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Une semaine de jurisprudence sociale à la Cour de cassation

Nous avons sélectionné pour vous les arrêts les plus marquants rendus cette semaine par la Cour de cassation.


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©Getty Images

Exécution du contrat

  • La consultation d'un organisme chargé, en vertu d'une disposition conventionnelle ou d'un règlement intérieur, de donner son avis sur une sanction envisagée par un employeur constitue une garantie de fond, en sorte que la sanction ne peut pas être prononcée sans que cet organisme ait été consulté. L'irrégularité commise dans le déroulement de la procédure disciplinaire, prévue par une telle disposition, est assimilée à la violation d'une garantie de fond lorsqu'elle a privé le salarié de droits de sa défense ou lorsqu'elle est susceptible d'avoir exercé en l'espèce une influence sur la décision finale de l'employeur. Une cour d'appel ne peut pas annuler une mise à pied au motif que les représentants du personnel ont été consultés trop tardivement sans rechercher si l'irrégularité dans le déroulement de la procédure a privé le salarié de la possibilité d'assurer utilement sa défense ou était susceptible d'avoir exercé en l'espèce une influence sur la décision finale de sanctionner par l'employeur (Cass. soc. 20-3-2024 n° 22-17.292 F-B).

  • Constitue une sanction pécuniaire prohibée le retrait d'un trentième de rémunération du salarié consécutif à la décision unilatérale d'une compagnie aérienne d'interdire l'accès des stewards à une formation réglementaire s'ils ont plus de 10 minutes de retard ou s'ils ne disposent pas d'une documentation à jour, alors que ces conditions ne sont pas justifiées par un objectif légitime (Cass. soc. 20-3-2024 n° 22-20.569 F-D).

  • L'employeur n'a pas épuisé son pouvoir disciplinaire en adressant un courriel de rappel à l'ordre au salarié par lequel il se borne à lui demander de faire preuve de respect à son égard, de cesser d'être agressif, de faire preuve de jugements moraux, de colporter des rumeurs et autres dénigrements auprès de la clientèle et des autres salariés (Cass. soc. 20-3-2024 n° 22-14.465 F-D).

  • Ayant retenu que les propos dénigrants et déplacés du salarié mettaient en cause l'honnêteté des dirigeants et qu'il ne pouvait pas justifier de tels propos en excipant de leur caractère fondé, qui n'était au demeurant pas démontré, la cour d'appel a pu en déduire qu'ils caractérisaient un abus de la liberté d'expression justifiant un licenciement pour faute grave (Cass. soc. 20-3-2024 n° 22-14.465 F-D).

Paie

  • Le droit aux indemnités journalières de l'assurance maladie s'apprécie sur la base des salaires effectivement versés durant la période précédant l'interruption de travail. Il en résulte que les rappels de salaires versés postérieurement à cette date ne doivent pas être pris en compte, de sorte que l'assuré, qui ne remplissait pas les conditions requises par le CSS, ne pouvait pas bénéficier du versement d'indemnités journalières (Cass. 2e civ. 21-3-2024 n° 21-18.015 F-B).

  • Le versement des indemnités journalières de l'assurance maladie est subordonné à la constatation par le médecin traitant d'une incapacité de travail, au vu des éléments médicaux qu'il identifie. Cette incapacité doit être constatée par certificat médical. Il en est de même en cas de prolongation de l'arrêt de travail initial. Dès lors, l'assuré ne peut plus prétendre aux indemnités journalières au titre de l'arrêt de travail prescrit en raison de l'affection de longue durée dont il est atteint si cet arrêt n'a pas fait l'objet d'une prescription médicale de prolongation (Cass. 2e civ. 21-3-2024 n° 22-11.242 F-B).

  • Il résulte de la combinaison des articles L 3253-8, 1° et L 3253-15 du Code du travail et de l'article L  625-6 du Code de commerce que l'AGS doit garantir les sommes dues au salarié portées sur le relevé complémentaire établi à la suite d'une décision de la juridiction prud'homale rendue après la clôture de la liquidation judiciaire (Cass. soc. 20-3-2024 n° 22-10.332 F-D).

