Le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, d’une part, de délivrer au preneur le bien loué et, d’autre part, de lui en assurer la jouissance paisible pendant la durée du bail (art. 1719).
Ces obligations continues du bailleur sont exigibles pendant toute la durée du bail, de sorte que la persistance du manquement du bailleur à celles-ci constitue un fait permettant au locataire d'exercer l'action en résiliation du bail.
La Cour de cassation a été appelée à énoncer ce principe dans un cas où un locataire commercial avait agi en résiliation du bail, soutenant que le bailleur avait amputé d'un tiers l'assiette du bail en y construisant un hangar et un parking loués à un tiers et empêché l'accès aux bâtiments loués.
La Haute Juridiction a cassé la décision d’une cour d’appel qui avait déclaré cette action prescrite après avoir retenu que le délai de prescription de l'action en résiliation fondée sur le manquement du bailleur à son obligation de délivrance ou de jouissance paisible court à compter du jour de la connaissance de la réduction de la surface louée et de la difficulté à accéder aux bâtiments loués. En effet, la cour d’appel ne pouvait pas valablement statuer ainsi alors que la réduction de l'assiette du bien loué persistait.
A noter :
Malgré la lettre de l’article 1719 du Code civil, qui prévoit que seule l’obligation d’assurer la jouissance paisible des locaux dure pendant la durée du bail, la Cour de cassation confirme qu’il incombe au bailleur de respecter son obligation de délivrance tout au long de l'exécution du contrat (notamment, Cass. 3e civ. 10-9-2020 n° 18-21.890 F-D : RJDA 12/20 n° 629 ; Cass. 3e civ. 30-6-2021 n° 17-26.348 F-D). Il est vrai que le bail est un contrat par lequel l'une des parties s'oblige à faire jouir l'autre d'un bien pendant un certain temps, et moyennant un certain prix que celle-ci s'oblige de lui payer (C. civ. art. 1709), de sorte que la mise à la disposition du locataire des locaux convenus est de l’essence du bail.
En cas de manquement du bailleur à son obligation de délivrance, le locataire peut poursuivre la résiliation du bail, son action étant soumise à la prescription de droit commun de 5 ans (CA Rouen 1-6-2022 n° 20/03324 : RJDA 1/23 n° 14), prescription qui ne commence pas à courir tant que perdure le manquement.
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