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Accueil/ Actualités - La Quotidienne/ Social/ Rupture du contrat de travail

Une semaine de jurisprudence sociale à la Cour de cassation

Nous avons sélectionné pour vous les arrêts les plus marquants rendus cette semaine par la Cour de cassation.


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©Gettyimages

Exécution du contrat

  • L'illicéité d'un moyen de preuve n'entraîne pas nécessairement son rejet des débats, le juge devant, lorsque cela lui est demandé, apprécier si l'utilisation de cette preuve a porté atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve, lequel peut justifier la production d'éléments portant atteinte à la vie personnelle d'un salarié à la condition que cette production soit indispensable à l'exercice de ce droit et que l'atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi. En présence d'une preuve illicite, le juge doit d'abord s'interroger sur la légitimité du contrôle opéré par l'employeur et vérifier s'il existait des raisons concrètes qui justifiaient le recours à la surveillance et l'ampleur de celle-ci. Il doit ensuite rechercher si l'employeur ne pouvait pas atteindre un résultat identique en utilisant d'autres moyens plus respectueux de la vie personnelle du salarié. Enfin le juge doit apprécier le caractère proportionné de l'atteinte ainsi portée à la vie personnelle au regard du but poursuivi. Il en résulte que : 

    • constituent un moyen de preuve illicite les enregistrements extraits d'un dispositif de vidéosurveillance dont la salariée n'avait été informée ni des finalités, ni de la base juridique, et pour lequel l'employeur n'avait pas sollicité l'autorisation préfectorale préalable exigée par les textes. Ayant constaté que la production de ces enregistrements n'était pas indispensable à l'exercice du droit à la preuve de l'employeur, dès lors que celui-ci disposait d'un autre moyen de preuve qu'il n'avait pas versé aux débats, la cour d'appel a pu décider que les pièces litigieuses étaient irrecevables, peu important qu'elle ait ensuite estimé que la réalité de la faute reprochée à la salariée n'était pas établie par les autres pièces produites (Cass. soc. 8-3-2023 n° 21-17.802 FS-B).

    • le rapprochement opéré par l'employeur entre les données collectées par un système de badgeage et celles issues du logiciel de contrôle du temps de travail afin de contrôler l'activité et les horaires de travail des salariés, sans avoir procédé à une déclaration auprès du correspondant informatique et liberté au sein de l'entreprise ni informé préalablement les salariés et les institutions représentatives du personnel que les horaires d'entrée et de sortie des bâtiments étaient susceptibles d'être contrôlés, constitue un mode de preuve illicite. Une cour d'appel ne peut pas décider que ce mode de preuve ne peut pas être utilisé pour prouver la faute reprochée, sans vérifier si cet élément n'était pas indispensable à l'exercice du droit à la preuve de l'employeur et si l'atteinte au respect de la vie personnelle de la salariée n'était pas strictement proportionnée au but poursuivi (Cass. soc. 8-3-2023 n° 21-20.798 FS-D).

  • Une cour d'appel a pu décider que le procès-verbal de police invoqué à l'appui du licenciement disciplinaire d'un chauffeur de bus avait été obtenu de manière illicite et était donc irrecevable dès lors que (Cass. soc. 8-3-2023 n° 20-21.848 FS-B) :

    • la preuve de la faute grave énoncée dans la lettre de licenciement n'était administrée par l'employeur qu'au moyen de ce procès-verbal, dressé après que le salarié avait lui-même déposé plainte pour vol de tickets de bus, et que les enquêteurs, en visionnant les enregistrements vidéo du bus conduit par celui-ci, avaient relevé des infractions au Code de la route contre ce dernier, 

    • de l'aveu même de l'employeur, la communication du procès-verbal était intervenue dans le cadre informel des relations qu'il entretenait pour les besoins de son activité avec les autorités de police, en sorte que cette délivrance de pièce issue d'une procédure pénale à laquelle l'employeur était tiers, intervenue sans justification d'une autorisation du procureur de la République, était illicite,

    • et que l'employeur, de manière déloyale et en méconnaissance de ses propres engagements résultant de la charte de la vidéo-protection en vigueur dans l'entreprise, d'une part, avait accepté de remettre l'enregistrement à la police, alors qu'aucune infraction ou perturbation afférente à la sécurité des personnes n'était en cause s'agissant de l'allégation d'un vol de titres de transport sans violences et, d'autre part, avait utilisé les constats tirés par la police de cet enregistrement contenus dans le procès-verbal dont il avait en outre irrégulièrement été destinataire, pour prouver la faute du salarié et procéder à son licenciement, en violation de de la charte aux termes de laquelle il s'était engagé à ne pas recourir au système de vidéoprotection pour apporter la preuve d'une faute du salarié lors d'affaires disciplinaires internes.