  • Une cour d’appel ne saurait condamner la société à payer au salarié licencié pour motif personnel une certaine somme au titre d’une prime annuelle prévue par l’article 3.7.2 de la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire du 12 juillet 2001, dans sa rédaction antérieure à l'avenant n° 70 du 16 janvier 2019, alors que, si la convention collective prévoit le versement de la prime litigieuse au prorata du temps de présence en cas de départ à la retraite ou de mise à la retraite, elle ne prévoit pas un tel versement lors d'un départ en cours d'année pour une autre cause, sauf le licenciement économique (Cass. ssoc. 20-3-2024 n° 22-18.249 F-D).

Rupture du contrat

  • Ayant constaté que l'employeur avait eu connaissance des faits le jour de l'accident provoqué par le salarié et qu'aucune circonstance particulière ne justifiait le délai entre cette information et sa convocation à l'entretien préalable au licenciement, la cour d'appel a pu décider que ce délai enlevait tout caractère de gravité à la faute, même si le salarié avait été placé en arrêt de travail au cours de cette période (Cass. soc. 20-3-2024 n° 23-13.876 F-D).

  • Un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut pas justifier, en principe, un licenciement disciplinaire, sauf s'il constitue un manquement de l'intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail. Ne constitue pas un tel manquement le fait pour un salarié de s'être masturbé dans le camion mis à sa disposition par l'employeur garé dans un lieu public dès lors que les faits ont été commis en dehors du temps de travail, et que la seule circonstance que le salarié se trouvait, lors du trajet effectué entre son lieu de travail et son domicile, dans le véhicule professionnel mis à sa disposition ne pouvait pas suffire à rattacher les faits à sa vie professionnelle (Cass. soc. 20-3-2024 n° 22-19.170 F-D).

Représentation du personnel

  • Il résulte de la combinaison articles L 2314-2, L 2143-3, L 2143-6, L 2143-22 et L 2312-1 du Code du travail que le législateur n'a prévu la possibilité de désigner un représentant syndical au CSE distinct du délégué syndical que dans les entreprises de plus de 300 salariés et que, dans les entreprises de moins de 50 salariés dans lesquelles la désignation d'un délégué syndical en application des dispositions de droit commun de l'article L 2143-3 du Code du travail est exclue, les dispositions de l'article L 2143-22 ne sont pas applicables. La désignation dérogatoire, maintenue par le législateur, d'un membre de l'institution représentative du personnel prévue dans les entreprises de moins de 50 salariés comme délégué syndical, sans crédit d'heures de délégation supplémentaire, en application des dispositions de l'article L 2143-6 du même Code, n'a pas pour conséquence de rendre applicable la possibilité de désigner un représentant syndical auprès du CSE des entreprises de moins de 50 salariés. Il en est de même de la désignation dérogatoire, dans les entreprises de moins de 50 salariés, d'un délégué syndical résultant d'une disposition conventionnelle, telle que l'article 8 de la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 (Cass. soc. 20-3-2024 n° 23-18.331 F-B).

  • Ayant constaté que, suite aux refus du salarié protégé de signer l'avenant à son contrat de travail prévoyant la remise du matériel de géolocalisation, au motif qu'il portait atteinte à sa personne et à ses libertés, l'employeur avait convoqué celui-ci à un entretien préalable, en le dispensant d'activité avec maintien de sa rémunération, avant de renoncer à cette procédure disciplinaire, puis l'avait mis en demeure de reprendre son poste et de respecter la nouvelle organisation de contrôle du temps de travail de distribution, la cour d'appel ne pouvait pas décider que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail produisait les effets d'une démission sans rechercher, comme il lui était demandé, si ces circonstances ne caractérisaient pas des pressions de l'employeur en vue d'échapper à l'intervention de l'inspection du travail et n'étaient pas de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail (Cass. soc. 20-3-2024 n° 22-13.129 F-D).

  • Le législateur a entendu accorder aux salariés membres des commissions paritaires professionnelles créées par accord collectif la protection prévue par le Code du travail pour les délégués syndicaux en cas de licenciement. En conséquence, le licenciement de la salariée membre d'une telle commission, en l'absence d'autorisation administrative de licenciement, constitue un trouble manifestement illicite et le juge des référés a pu ordonner sa réintégration dans l'entreprise (Cass. soc. 20-3-2024 n° 22-15.857 F-D).

