxième espèce, que la demande en remboursement de frais professionnels, qui est dépourvue de caractère salarial, ne tend pas aux mêmes fins que celle en rappel d'heures supplémentaires et en contrepartie obligatoire en repos présentées en première instance. Elle était en conséquence irrecevable.

Mais les demandes en paiement de rémunération variable et de rappel d’heures supplémentaires tendent aux mêmes fins

Toujours dans la seconde affaire, la chambre sociale casse, en revanche, l’arrêt d’appel, s’agissant de la demande subsidiaire en paiement de la rémunération variable. Ici, la demande en paiement de la rémunération variable tendait aux mêmes fins que les demandes initiales en paiement de la rémunération versée en contrepartie du travail. Ne s’agissant pas d’une demande nouvelle, elle était donc recevable.

La chambre sociale rejette donc l’argumentation de la cour d’appel qui considérait, d’une part que la demande en rappel d’heures supplémentaires constituait une prétention distincte car elle reposait sur un litige afférent à la durée du travail et, d’autre part, que ni leur nature salariale commune, ni le fait qu'elles portent sur l'exécution du contrat de travail ne sont à eux seuls déterminants.

A notre avis :

Dès lors que des demandes concernent le paiement de la rémunération versée en contrepartie du travail, elles tendent aux mêmes fins et peuvent être complétées en appel.

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