  • Il appartient au juge saisi d'une demande de communication de pièces sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile, d'abord, de rechercher si cette communication n'est pas nécessaire à l'exercice du droit à la preuve de l'inégalité de traitement alléguée et proportionnée au but poursuivi et s'il existe ainsi un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, ensuite, si les éléments dont la communication est demandée sont de nature à porter atteinte à la vie personnelle d'autres salariés, de vérifier quelles mesures sont indispensables à l'exercice du droit à la preuve et proportionnées au but poursuivi, au besoin en cantonnant le périmètre de la production de pièces sollicitée. Ayant relevé que, pour présenter des éléments laissant présumer l'existence de l'inégalité salariale alléguée entre elle et certains de ses collègues masculins, la salariée était bien fondée à obtenir la communication des bulletins de salaires de 8 autres salariés occupant des postes de niveau comparable au sien dans des fonctions d'encadrement, commerciales ou de marché, avec occultation des données personnelles à l'exception des noms et prénoms, de la classification conventionnelle, de la rémunération mensuelle détaillée et de la rémunération brute totale cumulée par année civile, la cour d'appel a fait ressortir que cette communication d'éléments portant atteinte à la vie personnelle d'autres salariés était indispensable à l'exercice du droit à la preuve et proportionnée au but poursuivi, soit la défense de l'intérêt légitime de la salariée à l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d'emploi et de travail (Cass. soc. 8-3-2023 n° 21-12.492 FS-B).

Rupture du contrat

  • Les articles 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et 3 de la Constitution du 4 octobre 1958 n'instituent pas une liberté fondamentale qui justifierait, en cas de nullité du licenciement prononcé en violation de l'article L 2123-8 du Code général des collectivités territoriales, la non-déduction des revenus de remplacement perçus par le salarié entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration. Le licenciement ayant été annulé en raison de l'absence de la salariée liée à l'exercice de son mandat d'élue locale et l'intéressée ayant été réintégrée, l'employeur est tenu au paiement du montant des salaires qu'elle aurait dû percevoir entre son licenciement et sa réintégration, après déduction des sommes perçues au titre d'une autre activité et du revenu de remplacement servis pendant cette période (Cass. soc. 8-3-2023 n° 20-18.507 FS-B).

  • La fin du détachement d'un fonctionnaire pour occuper un emploi de droit privé auprès d'un organisme de droit public, auquel il est lié par un contrat de travail, justifie la rupture de la relation de travail, peu important que le non-renouvellement du détachement résulte de la décision de l'organisme d'accueil. Toutefois, le refus par l'organisme d'accueil de solliciter le renouvellement du détachement ne peut pas être fondé sur un motif discriminatoire (Cass. soc. 8-3-2023 n° 21-16.391 FS-B).

  • Dès lors que la convention collective applicable prévoit qu'en cas de licenciement, sauf pour faute lourde, le cadre congédié après 2 ans de présence recevra une indemnité de licenciement calculée en fonction de son ancienneté dans l'entreprise, la cour d'appel ne peut pas débouter le salarié licencié pour faute grave de sa demande d'indemnité (Cass. soc. 8-3-2023 n° 21-16.687 F-D).

Contrôle - contentieux

  • Le principe selon lequel nul ne peut se constituer de preuve à soi-même n'est pas applicable à la preuve d'un fait juridique. Dès lors, une cour d'appel ne peut pas dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et débouter le salarié de ses demandes en retenant que si l'intéressé affirme s'être tenu à la disposition de la société, il ne produit pour en justifier que le compte rendu d'entretien préalable, signé du seul conseiller du salarié, et son propre courrier (Cass. soc. 8-3-2023 n° 21-22.484 F-D).

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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