  • Ayant constaté que la juridiction administrative était saisie d’un recours en annulation contre la décision administrative d’autorisation du transfert du contrat de travail du représentant du personnel, la cour d’appel a justement énoncé qu’il n’appartenait pas au juge judiciaire de remettre en cause cette décision et a pu retenir l’existence d’un trouble manifestement illicite résultant du refus de la société cessionnaire de la respecter, peu important l’existence du recours administratif dépourvu d’effet suspensif (Cass. soc. 20-3-2024 n° 22-17.043 F-D).

  • Un syndicat qui, sans émettre expressément de réserves, a, soit participé à la signature du protocole d'accord préélectoral, soit présenté des candidats, ne peut se prévaloir du défaut d'invitation régulière à négocier ce protocole. Une cour d’appel ne saurait donc annuler le protocole préélectoral sans rechercher, comme il lui était demandé, si le syndicat en cause, qui avait présenté des candidats, avait émis des réserves expresses sur la régularité de l’invitation à négocier le protocole d’accord préélectoral (Cass. soc. 22-23.929 F-D).

  • Une cour d’appel ne saurait débouter un salarié délégué syndical CFDT et le syndicat CFDT de leurs demandes de dommages-intérêts résultat de l’atteinte à la vie privée causée par la diffusion du bulletin de salaire du délégué syndical en retenant que ce dernier n’apporte aucun élément de nature à établir que la communication, à des tiers, du montant de sa rémunération aurait eu un effet quelconque en termes de réputation, de carrière, d'image au sein de l'entreprise alors que la seule constatation de l'atteinte à la vie privée ouvre droit à réparation (Cass. soc. 20-3-2024 n° 22-19.153 F-D).

Statuts particuliers

  • Le contrat de travail d'un salarié désigné comme mandataire social et qui cesse d'être placé à l'égard de la société dans un état de subordination, pour l'exécution de fonctions techniques distinctes du mandat, est seulement suspendu pendant la durée de ce mandat. Il incombe à celui qui soutient que la nomination du salarié comme mandataire social a suspendu son contrat de travail et qu'il n'y a pas eu cumul du contrat de travail et du mandat social postérieur d'en rapporter la preuve (Cass. soc. 20-3-2024 n° 21-10.968 F-D).

  • Ayant énoncé à bon droit qu’en cas d'accident survenant alors que l'exploitant agricole a déjà été antérieurement victime d'accidents du travail, il est nécessaire de vérifier si le taux d'incapacité permanente résultant du dernier accident ouvre droit à une rente et ensuite, si le droit à une rente est acquis, de procéder au calcul du taux utile en additionnant l'ensemble des taux d'incapacité permanente résultant des précédents accidents et constaté que, le taux d'incapacité permanente attribué suite au dernier accident du travail du 19 février 2016 étant inférieur à 30 %, la victime n'a pas droit à une indemnisation sous forme de rente, la cour d’appel en a exactement déduit que la victime ne pouvait prétendre à un cumul des taux d’incapacité permanente consécutifs à ses précédents accidents du travail et maladie professionnelle (Cass. 2e civ. 21-3-2024 n° 22-13.085 F-B).

Contrôle - contentieux

  • Les recours contentieux formés en matière d'application des législations et réglementations de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole sont précédés d'un recours préalable. Selon l'article R 142-1-A, I, du CSS, sous réserve des dispositions particulières prévues par la section 2 du chapitre 2 du titre IV du livre I et des autres dispositions législatives ou réglementaires applicables, la motivation des décisions prises par les autorités administratives et les organismes de sécurité sociale ainsi que les recours préalables mentionnés à l'article L 142-4 du même Code, sont régis par les dispositions du Code des relations du public avec l'administration (CRPA). Aux termes de l'article L 114-2 du CRPA, lorsqu'une demande est adressée à une administration incompétente, cette dernière la transmet à l'administration compétente et en avise l'intéressé. Le jugement constate que, dans un courrier daté du 29 mai 2020, la caisse a qualifié de recours amiable le courrier adressé par le conseil de l'assuré en indiquant : « Nous accusons réception en date du 10 avril 2020 de votre recours amiable. Votre dossier va faire l'objet d'une instruction au terme de laquelle il sera examiné par la Commission de Recours Amiable ». Il retient que la caisse ne saurait reprocher à l'assuré, sans se contredire elle-même, de s'être fié au contenu de ce courrier. Le tribunal en a exactement déduit que l'assuré ayant exercé un recours amiable préalable le 10 avril 2020 avant de saisir la juridiction, son recours était recevable (Cass. 2e civ. 21-3-2024 n° 22-13.906 F-B).

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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