Dans un arrêt important du 11 septembre 2025, la Cour de cassation affirme que l’absence de mention sur le mandat du lieu de délivrance de la carte professionnelle n’affecte pas, à elle seule, la validité du mandat lorsque le mandataire justifie avoir été titulaire, à la date de celui-ci, d’une carte professionnelle régulièrement délivrée. La Cour refuse néanmoins tout droit à rémunération à l’agent immobilier, la vente ayant été réalisée alors que les clauses du mandat interdisant à l’acquéreur de traiter directement avec les vendeurs étaient expirées (Cass. 3e civ. 11-9-2025 n° 23-17.579 FS-B, Sté Lavorel hôtels c/ Sté Bellecôte immobilier).
Les faits
Titulaire d’un mandat de vente d’un hôtel, un agent immobilier se rapproche d’une société hôtelière et de sa holding pour les informer de la possibilité d’acquérir l’hôtel ainsi qu’une parcelle attenante sur laquelle est édifié un chalet appartenant à un tiers. En 2016, il signe un premier mandat de recherche d’une durée de 3 mois renouvelable avec la société hôtelière portant sur l’hôtel et le chalet. Il en conclut un second avec la holding, également pour une durée de 3 mois renouvelable, portant sur le chalet. Ce chalet est finalement vendu à une société tierce en 2017.
En 2018, la société hôtelière est contactée directement par le propriétaire de l’hôtel, qui lui fait une nouvelle proposition d’achat à des conditions différentes de celles de 2016. De son côté, la holding est approchée par la société qui a acquis le chalet et qui propose de le lui vendre. La signature de la vente de l’hôtel et du chalet au profit de la société hôtelière et de sa holding intervient en octobre de la même année sans l’intervention de l’agent immobilier. Soutenant que c’est par son entremise que les acquisitions ont pu se réaliser, celui-ci réclame le paiement de sa commission. Les mandantes refusent en invoquant la nullité des mandats faute de mentionner le lieu de délivrance de la carte professionnelle ainsi que l’expiration des clauses des mandats leur interdisant de traiter directement avec le vendeur.
La cour d’appel reconnaît la validité des mandats et condamne la société hôtelière et sa holding à payer les honoraires à l’agence. Elle considère que l’article 92 du décret du 20 juillet 1972 ne prévoit pas la nullité du mandat lorsqu’il ne mentionne pas le lieu de délivrance de la carte professionnelle et qu’aucun grief ne peut être invoqué par les sociétés hôtelières. Elle estime aussi que, bien que conclue après l’expiration des mandats de recherche, la double vente a été réalisée grâce à l’entremise de l’agent immobilier qui a mis en relation les parties et contribué activement par ses démarches et ses conseils au bon déroulement du projet.
Validation du mandat malgré le défaut d’indication du lieu de délivrance de la carte professionnelle
La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel en ce qu’il valide le mandat. La Cour rappelle que la loi Hoguet et son décret d’application prévoient que l’agent immobilier doit détenir une carte professionnelle dont les numéro et lieu de délivrance doivent figurer sur le mandat (Loi 70-9 du 2-1-1970 art. 3 et 6, I ; Décret 72-678 du 20-7-1972 art. 92). Elle précise que l’objectif de ces dispositions est d’assurer la compétence et la moralité des agents immobiliers et de protéger le mandant (Cass. 1e civ. 12-11-2020 n° 19-14.112). Elle en déduit que l’absence de mention sur le mandat du lieu de délivrance de la carte professionnelle n’affecte pas, à elle seule, la validité du mandat dès lors que le mandataire est titulaire, à la date de celui-ci, d’une carte professionnelle régulièrement délivrée.
Pour rappel, l’agent immobilier ne peut participer à une négociation que s’il détient une carte professionnelle (Loi 70-9 du 2-1-1970 art. 3) et un mandat soumis à un formalisme prévu par la loi Hoguet et son décret d’application (Loi 70-9 du 2-1-1970 art. 6, I ; Décret 72-678 du 20-7-1972 art. 72, 73, 78 et 92). Aucun de ces textes ne prévoyant de sanction à ce formalisme, qui est d’ordre public, la Cour de cassation a considéré pendant longtemps que son inobservation était sanctionnée par la nullité absolue du mandat pouvant être invoquée par toute personne intéressée. Mais en 2017, elle a opéré un revirement de jurisprudence en jugeant que la méconnaissance de ces règles de forme devait être sanctionnée par la nullité relative du mandat, qui ne pouvait être invoquée que par la partie que la loi entendait protéger, en l’occurrence le mandant de l’agent immobilier (Cass. ch. mixte 24-2-2017 n° 15-20.411 PBRI : BPIM 2/17 inf. 166, visant le formalisme prévu aux art. 6 de la loi et 72 du décret).
Dans l’affaire commentée, le litige portait sur la non-indication du lieu de délivrance de la carte professionnelle sur le mandat, formalité requise par l’article 92 du décret.
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